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Solange – When I Get Home

Enfin, presque, car l’artiste originaire de Houston a proposé la veille, sur les réseaux sociaux, un teasing follement original : des visuels léchés, des vidéos hypnotisantes partagées sur un fond musical énigmatique… Tout un programme. A noter qu’encore une fois, Solange ne laisse rien au hasard. Cette date a été choisie pour sa portée symbolique et historique : elle marque la transition entre le Black History Month et le Women’s History Month. Quoi de plus logique pour une artiste féministe et résolument afro-centriste ?

Je décide donc que Solange m’accompagnera durant mon trajet matinal. Elle et moi, seules, pour une expérience sonore de 39 minutes. Et alors que je suis plus ou moins motivée par cette fin de semaine, les gens autour de moi n’existent plus vraiment, le bruit ambiant du métro parisien disparaît et je sens sur mon épaule une main se poser. C’est celle de Solange Knowles. Oui, en 19 titres, elle me procure toute la délicatesse et la douceur nécessaires à rendre cette journée spéciale, malgré la pluie qui continue de ruisseler et la grisaille hivernale…

A la première écoute, la cohérence et la continuité de ce projet sautent aux yeux. Cet album n’est absolument pas une succession de chansons disparates mises bout à bout. Non, When I Get Home est une toile de maître, un album-concept dans sa plus pure tradition, dont il faut apprécier chaque détail, chaque contre-rythme, chaque souffle, chaque harmonie, chaque silence… Ne comptez donc pas sur moi pour extraire des titres du lot, tant Solange parvient à instaurer une atmosphère cosmique tout au long de l’album.

Comme un film, il s’apprécie dans sa globalité, de la première à la dernière note. Alors, clairement, certaines scènes vous séduiront plus que d’autres mais vous ressortirez enchantés de cette séance musicale. Car, comment résister à l’histoire que raconte cet album ? Celle d’une femme qui a su trouver sa place et son identité petit à petit, sans prétention ni coup d’éclat. Solange met, avec ce disque, un terme définitif aux comparaisons avec sa sœur aînée, la surestimée (n’ayons pas peur du mot) Beyoncé. Elle est unique et mérite plus qu’un énième rappel de sa filiation. Elle n’est plus dans l’ombre de qui que ce soit.

Plus qu’une entertainer, Solange est une chanteuse éprise de musique dont elle a compris tous les codes esthétiques passés et modernes. Je pense immédiatement aux sonorités Soul 70’s, à la Great Black Music chère aux afro-américains, au crossover R’n’B/Hip-Hop mi-90’s ou aux sons synthétiques 10’s… Dans cet enregistrement, rien n’est improvisé. Rien… Ni les productions co-réalisées avec des musiciens très éclectiques : le français Christophe Chassol, le californien Steve Lacy, le virginien Panda Bear, le britannique Blood Orange, ou encore le crew new-yorkais Standing on the Corner… Ni les chœurs de son ami Sampha, du fantasque Tyler, the Creator ou du lascif The-Dream

Mais, attention, Solange n’a pas sélectionné ci et là des artistes en vogue pour s’offrir un LP préfabriqué, à la manière d’une Céline Dion qui apparaît en studio uniquement pour enregistrer des prises vocales sur des bandes sons finalisées. Dame Knowles est bien plus qu’une interprète, elle est cheffe d’orchestre : composant, écrivant, produisant, supervisant sa musique et ce, avec un perfectionnisme ahurissant dans un univers musical où la quantité prime sur la qualité.

Aucun doute, When I Get Home ravira les personnes séduites par son prédécesseur A Seat at the Table, petit bijou R’n’B/pop, sorti en 2016. Mais nul besoin de mettre en parallèle les deux projets : chacun d’eux communique, certes, un message similaire mais sont mis en musique d’une façon différente. Alors que les morceaux de 2016 peuvent être écoutés individuellement, le projet 2019 prend tout son sens lors d’une écoute prolongée.

Un conseil, prenez le temps d’écouter et de réécouter, s’il le faut, cet album. Vous tomberez forcement sous le charme. Car, Solange a la capacité de transporter ses auditeurs ; les prenant par la main pour les emmener dans une dimension parallèle créée au fil de sa carrière… Un monde où elle se sent bien et dont elle nous ouvre les portes aujourd’hui, pour notre plus grand plaisir…


Cette chronique est une contribution libre d’Audrey Rubegue que nous avons choisi de publier sur BACKPACKERZ. Si vous aussi voulez tenter d’être publié, n’hésitez pas à nous envoyer vos articles via notre page de contact.

Audrey Rubegue

Serait prête à suivre Stevie Wonder sur Saturne. Diggeuse professionnelle sur Spotify et collectionneuse de vinyles poussiéreux. Croit à la jeunesse éternelle.

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