Si vous nous suivez un peu (on vous remercie si tel est le cas !), vous savez que parmi les producteurs que l’on suit de particulièrement près, il y a Apollo Brown. On est allé le voir en concert avec Ugly Heroes, on écoute ses albums, on le place dans nos classements, on relaie son actu, etc. On l’aime vraiment bien, il fait partie de cette scène de Detroit très vivante et ses beats nous cassent régulièrement la nuque. Mais, malgré tout, on ne peut pas s’empêcher de remarquer qu’il ne prend pas beaucoup de risques artistiquement. On s’était d’ailleurs permis il y a quelque temps de lui écrire une lettre ouverte, en pointant déjà ce petit travers. Mais depuis, rien n’a vraiment changé. Il suffit pour s’en convaincre d’écouter son récent projet collaboratif avec Rapper Big Pooh, Words Paint Pictures. Erik Stephens – son vrai nom – a clairement trouvé une recette (même s’il s’en défend dans l’interview qu’il nous avait accordé) qui lui plaît et qui fonctionne, et la décline à l’infini. Alors, si vous êtes apprenti beatmaker et que vous souhaitez créer un beat à la sauce Apollo, voici les étapes à suivre.
– Un ordinateur
– Un logiciel de beatmaking
– Une banque de drums
– Une platine vinyle
– Un vinyle
Aaaah le vinyle…cet objet si précieux, si esthétique, si symbolique de l’âge d’or de la musique et qui revient en force depuis le takeover mondial des hipsters. Comme beaucoup d’amoureux de musique et donc de producteurs hip-hop, AB aime le vinyle, le chérit même, passe des heures à digger chez les disquaires de Detroit, et tient absolument à nous le faire savoir. Du coup, il considère comme nécessaire de commencer la quasi-totalité de ses morceaux par ce doux bruit de craquement, laissant l’auditeur imaginer le membre des Ugly Heroes poser délicatement le diamant de sa platine sur le disque fragile. Tenez, voici ci-dessous 30 minutes de craquement de vinyle. Si vous ne trouvez pas votre bonheur là-dedans, on ne comprend plus.
Une fois que vous avez prouvé que vous n’utilisiez QUE des vinyles et non pas de vulgaires CD, il s’agit à présent de démontrer votre art du digging et, par extension, du sampling. Pour cela, plongez dans votre collection (ou dans celle de vos parents) pour sortir le single le plus soulfoul possible, années 50-60 de préférence. C’est bon ? Sélectionnez un passage (2 mesures) dont les paroles sont relativement « profondes » et jouez-le tel quel, ou bien légèrement pitché pour s’adapter au tempo de votre beat. L’idée est de conserver l’essence globale du sample. Ci-dessous, voici un exemple avec le morceau « You Don’t Have To Worry » du duo Doris & Kelley, samplé par Apollo sur le récent « Stop » avec Rapper Big Pooh. Et voilà, avec le craquement de vinyle + un sample original, vous tenez votre intro.
Le calme avant la tempête. C’est probablement l’adage qui guide Apollo Brown lorsqu’il beatmake. En effet, si les intros d’Apollo Brown sont souvent douces, soul et mélodieuses, c’est pour mieux contraster avec l’arrivée brutale du drums pattern. Et s’il y a bien un élément sur lequel on ne peut pas test AB, c’est bien sur le choix et la pose de la batterie. Des cassages de nuques assurés à chaque fois, une puissance incroyable qui vous fait presque oublier les autres parties du beat (ce qui n’est pas forcément positif). Une sorte de boom-bap dopé aux stéroïdes capable de faire bouger la tête d’un mec plongé dans le coma. Pour en revenir à notre tuto, étirez donc la dernière note de votre sample d’intro ou bien laissez un petit silence (pour plus de suspense) et balancez brutalement les drums les plus lourdes que vous possédez dans votre catalogue pour un effet « drop the beat » des plus réussis. La réaction de votre audience doit alors être la suivante :
Un sample, on le sait, ça peut coûter cher. Pour le clearer, un label peut parfois lâcher plusieurs dizaines de milliers de dollars, alors à ce prix-là, pas question de gâcher. Après avoir utiliser votre sample « tel quel » en guise d’intro, il est maintenant temps de le chopper, i.e. de le découper en petits morceaux tel un Philippe Etchebest transformant une courgette en brunoise. Reprenez donc votre sample d’origine et sélectionnez plusieurs petites parties (vocales principalement) que vous collerez sur vos drums. Ces sélections peuvent être des phrases ou mots intelligibles, mais les « oh » et « hey » et « yeah » font aussi bien le taf. Un moyen optimal de recycler votre sample, de l’exploiter à fond, bref, de ne rien jeter. Apollo Brown est un peu un écolo du beatmaking.
Et voilà, votre beat est prêt ! On récapitule rapidement: craquement du vinyle, sample brut, arrivée brutale du drum beat puis recyclage du sample d’intro. Et si vous doutez de vos capacités, rappelez-vous toujours qu’Apollo Brown crée parfois ses beats avec Windows XP et…Audacity. True story. La preuve ci-dessous :
Pour appuyer notre démonstration, voici une playlist de 10 titres produits par AB qui utilisent exactement la recette décrite plus haut. Et qu’on ne se trompe pas sur nos intentions: ses beats, même s’ils se ressemblent, TUENT.
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Bon décryptage, j'approuve! Après, de la simplicité nait la complexité, il faut un feeling et une oreille particulière pour créer un beat, même le plus simple.
J'aurais bien rajouter à la tracklist "pain is gone" feat murs, très parlant selon moi, l'un de mes beats préférés.
Sinon, vous avez des news de son projet prévu initialement pour septembre?
Peace!
Nouvel album annoncé hier soir! Vu les feats, ça s'annonce lourd!