« Après le fiasco du Rap Contenders, quelques mauvais projets de groupe, j’avais honte de retourner au tiekson », rappait Alpha Wann sur son classique UMLA. Prophète en son pays, le Don a décrit avec lucidité les difficultés qu’ont connu les membres de L’Entourage pour percer, jusqu’à ce que certains d’entre eux deviennent des têtes d’affiche de la scène rap hexagonale.
Sneazzy en fait partie, de ces charbonneurs qui ont connu la désillusion : Super, son premier album sorti en 2015, est un échec critique et commercial, malgré deux ou trois sons honnêtes. Mais, comme dirait un certain boxeur de fiction, « ce qui compte, […] c’est le nombre de coups que t’encaisses tout en continuant d’avancer ». Et NOUVO MODE, c’est un peu un film Rocky, ça va pas révolutionner le cinéma mais ça te fait bien kiffer, et là est l’essentiel.
SNZ le dit lui-même, les déceptions sont derrière lui. Et, comme sur ses derniers projets, l’artiste aborde sa nouvelle oeuvre avec une bonne dose d’arrogance, agaçante pour les uns, charismatique pour les autres fanboys dont je fais partie.
« Hamdoullah, malgré la carrière en dents de scie,
J’suis disponible en streaming et dans le ciné, toi, on sait toujours pas qui t’es comme Banksy »
Ce style que développe Sneazzy se décline aussi bien dans ses clips, le caliente « Non stop » et l’enneigé « T’as capté » en tête, que dans son flow. Celui-ci est désormais maîtrisé de bout en bout par le rappeur, qui lâche de grosses phases sur des sons comme « Règles », un « Ten crack commandments » à la française, ou encore « Deuss deuss ».
« Quand j’vois le prix de la Rollie, Je fais le sourire de Ronnie ».
C’est en effet dans l’egotrip que Sneazzy est le meilleur. Ayant bien pris en compte cette donnée, il multiplie les morceaux techniques depuis le premier DBSS, à l’image d’un « J’encaisse », l’un des singles annonçant l’album il y a plusieurs mois. Mais si le mélange de rimes, de flow et de punchlines, saupoudré de quelques phases intimistes, est savoureux avec modération ; il se révèle parfois indigeste sur plusieurs titres. Les amateurs de ce style seront évidemment repus sur NOUVO MODE, où le rappeur kicke dès l’intro, « A quoi tu joues ».
Les autres se pencheront sur les morceaux plus chantés du Parisien, pour qui Drake est une influence facilement décelable. Des morceaux comme « iMessage », « Schéma » ou « J’attendais », single et outro de l’album, sont de parfaits exemples de mélodies plus douces. Mais ces dernières sont aussi génériques que les thèmes développés, entre relations amoureuses et charnelles. Mises à part quelques brèves fulgurances, les textes sont d’ailleurs l’un des points faibles du projet.
On attendait peut-être de Sneazzy, qui a eu l’occasion de se perfectionner sur trois mixtapes, de plus grandes prises de risques musicales. Mais comment lui en vouloir quand sa formule est si efficace ? D’autant que, pour la développer sur vingt titres, le bonhomme a aussi mobilisé ses comparses.
Accompagné d’une batterie de producteurs de son Entourage (je n’ai pas pu résister), dont Diabi, Loubensky, L$30 ou encore Dioscures, Sneazzy kicke tour à tour sur des bangers minimalistes, des mélodies plus douces et même parfois mélancoliques.
Dans ce cadre, le morceau « Mon père c’est ma mère » aborde la colère vis-à-vis d’un père absent, thème que SNZ a déjà exploité quelques fois auparavant. Malheureusement, même la présence de S.Pri Noir ne permet pas de faire décoller l’émotion sur ce titre.
Les invités de NOUVO MODE sont pourtant un point fort de l’album. On appréciera la voix éraillée d’Arma Jackson sur le sentimental « Cigarettes », un Lefa fidèle à lui-même sur « Dieu qui me guide », ou encore les rimes de Nekfeu sur « Zéro détail », morceau qui aura plu à Pascal Praud, maître dans l’art de la polémique stupide. Mention spéciale à « Sang froid », morceau sombre où Laylow, en feu depuis le succès de Trinity, signe une apparition très efficace entre des couplets découpés par son hôte.
Le temps fort du projet reste cependant le déterminé « Etincelles », rassemblant Alpha Wann, Nekfeu et S.Pri Noir. Si les quatre compères ne font qu’enchaîner les couplets, leur talent suffit à sublimer le tout.
C’est peut-être cela la force de Sneazzy : pas celle d’être un leader, mais un Scottie Pippen, un solide lieutenant du crew, un insolent prêt à trashtalker pour défendre les siens. S’il n’a pas révolutionné le rap français avec NOUVO MODE, le rappeur parisien nous prouve cependant qu’il est bel et bien installé dans le paysage national, avec et pour ses proches. Preuve de cette loyauté, SNZ termine une jolie réunion de famille par un couplet solo sur un nouvel instrumental et un magnifique « Paix à l’âme de Népal » a cappella.
Cette chronique est une contribution libre de Axel Nodinot que nous avons choisi de publier. Si vous aussi vous voulez tenter d’être publié sur BACKPACKERZ, n’hésitez pas à nous envoyer vos articles via notre page de contact.
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