Les 10 meilleures mixtapes Rap US de 2016
Décidément, 2016 fut une belle année pour le hip-hop. Et le Mouvement se porte mieux que jamais, merci. Les styles et les moyens de s’exprimer n’ont jamais cessé de muter depuis sa création, et s’il est un format qui suit cette évolution, c’est bien celui de la mixtape. Du mix enregistré par un DJ originel aux albums parfois produits en studio professionnel de nos jours, il est clair que les choses ont changé. Sauf que ce format permet toujours aux artistes, comme avant, de promouvoir leur travail et leur talent, souvent à moindre frais et pour une large diffusion. Justement, cette année, nous avons voulu distinguer ceux qui ont eu cette audace et qui ont surtout su enthousiasmé nos oreilles. Coup de projecteur sur ces artistes qui ont sorti des mixtapes exceptionnelles en 2016.
Chance The Rapper – Coloring Book
Label : aucun | Sortie : 12 mai 2016
Alors, oui, Coloring Book est une mixtape gratuite, mais elle a sûrement eu plus d’impact que n’importe quel album cette année, d’où sa présence légitime dans cette sélection. Malgré l’absence totale de label affilié et une disponibilité seulement en streaming, Chance The Rapper a réussi à tutoyer le sommet des charts et même à faire bouger les critères de sélection des Grammy Awards quant aux mixtapes et au streaming-only. Rien que ça ! Il faut dire que la nouvelle star de Chicago a foutu une claque à toute l’industrie avec ce projet plein de liberté, audacieux et cohérent qui lui a permis de réussir là où son mentor Kanye West a échoué, à savoir délivrer un album de Gospel Rap à la hauteur des attentes. Grâce à l’aspect unique de Coloring Book, Chance a définitivement lancé sa carrière sur les rails du succès.
Jay Prince – Smile Good
Label : indépendant | Sortie : 21 octobre 2016
Si on ne peut pas dire que Jay Prince ait surpris grand monde en sortant un opus de qualité, il est toujours agréable de tomber sur une belle pièce. Avec ce Smile Good plein d’entrain et de rythme, le MC londonien (oui, on sait le titre dit « Rap US » mais si on ne peut plus tricher un peu…) qui oscille tant physiquement que musicalement entre Londres et LA, délivre un bel opus. En 8 titres, il propose autant d’univers que de clins d’œil aux artistes qui inspirent sa vocation et sa musique. En somme, chacun des tracks proposé peut constituer un banger mais insistons encore sur le puissant « Father, Father » ou l’invitation qu’il adresse à Michael Christmas quand ils se partagent le micro sur « Squad« . Voilà un projet qu’il aurait été criminel d’oublier et qui nous a surtout permis d’asseoir notre avis sur cet artiste doué qui ne devrait plus tarder à se faire connaitre d’un plus large public. En tous les cas, voici le troisième opus de sa (déjà) jolie discographie et on ne peut que vous recommander d’investir 28 minutes à découvrir cet opus. On est même prêts à parier que vous y retournerez. Et pour nos lecteurs parisiens, ne manquez pas le concert de Jay Prince au New Morning le vendredi 16 décembre. On vous fait gagner des places sur cet article.
Call Me LIKE – Songs Made While High
Label : indépendant | Sortie : 26 septembre 2016
Call Me LIKE… Difficile à porter comme nom d’artiste à l’ère des recherches sur le net où les keywords règnent en maîtres sur la logique de nommage des produits et des artistes. Composé de mots parmi les plus courants de la langue anglaise, cet artiste (LIKE) est l’un des membres du groupe Pac Div. Et il s’essaie depuis plusieurs années à des expérimentations solos. L’un des résultats est cette mixtape aussi riche que mal mastérisée mais qui a le mérite de ne pas mentir : Songs Made While High livre exactement la promesse qu’elle semble faire. De la musique, pour la musique, sous le coup de l’inspiration et pour le reste… Avec des apparitions de marque comme celle d’Anderson .Paak ou Kali Uchis et des beats d’inspiration boom bap mais basés sur des rythmiques plus downtempo, cet opus rafraichissant et bien fait offre un joli moment de hip-hop et se place clairement dans nos coups de cœur de l’année.
