Dire que le cru 2015 est de très bonne facture devient une lapalissade pour les amateurs de bon Hip-Hop que nous sommes tant les claques se sont succédées. Le temps se chargera évidemment de déterminer la place qu’aura cette année 2015, marquée par l’éclectisme des galettes balancées par nos amis rappeurs, producteurs et autres DJs venus d’horizons de plus en plus divers. Néanmoins, si certains artistes ont à juste titre récolté les lauriers à la hauteur de la qualité de leur travail, d’autres ont contribué, presque à l’abri des regards, à la bonne tenue de cette année « rapologique » sans la reconnaissance que leurs projets méritait. C’est pourquoi, chez The BackPackerz, nous vous proposons un petit focus sur 5 de ces projets qui sont injustement passés inaperçus en 2015.
Artiste : Lupe Fiasco
Label : Atlantic Records
Lupe Fiasco pourrait -si un tel prix existait- se voir décerner le titre honorifique de « rappeur le plus sous-estimé » de l’année 2015 qu’on y trouverait rien à en redire. C’est qu’on commençait doucement à craindre le pire quant au futur de la carrière du emcee originaire de Chicago. Celle-ci prenait, en effet, un virage des plus dangereux depuis cette maudite année 2011 qui l’aura d’abord vu sortir Laser – clairement son projet le moins abouti et massacré par la critique- dans des conditions houleuses, puisqu’il était ouvertement en conflit avec son label Atlantic Records. Lupe s’était ensuite perdu dans un obscur essai nommé Friends Of The People, samplant des artistes électro comme M83 ou Justice pour un résultat qui nous avait laissés sceptiques et qui, surtout, provoqua la foudre de ses fans de la première heure. C’est donc avec scepticisme que nous attendions ce nouvel album nommé Tetsuo & Youth au mois de janvier. Ayant repris la totale direction artistique de sa musique et sans véritable hit pour magnifier commercialement le tout, Lupe nous propose un album aux influences multiples sous le prisme des 4 saisons avec, à chaque intersaison un long morceau pour illustrer le tout (« Mural », « Prisoner 1&2″ , « Chopper »). Album complexe et décomplexé à la fois, Lupe Fiasco arrive ici à se réapproprier son univers si particulier tout en respectant les codes inhérents à un « bon album rap » aujourd’hui. Ses fans de la première heure seront sûrement satisfaits, c’est une réussite.
Artiste : Skyzoo
Label : First Generation Rich
Si Lupe Fiasco aurait peut-être mérité la distinction de « rappeur le plus sous-estimé » de l’année 2015, Gregory Skyler Taylor de son vrai nom aurait largement sa place dans la catégorie de ces artistes largement sous côtés dont la discographie frise pourtant le sans-faute. Music For My Friends (Lire notre chronique complète) est déjà le troisième opus de Skyzoo. Il fait suite au très personnel The Salvation, album dont l’écriture commença à prendre forme presque 18 ans avant sa sortie en 2009, puis à A Dream Deferred, toujours dans cette veine introspective qui caractérise ses lyrics. Sur Music For My Friends, ce lyrisme s’exprime à travers les yeux d’un enfant âgé de 13 ans cherchant sa place dans ce monde, luttant contre sa peur de grandir et réfléchissant sur les mœurs consécutives à son état d’enfant basculant vers l’adolescence. D’un haut niveau de storytelling, là aussi sans véritables hits, Skyzoo poursuit, avec ce projet, son chemin vers une carrière de qualité mais sans grand succès… Ce qui est dommage, car une légère prise de risque supplémentaire serait sûrement bénéfique pour la musique de Skyzoo, un artiste à découvrir d’urgence pour ceux passés à côté jusqu’à présent.
