IAMDDB, la nouvelle perle R&B de Manchester

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IAMDDB, la nouvelle perle R&B de Manchester

La jeune chanteuse de Manchester, qui a su s’imposer en quelques mois comme l’un des talents émergents de la scène alternative R&B anglaise, sort les griffes et succombe aux sirènes de la trap avec son dernier clip, « Shade ». En une petite année, les six lettres IAMDDB se sont doucement faufilées vers des playlists de plus en plus nombreuses, entre jazz et nu-soul. A la surprise générale, elle annonce un virage à 180° en lâchant la bombe Hoodrich Vol.3, comme une déclaration d’intention. Qui es tu, IAMDDB ?

Wavy Baby

Si le genre appelé « alternative R&B », en pleine ébullition, se réinvente aussi outre-manche – par la voix céleste de Sampha jusqu’aux vibes électriques de Jorja Smith, déjà muse de Drake – l’anglaise IAMDDB décrit plutôt son style comme de l’urban jazz et se verrait bien travailler avec Future ou John Legend. Ces aspirations prennent forme en 2015 : jeune chanteuse de 19 ans, elle décide de se consacrer sérieusement à la musique au retour d’un voyage en Angola avec son père, musicien. Ils y jouent face au président du pays lors du National Jazz Festival. Réinstallée en Angleterre, Diana Debrito devient IAMDDB et poste sur Soundcloud une première prod timide, « W&D ». Comme beaucoup de jeunes musiciens à l’ère d’internet, elle s’oriente vers la piraterie en choisissant avec soin l’artiste dont elle volera un beat : en février 2016, elle pose sa voix sur une production signée Flying Lotus et sort le titre « JAZB ».

Ne pas se poser trop de question, produire, encore et encore. Depuis son appartement du quartier de Chorlton, qu’elle partage avec son agent et amie rencontrée sur les bancs du Music College de Manchester, IAMDDB enchaîne quelques productions jusqu’à sortir son premier clip, « Leaned Out », en collaboration avec Inka. Elle se présente par ces mots : « I cannot and won’t conform, I’ll do it all on my own ». Un clip aux allures d’ode au keep it real est produit par ses soins, comme tous ceux qui vont suivre.

En décembre 2016, son premier EP (dont nous vous parlions récemment) le très justement nommé WAEVEYBBY Volume 1 voit le jour. Premier projet toujours timide, mais l’oreille se fait vite attraper par une vibe nu-soul, le chant se transforme d’un mot à l’autre en un flow à la fine frontière du rap, sur des productions électroniques au groove infaillible. On imagine facilement IAMDDB gravitant autour des planètes Lauryn Hill ou Erykah Badu. La deuxième moitié de l’EP bascule en se parant de grooves plus désarticulés, évoquant des J Dilla ou Flying Lotus. Parmi ses influences connues, on retrouve bien sur des noms résolument jazz et soul, comme Liane La Havas ou Nat King Cole. Ce sont pourtant des vibes résolument hip-hop qui viennent nous titiller, et commencent à évoquer ses véritables intentions.

Volume 2

Mai 2017. Pendant les cinq mois écoulés depuis la sortie de son premier projet, IAMDDB a pris le temps d’y associer deux clips pour les titres « Ur Highness » et « Vibe », a collaboré avec le
producteur Drum&Bass Lenzman sur le titre « On My Mind », et se prépare à lancer la seconde partie des hostilités. Vibe Volume 2, son deuxième EP, lancé le 7 mai dernier, confirme une tendance downtempo décalé aux reflets jazzy. Toujours dans la même lignée, elle confirme aussi un certain goût pour les titres courts, ayant fait les grandes heures des débuts de la soul. En seize minutes, c’est une deuxième facette plus assurée, un peu moins sage, que l’on découvre à travers six titres aux productions soignées, et aux lyrics acérés qu’elle manie comme une main de fer dans un gant de velours.

Bad bitch, no underwear

Jusqu’ici tout va bien. Ses deux EP reçoivent un accueil élogieux, ses clips flirtent avec les 500 000 vues (jusqu’à deux millions pour « Leaned Out »), elle est repérée par le programme Four to the Floor sur la chaine Channel 4, série destinée à promouvoir les talents émergents d’Angleterre. Les titres « Teardrops » et « Leaned Out » sont diffusés sur la radio BBC. On ignorait encore que ces deux projets faisaient peut-être parti d’un tout, d’une trilogie. Le 24 août dernier, IAMDDB va, comme un twist final, troubler ses premiers fans en lâchant un nouveau titre, « Shade ». Girls gang cagoulées dans voiture fumante, black lips, créoles, défonce et claquettes fourrure, c’est bien avec un gros banger trap qu’elle a décidé de boucler la boucle de ses présentations au monde.

Une semaine plus tard, son troisième et dernier EP, Hoodrich Volume 3, démontre qu’il faut se méfier de l’eau qui dort : le tranquille urban jazz est délaissé pour des productions plus sombres et tranchantes, à travers des titres comme « Conjuring », « Running » ou encore « Shade ». Sous la façade brutale d’une production trap que l’on pourrait facilement croire légèrement tournée vers la culture du clic, elle réussit brillamment le pari d’y injecter toute la soul dont elle est capable. Sur la deuxième partie de l’EP, on piquerait bien à Bryson Tyler le nom de son album Soultrap tant il décrit bien la douceur brumeuse qui découle des sons et de la voix d’IAMDDB. Trois EPs pour une personnalité multiple. Ceux s’estimant déçus de ce revers n’ont peut-être pas encore aperçu le gigantesque éventail sur lequel elle est en train de construire son terrain de jeu.

IAMDDB – Hoodrich Vol. 3