Rapsody – Crown
Label : indépendant | Sortie : 16 novembre 2016
Les mauvaises langues prédisaient le pire à Rapsody, après sa signature chez Roc Nation. La sortie de cette mixtape surprise de dix titres devrait faire définitivement taire ceux ci. Crown confirme tout le bien que l’on pense d’une des meilleures MCs féminines de sa génération. À la production, on retrouve les producteurs talentueux de la maison Jamla, son mentor 9th Wonder et Khrysis. Rapsody n’a rien perdu de sa verve au micro. Pointue comme un silex, la rappeuse de Caroline du Sud mord avec précision dans les sillons des beats soigneusement concoctés par l’équipe Jamla. L’ambiance générale tend plus vers les atmosphères feutrés de morceaux comme The Man extrait de son dernier album Beauty and The Beast. La liste des invités confirme cette tendance très Soul avec les présences de Raphaël Saadiq, Anderson .Paak ou la chanteuse Moonchild. L’utilisation de samples des sœurs Solange et Beyoncé Knowles appuie cette orientation musicale, et demeure la seule main mise de la famille Carter sur cet excellent projet, qui lance Rapsody sur la rampe du succès public tant attendu.
Logic – Bobby Tarantino
Label : aucun | Sortie : 1 juillet 2016
Après l’indispensable The Incredible True Story, que nous vous présentions dans une chronique en 2015, Logic se devait de nourrir ses fans de quelques apparitions en cette riche année 2016. Mieux que quelques featurings lâchés entre deux dates, le prodige du Maryland a tout bonnement fait don d’une mixtape entière à tous ceux qui le suivent. Bien en dessous du niveau extraordinaire de son précédent opus, Bobby Tarantino n’en ait pas moins un excellent projet. Avec « Flexicution« , premier extrait de la mixtape qui a été doté d’un joli visuel début août, le Rap God nous immerge dans un de ces impressionnants shows qui prouve encore une fois à quel point le gamin déchaîne les foules outre-atlantique. Sur « Wrist« , Logic invite son nouveau collègue de label Pusha T (la mixtape est une production co-signée Visionary Music Group et Def Jam) pour une belle partie de « braggadocio », discipline tant apprécié par nos amis rappeurs. Avec Bobby Tarantino, Logic enfonce le clou et prouve qu’il est définitivement un des plus purs produits de cette nouvelle génération de rappeurs : autodidacte, polyvalent et capable de se hisser au niveau des productions signées en major tout en conservant leur indépendance.
Denzel Curry – Imperial
Label : C9 | Sortie : 9 mars 2016
Parmi la cuvée 2016 des XXL Freshmen, c’est peu dire, si l’on exclue le désormais incontourable Anderson .Paak que Denzel Curry surnage. Le Floridien d’origine a confirmé tout le bien que l’on pouvait penser de lui avec la sortie à la fin du premier trimestre 2016 de son troisième projet, Imperial. Reprenant les ingrédients qui avaient fait son succès et lui avait parmi de se placer dans la sélection des espoirs du magazine XXL, il pose, avec cette mixtape, une nouvelle pierre à son édifice. En faisant apparaître Rick Ross et Joey Badass sur son projet, il insiste aussi sur le fait qu’il se fait petit à petit un nom et une reconnaissance dans le jeu. C’est d’autant plus encourageant que bien que cette mixtape soit sortie exclusivement sous format numérique, elle est aussi brandée sous le nom du prestigieux label Concord Jazz. Une belle année qui prend fin pour Curry et qui augure de belles choses pour 2017.
Boogie – Thirst 48 Part II
Label : indépendant | Sortie : 14 octobre 2016
Découvert en 2014 avec l’excellente mixtape Thirst 48, c’est avec une suite bien méritée de ce premier projet que Boogie est revenu sur le devant de la scène cet été. Un projet peut-être moins spontanée mais sans doute mieux produit, mieux mixé et qui témoigne d’une nouvelle maturité pour le rappeur de Compton. Bien porté par le banger « No Way » ou l’excellente ballade « Sunroof« , c’est avec une certaine impatience que nous attendions ce nouvel effort de Boogie et le moins qu’on puisse dire est que nous n’avons pas été déçu. En l’espace de 13 morceaux le kid de CPT fait montre de l’intégralité de sa palette artistique : flow versatile oscillant entre un style classique californien et une trap plus pêchue, passant même parfois par le chant sur certains refrains. Mais là où l’enfant du pays excelle c’est dans sa capacité à dépeindre la dure réalité des quartiers démunis de Compton, Watts ou encore South Central, comme il le prouve avec intensité dès les premières notes de l’album sur le crescendo piano « Still Thirsty ».
