Sit back, relax, enjoy the show. Anderson .Paak, le talentueux MC de Oxnard, LA, celui qui a proposé les featurings les plus hypes et les plus frais de l’année passée (non, la liste est trop longue) et qui a été désigné comme notre révélation rap de l’année 2015 revient avec son deuxième album et dernier projet en date : Malibu. Il avait été évoqué, il était attendu et le moins qu’on puisse dire, c’est que ce début d’année tient déjà sa pépite.
Toutes les influences de la Black Music qui ont façonné le talent hors norme de .Paak y ont leur hymne à la joie. Malibu dure 1h et est composé de 16 morceaux. Du blues, du rap, du funk, de la soul et même quelques phrasés de disco. Si rien n’a été oublié de cette liste, c’est bien à chacun de ces styles qu’AP dédie son talent. Sur un projet qui regroupe pas moins de 10 producteurs tous plus inspirés les uns que les autres et qui couvrent les plus nobles inspirations hip hop de ces dernières années, on est assurés d’être gâtés.
Malibu, c’est de la Black Music, pas au sens clivant du terme, mais dans l’identité et les racines musicales qu’on retrouve dans cet album. Malibu, c’est exactement 1h01min01s de sensibilité exposée par Anderson .Paak. Il y raconte simplement sa vie, ses racines, ses ambitions et ses désillusions dans un projet où l’on sent qu’il est très personnel tant dans les choix musicaux que dans les textes. En fait, l’album est un plaisir parce qu’il s’en dégage un sentiment de liberté. Liberté prise par l’artiste, qui ne transige pas avec ses envies et prend presque l’auditeur en otage. Parce que Malibu est un projet sur lequel on retrouve la soul de Paak parfaitement mise en scène par son timbre de voix un peu criard et éraillé et des productions léchées servies par des 9th Wonder, Kaytranada, Madlib ou encore Hi-Tek.
C’est aussi un album de collaborations puisque .Paak se fait accompagner de BJ The Chicago Kid sur « The Waters« , le Black Hippy Schoolboy Q sur le funky « Am I Wrong », Rapsody sur « Without You » et enfin The Game sur le déjà fameux « Room in Here ». Ce qui est beau dans cette affaire, c’est qu’à l’image de tout l’album, chaque contribution apporte sa gemme à l’édifice. Rapsody est, par exemple, impériale sur son couplet, BJ travaille toujours aussi doucement sur la jolie ligne de basse de « The Waters », et enfin, The Game réaffirme son retour en forme dans l’exigeant « Room in Here » dont la boucle de piano ensorcelle l’auditeur et le groove de .Paak flatte l’oreille.
Anderson .Paak feat. The Game – « Room in Here »
Autre point remarquable de cet album : la production signée par les plus belles ombres de studio dont recèle le Hip-Hop actuel. Et le plus fou, c’est que ces beatmakers semblent avoir parfaitement saisi ce qui fait l’univers d’Anderson .Paak et mettent leur talent au service de sa créativité. Signe que notre homme est respecté par ses pairs et son élan artistique reconnu.
A y regarder de plus près, on pourrait d’ailleurs distinguer deux tendances dans ce projet : l’une consacrée à ce qu’on connaît du bonhomme, sa fraîcheur et les sons qui le font danser, où il se fait accompagner comme pour valider que ce qu’il ressent est humain et partagé (« Without You » en est un bon exemple); et une autre où les morceaux trahissent une approche plus introspective, où les productions sont toujours aussi travaillées mais le tempo ralenti et l’instrumentation toujours riche (« Put Me thru », « Water Fall » ou « The Season / Carry Me »).
Anderson .Paak feat. The Game – « The Season / Carry Me »
Enfin, signalons une dernière subtilité de cet album sur les deux derniers tracks produits par FKi. Le collectif d’Atlanta nous propose un morceau soulful assez éloigné de son espace d’expression musicale habituel, au groove impeccable et qui nous renvoie presque 50 ans en arrière quand des géants comme Otis Redding ou Marvin Gaye caressaient nos âmes et nos oreilles. Comparaison osée? Goutez « Celebrate ». Et puis « Dreamer » qui clôt superbement l’effort avec une instrumentation très moderne (mélodie distillée au clavier et rolls bien estampillés Atlanta) et des chœurs qui apportent beaucoup d’énergie à ce joli morceau.
Finalement, si l’album comporte très peu de rap, comment l’écarter du mouvement Hip-Hop auquel il rend magnifiquement hommage en y intégrant chaque style musical dont ce courant se nourrit constamment ? Anderson .Paak livre un album de référence. D’abord de son point de vue parce qu’il y présente sa réalité, ensuite parce qu’il est le reflet de sa maturité artistique, enfin, parce que la production de cet album, dévouée au message comme rarement, est un modèle du genre. A la manière d’un Kendrick Lamar flamboyant l’an dernier, .Paak a su livrer un album mûr et empli d’audaces musicales. C’est parfois déroutant mais c’est toujours bon d’entendre un disque qui sonne bien, qui nous parle et qui, en plus, donne envie de bouger. Et ce sont nos oreilles et nos corps qui s’en trouvent ravis. L’année peut commencer. Tout le monde est servi.
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