BACKPACKERZ

FUDGE, c’est sous cet alias à double sens (puisqu’il désigne à la fois un caramel mou mais aussi trafiquer, manipuler) que Prefuse 73 et Michael Christmas ont choisi de nous offrir le fruit de leur pétillante première collaboration qui prend la forme d’un très bel album de 15 titres, intitulé Lady Parts.

Prenez d’un côté, un des producteurs les plus innovants de la scène beat des années 2000, signé chez un label référence en matière de musique électronique (WARP) et dont on attendait le retour depuis près de neuf ans. De l’autre côté, un jeune rappeur de vingt-deux ans, en pleine ascension et qui a réussi à convaincre la critique et ses pairs (il tourne en ce moment même avec Logic et Mac Miller) en l’espace de quelques mixtapes et un album. Une rencontre, certes improbables, mais néanmoins plus qu’alléchante pour tout auditeur à l’oreille ouverte à la nouveauté.

De l’ouverture, il en a sûrement fallu au jeune Christmas, biberonné au Dipset et Kanye West, pour parvenir à poser ses 16 sur les productions pour le moins alambiquée de Prefuse 73. Certes, l’attrait du producteur d’Atlanta pour le Hip-Hop n’est plus à présenter, lui qui a collaborer avec les plus grands, de Ghostface à Mos Def, en passant pour MF Doom. Pour autant, Scott Herren (de son vrai nom) a toujours eu pour ambition d’emmener la production Hip-Hop au delà de ses frontières traditionnelles (écoutez son classique « Perverted Undertones » ci-dessous pour vous en convaincre). Un défi qu’on est heureux de voir toujours d’actualité sur ce nouveau projet.

Dans une très bonne interview pour nos confrères américain PassionWeiss, le jeune rappeur de Boston raconte sa grande surprise lorsque qu’il a découvert les « beats dégénérés » que lui présentait Prefuse 73 lors de leurs sessions d’enregistrement au studio Green Point, à Brooklyn. Enregistré au cours de l’été 2015, Prefuse était alors à la recherche d’un jeune rappeur talentueux pour piocher dans la collection de beats qu’il avait concocté ces dernières années. Épaté par l’excellent What A Weird Day (que nous vous présentions dans l’article Michael Christmas, Noël avant l’heure), Prefuse explique avoir invité le rappeur de Boston directement en studio où Michael Christmas l’avait énormément impressionné en écrivant et rappant ses textes directement sur ses instrus.

Après des mois de mix à la précision chirurgicale – le perfectionnisme de Prefuse 73 étant de notoriété publique – l’album est disponible dès aujourd’hui même et depuis quelques semaines pour les privilégiés que nous sommes. Surprenant à la première approche, Lady Part se révèle un excellent projet au fil des écoutes. Annoncé par 3 extraits, on vous recommande tout particulièrement le « These Saturday » qui voit le jeune Christmas s’illustrer dans un tout nouveau registre (chanté et vocodé) sur une terrible production évolutive aux sonorités glitch dont seul Prefuse a le secret.

Si certains morceaux vous feront probablement zapper (pas d’innovation sans prise de risque !), vous trouverez sans aucun doute de très jolies perles sur cet album qui, à défaut d’avoir un fil conducteur très évident, propose de belles tranches de story-telling bien délirantes à l’image du Michael Christmas que nous avions découvert sur la mixtape Is This Art.

En somme, une belle collaboration qui prouve une fois de plus que le rapprochement des genres donne naissance aux plus beaux projets et permettent de montrer que la jeune génération, lorsqu’elle est contrainte à sortir de sa zone de confort, n’a rien à envier aux plus grands rappeurs des années 90… Tick Tick !

Ecouter Lady Part de Fudge

Lady Part est disponible en digital sur Spotify et Apple Music  et en physique sur le site du label Lex Records.

Fudge – Lady Part cover