Curren$y & Alchemist – The Carrollton Heist
Label : indépendant | Sortie : 14 février 2016
Si on devait décrire l’année 2016 de Curren$y en un mot ce serait probablement « hyperactif« . Avec douze projets en douze mois, Spitta a su régaler ses fans. Parmi toutes ces mixtapes, la plus conséquente reste probablement The Carrollton Heist. Cinq ans après leur première collaboration Covert Coup, Curren$y et Alchemist remettent le couvert en proposant une mixtape qui aurait tout aussi bien pu s’appeler « Rap, Cars & Weed« . Si Curren$y n’a plus rien à prouver dans l’industrie musicale, cela ne l’empêche pas de continuer à produire un rap de qualité, le tout magnifié par les instrumentaux toujours plus incroyables d’ALC. Dans votre canapé, votre voiture ou même en marchant dans la rue, laissez-vous porter par les chilly vibes de ce projet et savourez l’instant.
Smoke DZA – George Kush Da Button: Dont Pass Trump The Blunt
Label : aucun l Sortie : 1er juin 2016
Même s’il vient de sortir son dernier LP (Don’t Smoke Rock) en collaboration avec Pete Rock (qui nous en avait déjà parlé il y a un an de cela), il faut souligner que Smoke DZA a eu une année productive. En proposant le 1er juin dernier cette mixtape surprise « George Kush Da Button: Dont Pass Trump The Blunt », le membre du Smokers Club a frappé fort. D’abord parce que les productions sont assurées par des petits nouveaux de New York (183rd ou Crystal Caines du collectif The Understudy) épaulés par des pointures comme The Alchemist ou Pete Rock et qu’on retrouve même un essai de Mac Miller dont on a su au cours de l’année que Larry Fisherman était son avatar de producteur… Ensuite parce que ceux qui partagent le mic avec Smoke DZA ont également un joli pedigree. Jugez plutôt : A$AP Rocky, Joey Bada$$, Action Bronson ou Domo Genesis pour ne citer qu’eux. Bref, du bon monde sur de beaux morceaux produits avec talent. Vous voyez venir la qualité? Elle y est, cet opus est clairement un essai réussi et il faut avouer que ce genre de surprises, on en souhaite plus souvent. Si les textes n’élèvent pas forcément le débat politique (la mixtape est sortie avant la fin des primaires aux US), ils ont au moins le mérite d’égailler nos tympans et quand on connait le résultat, c’est bien tout ce qu’il nous restera.
Kaytranada – 0,001%
Label : indépendant | Sortie : 22 septembre 2016
2016 aura été l’année de la consécration pour le prometteur producteur canadien. Un premier album studio abouti avec des invités de renom comme Vic Mensa, Anderson .Paak ou Craig David, qui obtient un succès public et critique mérité. D’excellentes productions réalisées pour BadBadnotgood, Reva De Vito ou Govales. En guise de cadeau de rentrée, Kaytranada nous avait offert plus d’une heure trente d’instrumentaux sur une mixtape, complétant les 99,9 % de son album. 0,001% comporte uniquement des compositions originales issues de la banque de sons du nouveau petit génie de la console. Si la qualité du mix demeure brut de décoffrage, celui-ci donne un côté authentique à cette cinquantaine de courts extraits (en moyenne de 2 minutes) assemblés les uns et les autres par des scratches et autres introductions de l’artiste. On retrouve le côté groovy de 99,9 % comme des compos plus boom bap. 0,001% figure ainsi comme une palette très large de couleurs d’un producteur, qui risque de marquer ces prochaines décennies de son empreinte.
Mentions honorables : Telefone de NoName, 1992 de Princess Nokia, Good Food de ScienZe, Hotel Paranoia de Jazz Cartier, iiiDrops de Joey Purp, DYSTOPIA d’Emanon (Aloe Blacc & Exile).
On vous laisse ajouter vos mixtapes favorites de cette cuvée 2016 en commentaires de cet article.