En 2018, une terrible sentence tombe pour Potter Payper. Habitué aux magouilles et au trafic de drogues, le rappeur originaire de Barking est condamné à six ans d’emprisonnement. Une peine qui s’avère paradoxalement libératrice pour celui qui a changé de dimension en 2020. Après sa libération pour bonne conduite, une signature en label, ainsi qu’un carton plein avec son titre “Gangsteritus” ont suffi à l’artiste pour donner un nouveau tournant à sa vie.
La définition de l’insouciance ne colle pas à Potter. Si le rappeur semble aujourd’hui s’être enfin épanoui humainement, sa jeunesse et ses failles auraient pourtant pu avoir raison de lui. Dès ses 14 ans, l’incarcération vient frapper à sa porte à cause du trafic de stupéfiant. En voyant sa liberté anéantie, Potter n’a pas eu le choix. Il s’est tourné vers une autre forme d’émancipation, l’écriture, qui fera de lui l’un des rappeurs les plus respectés de la Grande Bretagne quinze années plus tard.
A l’heure de la sortie de son single “Multifaceted”, nous avons pu échanger avec le rappeur à propos de son parcours chaotique et de son premier album qui devrait voir le jour cette année.
Malo : Merci d’avoir accepté cette interview. C’est super pour nous, en tant que Français de parler avec des artistes anglais, car c’est une chose rare et nous apprécions vraiment ta musique. Dans cet entretien, nous allons faire le point sur ton parcours et ton impact artistique sur le rap anglais. Je laisse Cédric entamer l’entretien.
Potter Payper : Allons-y et merci à vous les gars.
PP : Oui je pourrais dire cela. J’ai toujours été déterminé à faire la musique la plus sincère possible. Rester fidèle à mon son et à mes croyances m’ont permis de m’accomplir personnellement et d’atteindre ensuite la réussite. J’ai toujours su garder une musique très personnelle, renoncer à cela est inimaginable pour moi. Je n’ai jamais essayé de faire des morceaux pour les clubs ou même de la trap classique. Finalement, je parle juste de ma vie de la façon la plus réaliste.
PP : C’est très important pour moi en effet. Surtout à ce moment de ma carrière. Il faut que mon histoire atteigne plus d’oreilles qu’au cours des dix dernières années, j’ai vraiment envie de la transmettre à une plus grande échelle. Je suis dans la musique depuis une décennie et mon premier album est sur le point de sortir donc il est essentiel que je sois le plus réaliste possible. Je crois que je vais enfin obtenir les fruits de mon travail avec cet album, tout s’aligne en ce moment.
PP : Quand j’ai commencé à aimer le rap, il n’y avait pas beaucoup de rap anglais aussi qualitatif que ce l’on trouvait aux États-Unis. Je n’étais donc pas influencé par ce qu’il se passait dans mon pays. Plus jeune je n’écoutais que du rap américain. En grandissant, je crois vers mes 14 ou 15 ans, j’ai commencé à me pencher sur des rappeurs britanniques. C’était avant Youtube, pendant l’ère des mixtapes, donc c’était des artistes dont j’entendais parler au quartier et dont j’allais me procurer le projet directement dans la rue. C’est aussi durant cette période que j’ai commencé à rapper de mon côté. Et nous voilà maintenant quinze années plus tard en interview.
PP : Complètement. Depuis que je suis jeune, je vois l’écriture comme une forme d’expression très importante pour s’en sortir émotionnellement. Si je ne faisais pas rimer ces écrits, je continuerais d’écrire pour le plaisir. Au collège, je me souviens que j’avais l’habitude d’écrire des histoires sur mes sentiments. Cela a toujours été quelque chose d’essentiel pour moi et pas forcément en rapport avec le rap. A l’origine, je n’étais qu’un auditeur qui apprenait des textes de ses idoles par cœur. Puis au fur et à mesure j’ai commencé à écrire de façon naturelle. J’avais ce besoin de puiser dans ma propre vie et ma propre douleur et de l’exprimer. Je suis content que les gens puissent s’y connecter et s’y rapporter mais aussi, vous avez, d’en tirer leurs propres interprétations. Certaines personnes trouvent ça triste, d’autres trouvent ça joyeux, une partie va trouver ça gangster, certaines personnes trouvent ça, vous savez, poétique.
PP : Je pense que dans toute l’Europe, il y a des endroits où il y a de la pauvreté, il y a, vous savez, des histoires à raconter.
PP: Je pense que le rap français est au même piédestal que le rap anglais et le rap américain. Comme chez moi en Angleterre, il y a beaucoup de sous-genres dans l’Hexagone.Vous avez du rap orienté pour les clubs, du rap de nouvelle génération et aussi pas mal de drilleurs. Un de mes amis proches me parle souvent de Niro. J’ai beaucoup apprécié son dernier projet. Tu sais, j’aime la bonne musique finalement. Que ce soit un rappeur français, américain, néerlandais ou danois, si le rythme est cool et que la personne est réelle, je vais le sentir et je vais apprécier.
PP: Pour être honnête, jusqu’en 2020, ma vie ne consistait pas vraiment à savoir si je faisais de la musique. La musique n’était que mon expression, je n’en avais pas vraiment tiré d’argent. Je ne voulais pas être célèbre, ce n’était pas mon ambition. Je ne me voyais même pas là où je suis aujourd’hui.
