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Smino – NOIR

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Décidément, les tresses qui font déjà l’objet de l’artwork de son premier effort ne sont pas encore terminées. Comme le process est long et peut s’avérer un tantinet douloureux, Smino en profite pour tuer le temps en galante compagnie et proposer en 18 tracks une prose toujours aussi délicieuse. Produit par tout ce que la scène de Chicago propose de meilleur en ce moment (Monte Booker, THEMPeople, Smino lui-même ou encore Phoelix) et quelques visiteurs inspirés comme Al B Smoov ou Sango, Smino a mis toutes les chances de son côté pour faire de cet opus un joli projet.

Assurément, quand les premières notes sautillent et que les tracks s’enchaînent, la première impression est que la musicalité est au rendez-vous mais également qu’on avance en terrain connu. Pour tout dire, la continuité évidente avec blkswn se révèle au fil des morceaux. A mieux y regarder, les singles « L.M.F. » et « Klink » nous avaient préparé à cela mais notre plaisir de pouvoir se mettre de nouveaux morceaux du kid de Saint-Louis sous la dent ont peut être aveuglés les esprits fleur-bleue dont nous sommes.

Poésie toute en syncopes, en ellipses et flashbacks, les lyrics de Smino ne sont pas les plus simples à appréhender. Lorsqu’il parle de la condition des Noirs dans les rues de Chicago, il faut du temps et quelques écoutes pour saisir la pesanteur de la fatalité qu’il exprime. Parce qu’il ne s’apitoie pas, il conte son affaire comme un témoin neutre et permet à chacun de s’en faire sa propre idée. Il prend aussi le contre-pied de l’image traditionnelle défendue avec vigueur par certaines stars du rap en louant la simplicité de sa vie et le plaisir qu’il prend à s’échapper de ce monde.

Niveau production, admettons que malgré quelques ressemblances, Smino poursuit son exploration et dessine avec cet opus un carte postale efficace de ses inspirations. Rien d’illogique pour un transfuge du Mississippi qui éclaire la scène de Chicago et fait appel à des producteurs de LA et du coin.

NOIR, chant du blkswn ?

Les thèmes de NOIR sont sûrement plus légers que ceux auxquels il avait prêté sa prose il y a un an et demi avec blkswn. Pourtant, en complément à cet opus originel, NOIR se veut tout aussi révélateur de sa personnalité. Il y expose sa manière de vivre et vient compléter le portrait qu’il avait esquissé lors de son premier effort. Si blkswn dessinait les inquiétudes, les joies et les fêlures de Smino au fil des 17 tracks qui le composaient, NOIR relate des faits et des attitudes qui viennent colorer les contours de sa personnalité.

Comme déjà évoqué, sans dire que NOIR n’a pour but que de décliner et d’incarner les récits de blkswn, il existe une continuité assez visible entre ces deux opus. Outre les rimes et les sujets abordés, le plus flagrant reste la direction artistique choisie par l’équipe de Smino. Au final, c’est ce qui va justement poser problème avec ce projet : sa trop grande similitude musicale avec son effort précédent qui, au terme d’une heure d’écoute, laisse peu de fois une innovation poindre et raviver l’élan engagé il y a presque deux ans.

On en ressort presque déçu. Une déception au moins à la mesure de notre enthousiasme à la sortie de blkswn dont la fraîcheur musicale et la diction de Smino avaient emporté notre adhésion. L’effet rafraîchissant est resté dans nos souvenirs. Bien que Smino les ravive au fil de ses dix-huit nouveaux morceaux. Une madeleine à la saveur jamais démentie mais que son délicat processus de conservation finira par trahir.

Smino nous a offert un sophomore album contrasté et finalement assez clivant. Par sa continuité musicale indiscutable et à cause des thèmes qu’il aborde et qui posent un vernis sur l’autoportrait qu’il nous soumet. Les recettes qui l’ont sorti de l’anonymat sont là : des productions soigneusement conçues puis sophistiquées, une diction reconnaissable entre mille et une vibe que peu de rappeurs sont capables de proposer. Malgré ses qualités, Smino prend peu de risques et c’est vraiment dommage quand on sait le nombre de releases qui sont proposées et combien certains rappeurs sont capables de se réinventer. Assurément, c’est le coche qu’il a manqué sur ce projet. Peut être est-ce le plan qu’il avait conçu : faire de cet opus la seconde partie d’un diptyque autobiographique. Pour autant, la suite est déjà attendue : le monsieur a du talent et un sens musical qui mettent en appétit.

Clément Nadjo

Le hip-hop comme oxygène. La patience du digger, le pardon de l'amoureux. Amateur de bons mots, de belles rimes et de beats calibrés. Humour à qualité variable.

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