Artiste : Les X (ex X-Men)
Label : Addictive Music
La raison avec les désormais X, qu’on a récemment rencontrés (Lire notre interview), n’est même pas de savoir si leur EP, Modus Operandi, sorti en indépendant à l’automne 2015, est de qualité ou pas mais de souligner le risque pris par les deux rappeurs originaires de Ménilmontant de revenir mettre leur légende en péril, 17 longues années après leur unique et classique album Jeunes, Coupables et Libres. Les néophytes se demandent peut-être comment un groupe n’ayant sorti au final qu’un seul album, qui plus est au siècle dernier, bénéficie encore aujourd’hui d’une côte d’amour et d’un respect sans faille de la part des amateurs de rap français ? C’est que Cassidy et Ill ont à l’époque réalisé ce qui pouvait être défini comme le pont entre le Hip-Hop des années 90 et celui des années 2000. De leurs premiers freestyles chez Time Bomb jusqu’à la sortie de Jeunes, Coupables et Libres, il n’aura pas fallu des années pour que les X-Men traumatisent une génération d’auditeurs de rap français. Pourtant cet unique album sera toujours considéré comme un chef d’oeuvre inabouti, tant les dissensions avec leur label de l’époque Universal auront pourri son processus créatif et sa distribution, menant l’album à un échec commercial et précipitant la fin prématurée de leur collaboration. Cet EP de 8 titres est un préambule à un Best Of à paraître courant 2016 (qui devait initialement voir le jour fin 2015) suivi d’un album qui sera le premier LP des 2 rappeurs sur fond de « totale » liberté artistique. Modus Operandi est au final une bonne raison de patienter jusque-là, puisque les 2 compères n’ont apparemment rien perdu de leur verve, comme on peut le voir ci-dessous.
Artiste : Ali
Label : 45 Scientific
Désormais âgé de 40 ans, Ali poursuit son chemin à l’ombre de son ancien compère de Lunatic : Booba. Avec la sortie, en mars 2015, de son album Que La Paix Soit Sur Vous, Ali continue dans sa lancée de sortir un album tous les 5 ans après Chaos & Harmonie en 2005, puis Le Rassemblement en 2010. Sur ce projet assez court de 14 titres, on retrouve dès l’introduction « Lotus » ce qui caractérisait déjà l’univers d’Ali à l’époque de Mauvais Oeil, avec en prime la sagesse qu’un homme quadragénaire peut avoir. La quête de devenir un homme meilleur, sous le prisme de la religion et de l’amour dans sa globalité, sans tomber pour autant dans un discours racoleur et moralisateur dont certains de ses contemporains font coutume. Encore une fois sans tubes apparents et maîtrisant à la perfection son univers assez hors du temps, Ali continue sa route A l’Ombre Du Show Business et on a bien envie de croire qu’il est très bien ainsi.
Artiste : Bilal
Label : BBE Music
On quitte un peu la sphère rap au sens propre pour ceux qui se demandent encore à qui appartient cette voix suave présente au refrain du track « Institutionalized » issu de TPAB. Voici Bilal Sayeed Oliver et il est loin d’être un inconnu au sein de la communauté Soul des années 2000. In Another Life, avec sa pochette largement inspirée par l’oeuvre d’un Jean-Michel Basquiat, est déjà son cinquième album, produit par l’un des plus fervents protagonistes du renouveau Hip-Hop organique : Adrian Younge. Le Hip-Hop Maestro, fait ici se marier l’aspect mélodieux de ses instruments réarrangés pour l’occasion à la soul expérimentale de Bilal (il réfute l’appellation artiste Néo-Soul) pour un résultat au premier abord assez déroutant car assez éloigné des premiers essais du natif de Philadelphie. Lyricalement, In Another Life se situe au niveau du dernier D’Angelo : Black Messiah, en tant qu’oeuvre labellisée « Blaxploitation ». Un très bon album, dense et vintage qu’il est venu défendre l’été dernier sur la scène du New Morning, à Paris. Il nous avait par ailleurs gratifié d’un superbe clip pour « Satellites », qu’on vous invite à découvrir, ci-dessous.
Cette liste n’étant bien sûr pas exhaustive, d’autres projets nous ont également parlé au moment d’écrire cet article. On pense en premier lieu à Statik Selektah, qu’il serait réducteur de juger à travers le kitsch de la pochette de son septième projet dans lequel se trouve quelques pépites, dont « Another Level » en featuring avec Rapsody. On pense également à Dom Kennedy, album éponyme nommé dans la catégorie « Album de l’année » au sein de nos TPBZ Awards 2015. Impossible d’oublier les Phony PPL qui se sont illustrés avec la sortie en janvier dernier de Yesterday’s Tomorrow, album R&B faisant se multiplier les genres dans la veine de ce que faire un groupe comme The Internet. Du côté instrumental, on ne peut que vous conseiller l’écoute de Skence, qui a sorti au début du mois de décembre son premier véritable album, Home, dans la lignée de ce que pouvait faire un Flying Lo à ses débuts. Enfin, sorti lui aussi à la fin de l’année, l’EP de Bad Lucc, Breathe, compte également un featuring très reussi avec Rapsody, « Ski Mask ».
Et pour vous donner un peu plus envie d’aller jeter une oreille à ces projets, on vous a concocté une playlist regroupant un track de chaque album énoncé dans cet article.
Crédit Image : Genius
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