J’ai grandi toute ma vie en prison, de mes 14 à 21 ans. Donc c’est comme si ma vie avait toujours été orientée autour de cela, de cet univers de débrouille. La musique passait après. Puis la vie a éliminé naturellement tout ce que faisait avant. Alors je savais qu’il fallait que je m’oriente sérieusement dans le son. J’ai compris avec le temps que les gens kiffaient ma musique et que ce n’était pas juste un effet de mode. Alors, j’ai mis tout mon argent, mon temps, mes efforts là-dedans. Je sais que je vais compenser tous ces investissements, car l’argent commence vraiment à arriver. Avec mon équipe, je pense que l’on est au début du chemin actuellement. Le premier album arrive et j’espère une dizaine d’autres par la suite.
PP : Oui, à 100 %. La vie t’apprend des choses tous les jours en prison, mec. Et c’est en apprenant que j’ai su vraiment me connaître. Je suis toujours dans ce voyage compréhensif aujourd’hui. La musique est aussi quelque chose qui me maintient. Elle est ma vie en tant qu’expression. Chaque jour, je suis à un pas d’une décision stupide. Mais le fait qu’il y ait des gens qui écoutent mes morceaux, qui se tiennent aux nouvelles à mon sujet m’en empêchent. Les gens ont besoin de puiser dans ma musique. Je me dois donc de leur en fournir.
I need freedom like air, you never understand until ’til you see it disappear
PP : Elle représente une stabilité et un passage de cap pour moi. Je dirais que Def Jam représente vraiment le Hip-Hop de façon symbolique. Ce n’est pas un label tourné vers des tendances pop ou drill. C’est vraiment une institution du rap.
PP : Quand j’ai entendu dire que la chanson allait être utilisée pour clôturer la saison, je savais en quelque sorte au fond de mon cœur que ça allait être un grand moment pour moi et ma carrière, mais je ne savais pas à quel point. J’ai juste gardé cette idée au fond de mon esprit. Quand le titre est sorti sur les plateformes, je ne l’ai pas écouté. J’ai attendu de regarder toute la série du début à la fin pour profiter de mon son pour la première fois. J’avais vraiment envie de vivre ce moment de façon personnelle. Je sais que ce titre va vivre éternellement, il est à part dans ma carrière. Hormis le succès qu’il a reçu, c’est un titre très personnel auquel je tiens beaucoup.
PP : Nous travaillons ensemble sur de nombreux projets, on a une vraie discographie commune après toutes ces années. On travaille davantage ensemble depuis qu’il est sorti de prison et que j’ai fait de même. Au moment où il est sorti, je lui ai proposé de collaborer et depuis on enchaîne énormément. Ce remix n’est qu’un titre parmi tant d’autres. On a beaucoup de feats de prévu pour les prochaines années. C’est une relation artistique inscrite sur le long terme entre nous deux.
PP : Le retour que j’ai eu le plus concerne la densité assez forte de featurings dans cette mixtape. C’était la première fois que je faisais un projet avec beaucoup de featurings donc je pense que cela a interpellé beaucoup de mes fans. Certains ont beaucoup apprécié cette prise de position, d’autres ont beaucoup insisté sur le fait qu’il préfère m’entendre rapper en solo et pas avec un autre. Ce genre de commentaires m’a un peu surpris, mais m’a surtout fait sentir plus fort qu’avant artistiquement. En dehors de ça, tout s’est bien passé, la mixtape s’est classée huitième dans les charts au Royaume-Uni. C’est aussi dans ce projet que tu peux trouver “Gansteritus”, donc il a été très bien identifié par ceux qui ne me connaissaient pas auparavant.
PP : Non, parce que j’ai essayé d’entretenir une relation personnelle avec tous les artistes présents sur le projet, j’ai vraiment échangé avec chacun d’eux en studio avant de créer. Je n’ai pas produit des sons dans un unique but commercial, c’était vraiment des collaborations organiques ou j’ai apporté une patte personnelle à chaque fois, ce sont des putains de morceaux. C’était la première fois que je travaillais avec beaucoup de ces gens. Depuis cette mixtape, j’ai changé de vision, je travaille beaucoup plus avec d’autres artistes. Je continue d’en apprendre plus sur la musique. Maintenant, je suis vraiment excité à l’idée de sortir mon premier album. Les gens vont être contents. Toutes les étoiles vont s’aligner.
PP : J’ai voulu montrer une forme d’élévation dans mon rap, dans ce que je suis capable de délivrer lyriquement. Je me suis beaucoup concentré pendant la création de ce titre sur les enchaînements de barz. Certaines personnes ne le savent peut-être pas, mais oui, je suis assidu en matière de mesures dans mon rap. C’est quelque chose que je travaille beaucoup pour mon album, car il aura une portée différente en termes de textes. Je vais lui donner ce soin supplémentaire.
PP : Après “Multifaceted”, je vais enchaîner avec d’autres singles pour mettre en haleine le public. Ensuite, j’espère arriver à la fin de cette année avec mon premier album. Pour une tournée je ne sais pas encore mais si les gens me demandent en France, je viendrais avec plaisir retourner une salle.
PP : Merci à vous aussi les gars, prenez soin de vous.
Cette interview a été réalisé avec Cédric Rossi (IG : cdricrossi). Remerciement à Margerie Tazaro pour avoir organisé cette discussion.
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