Le deuil a une dimension universelle. Il est pareil à une odyssée mouvementée, aux remous pénibles et aux tempêtes meurtrières, qui se soldent bien souvent dans l’immobilisme et la morosité. Toutefois, le deuil n’a de cesse d’inspirer les artistes. Il a même le pouvoir de les faire renaître.
En habitué de la perfusion et des longs couloirs aseptisés qui ne mènent nulle part, Voquab a croisé plusieurs fois le fer avec la faucheuse. Chaque fois, pour lui tordre le cou, il s’arme d’une feuille blanche et de sa plume scalpel.
Le moteur de cet album est un deuil lié à la perte d’un de ses proches. Il l’évoque d’emblée sur « Noir et Vert (Déni) », morceau court et introductif, qui initie son voyage depuis le cimetière où repose désormais son père.
Le fruit de ce marbre
Ton fils devient un artiste, tu peux être fier
J’pleure plus, j’rappe
Depuis le jour où j’ai survécu à la civière
— Noir et Vert (Déni)
Les vingt-cinq minutes du projet sont mises en musique par Eazy Dew, acolyte de Josman depuis ses débuts, et Lucci’, qui a produit le dernier album de Georgio. La prise de son et le mixage ont quant à eux été confiés à Sheldon, grand conteur d’histoires et pilier de la 75ème Session.
Huit titres, qui reprennent une à une les sept étapes du deuil, jusqu’à une huitième, que Voquab s’arroge le droit d’ajouter : la paix. Chaque titre est pensé en fonction de l’étape, et à mesure que se déroule ce voyage, l’atmosphère évolue de l’ombre vers la lumière.
Entre huit-cent-huit trap et synthés mélancoliques, l’ambiance est d’abord sombre et nerveuse. Cependant, l’expressivité et la mélodie du phrasé, couplées à un écriture vivante et sarcastique, font entrer la lumière dans le projet.
Colère, peur ou encore tristesse : les émotions sont accueillies et soigneusement disséquées. Elles se terrent dans les basses oppressantes, louvoient entre les mélodies soignées des refrains et éructent dans l’autotune, à mesure que l’encre s’écoule sur le papier.
À la fois introspectif et universel, Veine est aussi un rappel que la moindre réaction à l’échelle de l’individu est toujours conditionnée par le monde qui l’entoure.
Souvent écrits à la première personne, à l’instar du titre éponyme « Veine (Tristesse) » ou « Tourne pas rond (Marchandage) », les morceaux dévoilent la psyché de Voquab. Les anecdotes intimes cohabitent avec des salves lyriques sur l’état de notre société. En témoigne le morceau le plus véhément de l’album : « Envie d’autre chose (Colère) ».
« Nique les ordres » et « les normes » : dès les premiers mots du morceau, Voquab distribue les claques sur une instrumentale sous haute tension.
Fais pas comme eux
C’est pas ça un homme
Dis-lui qu’elle est belle
Lui dis pas qu’elle est bonne
— Un homme (Peur)
« Un Homme (Peur) », titre consacré aux violences conjugales, qu’il dépeint avec des mots issus de souvenirs personnels, manifeste son engagement féministe de longue date. Voquab y prône une éducation sensible, loin des clichés de la masculinité. « Fais pas comme eux », conseille-t-il aux jeunes coqs, en même temps qu’à lui-même.
Il est clair que ça ne « Tourne pas rond » ici-bas et comme l’a dit Jiddu Krishnamurti : « Ce n’est pas un signe de bonne santé mentale que d’être bien adapté à une société malade ». Voquab en a fait un morceau, clippé par Willy Guittard. Une peinture à l’encre noire de moins de trois minutes, entre sarcasme et désillusion.
Le morceau le plus poignant de l’album, « Veine (Tristesse) », est une lettre adressée à son père. Flottant sur les riffs distants et plaintifs d’une guitare nappée de spleen, Voquab offre une prestation sincère et forte.
J’ai mis tes disques en shuffle
Trié tes vieux bouquins
Avachi entre deux fauteuils
Regroupé tes plus belles chansons
(…)
Ouvert ton journal
Compris tes secrets et tes peurs
Brûlé tout notre passé
Dans un feu d’joie près du tilleul
— Veine (Tristesse)
Les errances de l’artiste trouvent leur point d’orgue sur le planant « Les heures filent (Quête de Sens) ». Morceau pivot de l’album, sur lequel on imagine volontiers Voquab et ses lunettes bleues rouler « pied au plancher » sur le périphérique par une douce, mais néanmoins nostalgique, nuit d’été.
Tandis que l’on entre dans le dernier tiers du projet, le lâcher-prise et la légèreté se frayent naturellement une place dans les instrumentales, ainsi que dans les textes. Voquab exhorte à arrêter de se faire un « Sang d’encre » et à garder « les yeux ouverts ». Lâcher le rétro pour s’émerveiller du paysage qui se déploie devant soi semble être l’antidote à nos peines.
L’odyssée de Voquab se termine sur une plage au Mexique lors du fameux « Jour des morts ». Dans le titre du même nom, il décrit une culture distribuant « des fleurs et des sourires », qui célèbre ses morts dans la joie et la sérénité. Après l’acceptation vient la paix, et avec, on l’espère, de nouveaux projets.
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