Heavy Rotation #36 – Organic Edition
Pour cette 36ème Heavy Rotation, j’ai décidé de mettre en lumière une tendance, à mon sens, forte du son Hip-Hop actuel: le regain d’intérêt des rappeurs pour de véritables instruments.
Soyons bien clairs, depuis « Rappers Delight » en 1979, il y a toujours eu des rappeurs pour poser sur des compositions jouées par des musiciens. Cependant, cette pratique est toujours restée minoritaire et on a souvent réduit ces groupes à l’étiquette un peu bâtarde de « rap alternatif »; à l’image de The Roots – qui continuent à distiller un Hip-Hop des plus qualitatifs avec une affolante longévité (11 albums depuis 1993 !).
Le point de départ de cette tendance – qui reste aujourd’hui sans nom – est pour moi Elmatic, le sublime projet du rappeur Elzhi, qui en 2011, choque tous les Hip-Hop heads de la planète, (moi, le premier) en enregistrant sa propre version du sacro-saint Illmatic, rejoué par les musiciens du groupe Will Sessions. Le projet demande de sacrées cojones mais s’avère être un des meilleurs albums de l’année 2011. Mon extrait préféré, « Halftime« , ouvre notre Heavy Rotation du jour.
A peine un an plus tard, une seconde collaboration entre un emcee (Tyler The Creator) et un groupe de musiciens (Badbadnotgood) me met littéralement sur le cul avec une reprise de « Seven » à tomber par terre.
Le troisième élément déclencheur de cette déferlante de sonorités organiques dans le rap actuel est l’arrivée dans le game d’Adrian Younge. Producteur à la démarche assez atypique puisque qu’il joue ses propres samples avant de les passer au sampler pour un rendu au plus proche d’un son joué. Celui qui opérait dans l’ombre il y a encore quelques années a vu sa côte grimper lorsque Jay-Z a repris quasi tel-quel son titre « Sirens » pour son tube « Picasso Baby« .
Dès lors, tout le monde s’arrache le multi-instrumentiste californien et ses productions organiques: de Souls Of Mischiefs, dont il a produit le dernier album There is Only Now dans son intégralité, à PRhyme, le duo récemment constitué par sa majesté DJ Premier et Royce Da 5’9 » (lire la chronique de l’album PRhyme).
2014 a clairement marqué la tendance avec les albums de Black Milk If There’s a Hell Below et People of Today des 1978ers qui délaissent tous deux également les drums boombap pour de vraies sons de batteries et de basses. On aura également vu ces dernières années plusieurs mastodontes du rap US faire leurs concerts avec un band: de Nas à Common au Bataclan en Novembre dernier en passant par De La Soul.
Il y a fort à parier que 2015 verra ce style de productions encore se développer étant donné les succès rencontrés par les projets précédemment cités (lire les TBPZ Awardz pour s’en convaincre). On attend d’ailleurs avec impatience la future collaboration entre Ghostface Killah et Badbadnotgood dont le premier extrait « Ray Gun Ft. Doom » ravira, je pense, les plus pointus d’entre-vous.
Vous êtes désormais prévenus, le rap en 2015, c’est n’est plus que « 1 mic and 2 turntables » 🙂