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Sheldon nous parle de ‘FPS’, son nouvel EP

Difficile de tourner la page d’un tel projet majeur qui mobilisa tant de temps, d’énergie créatrice, pour voir naître cet album Lune Noire, mais également une BD sur Insta, un jeu vidéo, des clips ainsi qu’une exposition. Un chantier titanesque qui aura pris quatre années à Sheldon et à l’équipe de la 75ème Session pour concrétiser le tout. Pour autant, le rappeur et producteur semble soulagé de tourner la page : “J’étais très heureux de passer à autre chose même si tu gardes une certaine nostalgie de ce que tu viens d’accomplir”. De nouvelles choses certes, mais un passage du titre « Solid Snake » laisse déjà entrevoir la possibilité d’une suite à Lune Noire : “C’est possible en effet. J’ai hésité à mettre cette phase dans l’EP car je n’avais pas envie que tout le monde s’attende à une suite de Lune Noire,  je ne sais pas encore si je le ferai, mais c’est bien possible qu’il m’en prenne l’envie un jour. Quoi qu’il en soit ça ne sera pas pour tout de suite.”

L’artiste revient donc ce jour avec un nouvel EP, au format et à l’esthétique similaire à son précédent EP solo RPG : “Nous avions décidé très tôt avec Yung Coeur, compte tenu de l’univers très digital qui gravite autour de ce projet, de fonctionner avec un système mécanique. FPS est le miroir de RPG, il y a le même nombre de tracks, sur la cover, le titre FPS est placé au même endroit que RPG, le logo PS5 (qui en réalité est “75S”, ndlr) au même endroit que NGC et le seul feat est placé au même endroit dans les deux projets.”

A la différence près que ce projet a été réalisé en grande partie pendant le confinement et donc à distance entre Sheldon et Yung Coeur, qui signe la totalité des prods : “Tout s’est fait durant le confinement, on avait l’idée depuis longtemps mais on ne savait pas quand on le ferait. On avait quelques titres de côté donc on est reparti de ceux-là pour avancer sur le projet et au final le confinement aidant, on a fait que des nouveaux titres et on a jeté tous les anciens prévus initialement.”

Autre différence notable, là où pour RPG, Sheldon avait délégué à Yung Coeur les prods et le mix, le premier avoue ici avoir fait lui-même les mixes et ajoute : “Nous avons tous les deux un studio chez nous donc tout s’est fait à distance car on se connait très bien, je ne pense pas que j’aurais été capable de faire ce même projet à distance avec un autre beatmaker que lui.”

Durant 8 tracks, Sheldon réalise la prouesse de nous narrer un monde uniquement composé de personnage de jeux vidéo, de Solid Snake à la Team Rocket en passant par la référence au Landspeeder de l’univers de Star Wars. Un travail colossal pour les profanes mais qui, de l’aveu de l’auteur, est un exercice moins compliqué que son travail sur Lune Noire“C’est très différent. Mais oui c’est plus facile de bosser sur ce type de projet que sur Lune Noire ou encore de parler de soi. Dans mon cas, les jeux vidéo ne sont pas une culture que je me suis construite pour faire des morceaux, c’est un truc que j’ai acquis depuis longtemps, c’est un grand sac dans lequel je peux aller fouiller pour faire mes textes. Ça reste du travail d’écriture pour faire de belles images mais cela me demande moins de recherche que quand je fais des choses sur moi-même ou pour Lune Noire, où il a fallu carrément écrire une histoire.”

Je me sens mal à l’aise dans vos réunions
Je ne suis pas à ma place dans ce drôle de monde
Je ne viendrai plus jamais à vos réunions
Entre vous et moi il manque le trait d’union

« Solid Snake »

Derrière sa narration tout en images de synthèse, remplie de 3D, de sabres et potions magiques, Sheldon semble user des costumes de ses personnages pour se dévoiler à pas feutrés, entre pudeur et sincérité touchante, comme dans le très personnel “Solid Snake” : “C’est une façon de parler de moi qui m’évite de me mettre en première ligne comme je suis en train de le faire en travaillant en ce moment sur mon prochain album, qui sera moins filtré, plus personnel. Dans des tracks comme “Solid Snake”, je me sens moins prisonnier de ce que je vais dire. À travers toutes les références que j’emprunte, j’ai l’impression d’être plus libre que quand je parle directement de moi. Je ne peux pas non plus avancer totalement masqué dans ce que je suis, cela se ressent dans mon écriture et de toute manière, je ne cherche pas à me dissimuler. Sur ce projet, il y a davantage de divertissement comme sur FPS, même s’il y a des titres comme “PS1” ou “Team Rocket” où, au final, je dis pas mal de choses sur moi.”

