Cinatra, la trentaine désabusée qui cogne au M.I.C
« Cinatra, c’est la trentaine désabusée de backpackers fatigués, tiraillés entre imprévus du quotidien, fausses excuses et biberons tièdes, mais encore motivés par une envie sourde de remettre un pied dans le ring, de se jauger à nouveau, de cracher ses tripes une énième fois. » Voici ce qu’on peut lire dans le communiqué de presse envoyé par le groupe il y a quelques semaines. En annexe de ce dossier, une invitation à visionner le dernier clip du quintet intitulé « Salles du Temps » et là, c’est la claque !
S’il y a bien une raison qui me pousse chaque jour à repousser les limites du sommeil et du surmenage pour alimenter ce site, c’est bien pour l’espoir de prendre encore et toujours de bonnes grosses baffes sur des bangers sortis de nulle part. Et quand je parle de baffe, je pense à celle qui vous décolle les amygdales et vous laisse le cul par terre pendant quelques minutes. Le genre de baffe qu’on prend quand on entend pour la première fois Artik avaler la prod corrosive de « Salles du Temps », deuxième clip en date de Cinatra !
Alors tout de suite on creuse : qui sont ces mecs ? D’où viennent-ils ? Quel est leur parcours ? Qu’ont-ils sorti d’autre ? Dans ces cas-là, on est content de tenir un média car on trouve d’autant plus facilement ce qu’on cherche, notamment dans une bio directement rédigée par le groupe : « Cinatra est un groupe éphémère composé de Artik, Dasuun, Gide Blaze pour le rap et Tayreeb pour les productions, sans oublier l’ingé-son Eric Marine. », le décor est planté. Un peu plus bas, on apprend que tout ce petit monde a longtemps trainé ses guêtres du côté du « End of The Weak ». Artik est d’ailleurs champion du monde des battles EOW ! Pas étonnant que le gars ait la punchline facile avec un tel casier judiciaire de découpeur d’instru.
Côté prod, le nom de Tayreeb, maitre artificier du projet, était le seul qui m’évoquait quelque chose. Un petit tour sur son Soundcloud suffit à raccorder les fils puisque l’intéressé a participé à la dernière compilation On & On Records (20syl, C2C) mais a également produit pour des habitués de nos colonnes : Guilty Simpson, Grems ou encore Pumpkin.
Un peu plus loin, je tombe sur un second clip, celui de « Space Invaders », qui finit de me convaincre d’aller jeter une oreille attentive au premier projet du groupe, un EP de 5 titres sorti en tout début d’année et éponymement intitulé Cinatra.
Si la musique de Cinatra résonnera sans aucun doute auprès d’auditeurs rap plus aguerris (pour ne pas dire plus matures), toute la force de ce groupe éphémère réside dans sa capacité à réconcilier plusieurs générations de fans de rap : celle qui a fumé sa première clope en écoutant le Wu, celle qui a vu Kanye West enterrer le Gangsta Rap et peut-être même celle qui a du défendre Drake auprès des deux premières.
Une formule à la fois authentique et moderne qui, plutôt que de faire la guerre à la trap, préfère démonter à coup de punchlines un rap game qui promet strass et paillettes à des petits jeunes de vingt ans qui seront plus tard rattrapés par le poids du quotidien et ses responsabilités, à l’aube de la trentaine… Car dans le rap comme partout, l’essentiel n’est pas le succès éphémère à la MIMS mais la longévité façon Sinatra !