Token : « Pour moi, être sur scène est une évidence »
Dans le cadre de sa tournée européenne Have You Seen Him Tour, Token était récemment en concert à Paris. Cette date, organisée par Excuse My French, a vu pour la première fois – et sans doute pas la dernière – le jeune emcee originaire du Massachusetts offrir ses dernières bribes de voix pour assurer un show qui restera comme intense et énergique à souhait. Nous avons eu l’occasion d’échanger avec lui quelques instants après la fin de son concert. Et en bonus, son Rap Scan est à découvrir en vidéo ci-dessus.
Un peu plus d’une heure avant l’ouverture des portes de la Bellevilloise ce samedi soir. Si l’ambiance semble détendue dans les couloirs, (ce n’est pas comme si l’équipe organisait des soirées depuis 10 ans) le clou de la soirée n’a pourtant pas encore pointé le bout de son nez. « Il est bloqué sur l’autoroute » nous indique-t-on. Il faut dire que le jeune Token était à Francfort la veille et venait d’enchaîner ce que l’on pourrait appeler plus communément « la semaine de la mort », avec une date à Londres, quatre en Allemagne, pour finalement conclure ce soir-là, dans la ville lumière.
Enfin, le voici qui débarque. Tout juste une quinzaine de minutes de balances et presque autant pour se poser ; les portes s’ouvrent déjà à un public impatient venu pour se cramper les cervicales. Les invités de la première partie DJ Netik, Le Bon Nob, Fadah et Yous MC assurent un chauffage en règle de la salle. Puis vers 21 heures, le phénomène débarque. Entre performances nourries, anecdotes cocasses (saviez-vous que le proviseur de son collège flippait tellement du jeune homme à une époque, qu’il avait embauché un détective privé pour le suivre ?), et échanges enlevés avec le public, Token donne sans compter, régale son auditoire et signe un excellent concert de près d’une heure, pour lequel il finira de donner sa voix pour conclure cette tournée comme elle avait commencé : sur les chapeaux de roue.
TBPZ : Plus d’un an après la sortie de ta première mixtape Eraser Shavings, tu as sorti des sons comme « Patty Cake », « Dirty Flesh » ou plus récemment « Little Boy » qui sonnent vraiment trap. Est-ce ta prochaine direction ?
Token : Je fais tout ce que mon cœur me dit de faire, donc je ne fais pas si je ne le sens pas. Mon cœur n’est pas dans la trap. Mon cœur n’est pas dans le boombap. Je fais ce qui me semble juste.
Tu es plutôt actif dernièrement musicalement, ne serais-tu pas en train de nous préparer un album ?
Ouais, j’ai plein de nouveaux sons et de nouvelles choses en perspective. Mais j’en suis encore au stade de consolider ce que je veux transmettre comme message et d’unifier tout ça. Donc l’album n’est pas pour tout de suite.
« Exception » est un morceau fort et poignant sur le harcèlement à l’école. Globalement le message est : celui qui laisse faire et ne fait rien est aussi responsable que celui qui harcèle. Pourquoi avoir choisi de faire ce morceau ? Est-ce inspiré de quelque chose que tu as vu ou vécu dans ta vie ?
C’est inspiré par pas mal de choses. Ce sont des événements auxquels j’ai assisté dans mon école, à part la scène finale évidemment. J’ai eu beaucoup de moments où je me disais « merde, j’aurais dû faire quelque chose » et je me sentais coupable de laisser passer ça. C’était mon inspiration principale. Après c’était aussi l’idée de défendre ce en quoi tu crois, tes plus profondes convictions par l’action. C’est une chose à laquelle je crois beaucoup, peut-être celle à laquelle je crois le plus. Je cherchais la bonne métaphore pour en parler, et le harcèlement scolaire en était la parfaite représentation.
Y a-t-il d’autres sujets que tu aimerais aborder et que tu n’as pas encore eu l’occasion de faire ?
Tellement ! Des sujets comme d’où proviennent ces sentiments que sont l’amour et la haine, qu’est-ce qui les fait naître. J’aimerais aussi parler de ma génération. J’ai l’impression qu’il n’y a pas vraiment de personnes s’exprimant au nom de ma génération. Bien sur, il y a des gens influents qui en sont issus, mais pas au sens où je l’entends. Énormément de sujets importants sont traités superficiellement. Je vois tellement de trucs passer sur les réseaux du genre « oh je suis si triste » accompagnés de citations inspirantes soit disant profondes. Je veux parler des vrais sujets, ceux qu’une grande partie de ma génération ressent et auxquels elle est confrontée.
J’ai vu que tu aimais bien faire l’acteur dans tes clips. Est-ce que c’est une activité qui pourrait t’intéresser à l’avenir ?
Oui bien sûr, j’adore jouer la comédie. Mais la musique reste ma passion principale. Si l’opportunité me tombe dessus et qu’on me propose de jouer dans un film pourquoi pas, mais pas si cela empiète trop sur mon agenda et m’empêche de faire de la musique. Après un petit rôle dans un film, pourquoi pas…
Tu as fait une grosse tournée chez toi aux U.S, puis tu es passé par Londres et l’Allemagne pour plusieurs dates. Comment un gamin avec des problèmes d’anxiété passe du confort des quatre murs de sa chambre à des scènes de plus en plus grandes ?
Tu sais, ce n’est pas si difficile pour moi que ce que l’on pourrait penser. Cela m’apparaît naturel. Pour moi, être sur scène est une évidence, je m’y sens tellement bien. Je ne me force pas. Mais oui, ça peut paraître paradoxal car c’est vrai que j’ai grandi en étant très introverti.
C’est ta deuxième date en France, et la dernière date de ta tournée ici à Paris…
Ah ! Anecdote marrante : lors de ma première date en France, j’ai donné mon concert dans une péniche. J’ai un morceau où je dis : « And I’ve been plotting on the low » (« Waist Down », ndlr) et « the low » sonne comme « l’eau » en Français et ça m’a marqué, j’ai trouvé ça plutôt bienvenu. Mais oui, c’est magnifique ici, et la nourriture aussi. Il me tarde de revenir !