Celui qui avait pris l’aise de sortir des projets de plus en plus complexes et sophistiqués (et allègrement sauté le pas du LP) revient à ses premières amours en offrant à son public un condensé de rap pur et dur. Arguant d’ailleurs d’une technicité qu’il a rarement atteinte même dans ses projets plus étoffés.
Pour parler chiffres, voilà deux ans maintenant que Pieces of a Man a enchanté nos oreilles et Mick remet le couvert du talent avec un EP de 7 titres et 19 minutes. Le temps d’une récré pour lui, pour qu’il continue à distiller ses mantras et à kicker son regard sur la vie. Une vie qu’il tâche d’appréhender avec la philosophie désillusionnée du nihiliste mais avec la rage de l’existentialiste qu’il décline depuis ses premières releases.
Le projet s’ouvre sur le beat sombre de « Same OI », dont la noirceur n’a d’égale que la lumière du texte qui, dès le début, plonge le conteur dans l’oxymore et l’auditeur dans l’équilibre délicat des philosophies qui consument Mick Jenkins.
D’ailleurs, le premier single sorti une semaine avant la release de ce projet (« Carefree ») se présente aussi bien comme une mise en garde à l’égard de son prochain qui ne s’inscrirait pas dans cette démarche de lâcher prise que sur la dualité du concept : vis sans anxiété et laisse ton entourage en faire de même en lui laissant sa liberté.
Sans être identifié comme un rappeur à la technicité incroyable, et sans dire que ce projet est un bijou du genre, force est de constater que Mick Jenkins a aussi porté ses efforts sur cet aspect dans cet opus. Surpris dès les premières mesures par cette agressivité nouvelle qu’il accroche au beat de « Same OI », Rapping Mick joue des différents univers qu’il déploie dans les 7 morceaux du projet pour varier son ton, parfois sa voix, souvent son approche de la mesure.
Alors qu’il attrape le beat presque au moment du break dans « Same OI », il n’hésite pas à alanguir son phrasé dans des morceaux comme « Flaunt » par exemple et à taper assez souvent off-beat bien que la technique soit depuis bien longtemps un indispensable dans le backpack du rappeur.
Enfin, notons que cette technicité est servie par une versification dont l’originalité tient plus par la structure des morceaux que par une plume shakespearienne. Peu importe, l’ensemble fonctionne et permet à l’auditeur de renouveler son intérêt à chaque morceau.
Jouant sur l’oxymore à outrance, Mick Jenkins la décline dans bien des aspects de ce projet : sa narration, le parallèle entre les lyrics (souvent positifs et ouverts) et l’instrumentation (souvent sombre et intimant l’introspection). Cela dit, objectivement, où est la surprise ? Cela a toujours été la marque de cet artiste qui confessait qu’après avoir tenté sur ses premiers textes de rapper ses egotrips (à cette époque glorieuse datant des débuts de la dernière décennie), il a choisi de s’appuyer sur ses vérités. C’est un choix ; d’autres faisant le chemin inverse avec succès. C’est aussi ce qui touche dans l’œuvre du MC chicagoan : sa capacité à user de beats vaporeux et d’un rap qui se veut plus technique pour continuer à diffuser sa prose. Un projet encourageant mais court, qui suscite l’intérêt et aiguise notre appétit pour la suite. À guetter. Mick, hâte-toi lentement.
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