Brian Fresco, le dernier membre de SaveMoney prêt à exploser
Dans notre sélection des 10 rappeurs qui font le renouveau de Chicago, Brian Allen aka Brian Fresco, auteur des mixtapes Mafioso (2013) et Casanova (2016), également membre du collectif SaveMoney aux côtés de Vic Mensa, Chance The Rapper et Joey Purp, est un bourgeon en attente d’éclosion. Le genre de mecs que l’on qualifierait de « most underrated » de sa catégorie. Car à n’en pas douter, sa reconnaissance a bien été achoppée par la fulgurance des succès combinés de Vic et de Chance, gamins prometteurs de sa génération. Quid de Brian Fresco, ce rappeur caméléon à qui l’on prédit une ascension certaine ?
SaveMoney, ou comment s’affranchir du collectif
Comme point de départ, il y a le collectif de Chicago SaveMoney fondé par Vic Mensa, et composé d’une dizaine de membres. A ses débuts, SaveMoney se définit comme une famille à part entière, et un laboratoire expérimental pour les talents rap en devenir ou bien les artistes-graffeurs de la ville. Car pour tous, il s’agit d’une arrière-cour vibrant au rythme des sessions freestyle et beatbox, portées par un esprit résolument fraternel et fédérateur. Si beaucoup d’artistes se construisent une culture musicale en solo à partir d’écoutes, de digging et défrichage dans un grenier ou chez le disquaire, celle de Brian Fresco se fonde davantage sur une expérience collective.
Parmi les pierres angulaires de sa culture musicale, il est avant tout rappeur ; mais on lui connaît une dépendance au R&B, insufflée par ses parents, ou encore des affinités avec les sons jamaïcains sous l’influence de sa copine, voire aussi une attraction vers la soul. Mais lorsque Brian Fresco est interrogé sur ses sources d’inspiration – et le possible déclic à l’origine de sa carrière – il déclare que c’est l’album The Eminem Show (2002), qui a été pour lui ni plus ni moins que le début de l’aventure.
Brian Fresco, un rappeur sous influences
Sur Casanova, Brian Fresco dévoile 18 titres, dont l’esprit suffit à comprendre que c’est un caméléon, multi-genre, qui a su se créer une identité artistique propre. En attestent la polyvalence des genres et les influences convoquées sur cette mixtape. Parmi la palette de morceaux, certains ont fait débat. La critique ? Des similitudes « troublantes » avec certains titres de Drake, à l’image de « Higher » (feat. Chance The Rapper, Blue Hawaii), comparé à « One Dance » pour ses inspirations dancehall. Pourtant, Brian Fresco se défend de tout suivisme ou tentative de « faire du Drake ». Pour être honnête, il est vrai que le rappeur de 24 ans semble être parfois inspiré par les partis pris de Drizzy, comme sur le morceau 100% smooth « Call », dont le sample de Jon B « Calling On You » est le même que celui de « Cameras » sur l’album Take Care. Faut-il y voir le fruit du hasard ou peut-on penser que Fresco est atteint d’une Drakemania partielle ?
Brian Fresco est, à n’en pas douter, l’enfant de sa génération, pétri de références musicales rap, funk, soul, passées comme présentes. Sur « Fam », un titre personnel dédicacé à ses proches, les rythmes et mélodies sont très proches de celles de Kanye West, à commencer par le titre « Hey Mama » (Late Registration) ou encore « Family Business » (The College Dropout). De même, il puise également dans des références soul et disco sur le titre « Miracle », qui sample du célébrissime « I Believe In Miracles » des Jackson Sisters, en bénéficiant de la patte talentueuse du producteur Mano, à l’origine du tube « The Hills » de The Weeknd.
Du Mafioso au Casanova, le rappeur est un conteur
Jusqu’à présent, Fresco s’est montré accro au storytelling et se plaît à raconter et mettre en scène des histoires jusque dans ses clips, en jouant parfois de certains codes cinématographiques. Il n’est donc pas surprenant qu’il ait choisi un titre romanesque pour cet album, et qu’il se soit payé le luxe d’un recours à l’un des plus grands mythes littéraires qui soit : Casanova. Son précédent album Mafioso, dont l’univers était plus sombre, trouvait un écho et une signification par rapport aux univers chéris par Brian, notamment les films de gangsters tels que The Goodfellas, ou encore Scarface pour lesquels il semble vouer un véritable culte. Mais pour autant, ce milieu semble à la fois remporter sa fascination et son dégoût, rappelant sans doute à sa mémoire son South Chicago natal, où régnait sans pitié la loi du clan et de la rue, et où seuls les hustlers en tout genre faisaient la loi.
Aujourd’hui, notre gros dur serait donc devenu un homme de débauche, d’outrance et de séduction, c’est du moins ce qu’il serait tenté de faire croire à qui voudra l’entendre, alors que l’album est composé de pépites pour amoureux transis à l’image de « Bae », « Honey » ou encore « Dandelion », morceaux sur lesquels Brian Fresco serait plus proche du Teddy Bear au gros cœur que du Casanova.
En bref, Brian Fresco semble avoir un boulevard devant lui et a su tracer son sillon. Avec Mafioso et Casanova, il réalise un doublé de haute voltige et confirme qu’il a su s’affranchir et s’émanciper de son collectif SaveMoney sans perdre de sa superbe. Pour la suite, on croise les doigts, et on espérerait presque des featurings encore plus surprenants et éclectiques, allant au-delà des seuls rappeurs de Chicago.
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