Une sorte d’entre deux au final, entre un défoulement de références et une introspection à peine dissimulée. La faute sans doute à la chronologie des sorties de Sheldon et de ses projets à venir : FPS a le cul entre deux chaises, entre deux projets plus gros. J’aime faire des textes à références culturelles comme ici mais je suis aussi dans une période où je grandis et où j’ai envie de dire des vrais trucs, écrire des morceaux qui peuvent toucher des gens et ce, pas uniquement sur des références communes.”

L’EP se termine sur le titre “CD Vierge”, comme pour signifier le reboot du système de RPG et FPS et ainsi laisser une page blanche pour la suite de l’aventure. On y retrouve très naturellement M le Maudit et Inspire sur un titre marquant du projet, et qui ferme ce dernier d’une manière plutôt dansante. Ces deux mêmes protagonistes, à qui Sheldon demandait d’assurer le playback dans le clip « Nagato », extrait de RPG, furent des choix naturels pour Sheldon : “Ce sont les personnes avec qui je suis le plus proche musicalement dans l’équipe. La question ne s’est même pas posée, au même titre que la question ne s’est pas posée à l’époque de RPG, nous étions alors tout le temps ensemble avec ODP, c’était logique de faire le track avec eux. Je ne suis pas sur un truc d’album, dans cette logique d’ouvrir en allant chercher des collaborations nouvelles, je fais juste de la musique avec mes gars. »

Le projet n’a pas été accompagné ce coup-ci d’un jeux vidéo jouable en ligne comme pour Lune Noire, mais le premier extrait clippé “FPS” est bel et bien le gameplay d’un jeu créé pour l’occasion ! Une nouvelle fois, la créativité de Sheldon s’exprime, cette fois aux côtés des géniaux Les Gars Laxistes pour délivrer un rendu bluffant. Celui-ci fut d’ailleurs au-delà des attentes, si bien que le titre associé fut changé : “On a changé le track au dernier moment, on trouvait que le clip était grave bien et qu’il fonctionnerait sûrement mieux avec un autre titre dessus, du coup on a refait un titre dessus en post prod pour mieux coller à la qualité du clip”. Une réussite visuelle qui, si l’on pousse l’analogie avec RPG, devrait compter d’autres extraits prochainement.

Sheldon compte en effet exploiter au mieux ce projet tout en travaillant déjà sur la suite en se mettant dans les meilleures conditions de réalisation : “Mon objectif est de pouvoir travailler et terminer mon prochain album en moins de temps que Lune Noire, même si on a envie de faire de belles choses, de ne rien sacrifier dans l’artistique.
 Mon équipe pour ce projet, c’est Vidji de Fixpen Sill, qui fait une partie des prods et qui fait les mixs du projet, également Dee Eye, un producteur belge. Comme tout est à faire, il se passera peut-être pleins de trucs en terme de prods, de rencontres etc mais l’équipe rapprochée reste la même. »

Se pose alors la question de la pression que peut engendrer un projet succédant à un monument comme Lune Noire. Là encore, Sheldon fait preuve de beaucoup de recul : “Je me mets un niveau d’exigence important mais c’est tellement différent de Lune Noire que c’est incomparable. J’apprends à ne plus être derrière chaque étape, c’est d’ailleurs par exemple pour cela que j’ai délégué le mix. J’ai envie que ce soit mieux évidemment, mais ce ne sont pas les mêmes sensations, c’est moins envahissant. Je me pose moins de questions, si il y a un track très léger qui vient se mettre au milieu c’est tant mieux.”

Un EP qui vous donnera sans aucun doute l’envie de rebrancher vos anciennes consoles dès ce week-end et qui démontre que l’univers créatif de Sheldon n’est pas près de disparaître, pour notre plus grand bonheur.

JuPi

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