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Nicki Minaj – Queen

Le paradoxe, c’est que les chiffres de vente de Queen ne sont pas aussi faramineux qu’ils devraient l’être, surtout pour une artiste qui n’avait pas sorti de disque depuis 2014 et The Pinkprint. S’il truste les charts du monde entier, Nicki Minaj n’a pas réussi à prendre la première place du Billboard américain sur laquelle Travis Scott est bien accroché. Un camouflet pour la native de Trinidad-et-Tobago qui multiplie depuis les attaques contre l’auteur d’Astroworld. Pour résumer, Nicki Minaj l’accuse de s’être servi de l’image de sa compagne, Kylie Jenner (la petite sœur de Kim Kardashian) pour augmenter son chiffre de ventes. Le problème, c’est qu’elle n’a pas que ça à gérer. Elle doit aussi faire face à une controverse suite à un morceau en feat avec 6ix9ine qui vient d’être accusé de détournement de mineurs. Enfin, pour couronner le tout, elle a dû annuler toute sa tournée américaine avec Future expliquant ne pas être totalement prête alors que d’autres sources parlent de préventes catastrophiques. Bref, cela nous éloigne du sujet mais Queen risque de subir les conséquences critiques et commerciales d’un tel contexte.

People vs. rappeuse

Ces dernières années, Nicki Minaj a beaucoup fait parler d’elle pour ses amours (Meek Mill, Nas, Eminem) ou ses tenues toujours aussi extravagantes que pour sa musique. C’était oublier qu’elle est peut-être la female MC la plus hardcore du game depuis Lil Kim. Il aura fallu que Cardi B vienne marcher sur ses plates-bandes pour qu’elle s’en souvienne elle-même. Car après des albums très attendus et décevants pour la plupart, Nicki Minaj vient rappeler, avec Queen, pourquoi elle a été considérée comme la relève du rap féminin lorsqu’elle a débarqué. Avant de se perdre dans son personnage, elle rappait dur, chose qu’on n’a quasiment jamais retrouvé dans ses disques. Il semble que ce soit enfin le cas dans Queen. Nicki Minaj règle ses comptes et a sorti sa plume la plus agressive pour le faire. Si les paroles tournent toujours autour des thèmes qu’elle affectionne particulièrement, le sexe, le name-dropping, les clashs et les egotrips, elle a pourtant à cœur de montrer qu’il ne fallait pas l’enterrer trop tôt. Rien que le titre de l’album en dit long sur son ambition et son attitude. Elle est la numéro une et elle entend bien le faire savoir. Alors, elle a sorti l’artillerie lourde avec 19 titres et de gros featurings, Lil Wayne, Future, Eminem, Ariana Grande, Foxy Brown, The Weeknd, Swae Lee et Labrinth. Le casting est tout aussi impressionnant chez les producteurs où l’on retrouve Murda Beatz, Mike Will Made-It ou encore Metro Boomin et Zaytoven. De quoi proposer une palette suffisamment large pour plaire à un nombreux public. Ce n’est pas parce que Nicki a des choses à dire qu’elle va arrêter le business… Mais, cette fois, si elle surfe toujours aussi bien sur les tendances, c’est mieux fait que d’habitude, c’est plus carré, plus serré, en un mot, plus précis.

Frappe chirurgicale

C’est d’ailleurs certainement pour cela qu’elle a si longtemps repoussé la sortie de Queen. Ce disque se devait d’être plus abouti que ses prédécesseurs, un brin paresseux, mais toujours porté par un hit international. Ici, ce n’est pas le cas. Aucun des morceaux ne semblent vraiment se détacher et être conçu comme un banger imparable (à part peut-être « Rich Sex » ?). Du coup, ce projet est beaucoup plus cohérent et ne comporte pas vraiment de moments faibles car il a été mieux pensé et mieux construit ce qui en fait un album bien compact. Surtout, Nicki Minaj y expose enfin le niveau que l’on attendait d’elle depuis longtemps : elle montre ce qu’elle a réellement dans le bide. Remontée, elle met une rafale à Meek Mill, Lil Uzi Vert, Drake, Young Thug et 50 Cent, le tout sur un seul morceau (« Barbie Dreams ») !

Capable de changer de flow selon la prod, elle est tour à tour agressive (« Sir »), douce (« Bed », « Thought I Knew You »), hypnotique (« Chun Swae ») ou langoureuse (« Ganja Burn ») et expose ainsi toutes les facettes de son talent. Queen montre le vrai visage de Nicki Minaj et une conclusion s’impose, c’est une sacrée rappeuse.

Grégory Curot

Passionné de rap français depuis 1990, il a été journaliste à RER, RAP MAG et Daymolition. Il a vu l’envers du décor et vécu des choses folles avec ses idoles.

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