Artiste martiniquais confirmé, Marginal arrive sur la scène urbaine française. Entre authenticité, éclectisme et profondeur, son rap se mêle aux sonorités dancehall. À travers le temps, l’expérience et sa signature chez Jaiye, Marginal s’impose désormais avec une véritable maturité. Son retour avec le titre inédit «Toy Boy II » laisse présager l’arrivée imminente d’un nouveau projet. Il se livre sur ses influences, ses valeurs et ses ambitions artistiques.
Pour les lecteurs qui ne te connaissent pas, peux-tu te présenter rapidement ?
Pour rester dans le domaine artistique, je m’appelle Marginal. Je suis actif sur les réseaux depuis 4/5 ans musicalement parlant et plus sérieusement depuis 2/3 ans, depuis ma signature avec Jaiye. Et voilà, artiste polyvalent qui fait son petit bout de chemin.
Et hors artistique, qui es-tu ?
Hors artistique, je m’appelle Antonio Duranty, j’ai 29 ans. Je fais aussi mon petit bonhomme de chemin. Mais ma vie est résumée par la musique parce que je vis de ça, je mange de ça, je bois de ça, je vais même me doucher musique, je m’habille musique : je ne pense qu’à ça ! Du coup même hors artistique, la musique c’est ma life !
Il y a un truc qui m’intrigue : pourquoi Marginale comme nom ? Il y a une explication ?
Il y en a une, dans le sens où c’est un blase que j’ai gardé parce qu’on me l’a attribué. Mon professeur de math et mon professeur de français aimaient beaucoup m’appeler comme ça, par rapport à mon attitude, mon côté rebelle et mon côté à part. Parfois, je suis les turbulents et parfois, je suis ceux qui sont « droits ». J’arrivais à un instinct éclectique, j’étais un peu à droite, à gauche… Marginalisé quoi ! Donc mes professeurs ont appuyé sur ce terme. Ça sortait pendant les réunions parents-profs, donc je me suis dit que j’allais garder ce nom. Je n’avais même pas encore la définition que j’avais déjà gardé le blase !
Ton histoire marque ta musique, par cela je pense à tes influences martiniquaises et à l’impact de ton père pour l’importance de tes textes, est-ce que ta musique est influencée par d’autres aspects ?
Les artistes qu’on a écouté plus jeune ! Je pense qu’après c’est assez banal comme réponse, je vais tout de suite te dire « ceux que j’ai écouté m’ont bercé » mais c’est un peu ça dans le sens où je n’ai pas vraiment écouté ce qui dominait sur mon île à l’époque. J’écoutais du RnB que mes potes allaient traiter de mauvais, car pour eux, ce n’est pas du son qu’ils kiffaient comme du hip-hop Old School. J’étais déjà dans des vibes différentes avant même de suivre la mode de mon île. Ce sont des artistes d’avant, style Eminem, Justin Timberlake, les débuts de Snoop Dogg et Lil Wayne, 50 Cent… Je vais en oublier plein mais ce sont eux qui m’ont bercé !
On sent une réelle différence entre tes deux albums, est-ce que tu t’es senti plus confiant ou plus mature sur ton deuxième album ?
Plus confiant, plus mature, plus entouré, plus aidé… ! Tout ce que je faisais était beaucoup plus structuré parce que j’avais la signature, j’avais le label, j’avais mes producteurs, j’avais des gens qui se démenaient pour moi ! Donc même ma condition était meilleure car je me sentais entouré. Tout allait mieux, j’étais plus à l’aise, même dans l’écriture et ça s’entend dans la finalité des sons.
C’est ça aussi qui justifie les clips ? Parce qu’on voit une réelle différence entre 2019 et 2020 !
Oui exactement ! Parce que Jaiye met beaucoup l’accent sur la qualité visuelle. Il faut produire quelque chose de beau et pro ! Donc oui, j’ai eu beaucoup d’appréciation au niveau des clips : les gens voyaient la différence.
Je vais rebondir sur ce que tu disais tout à l’heure, par rapport à ton éclectisme montré par tes professeurs : on le sent énormément dans ton dernier album, on sent que tu es à l’aise ! C’est quelque chose que tu recherches où ça vient comme ça ?
Ah non vraiment, ça vient comme ça, j’adore la musique ! Il y a une prod qui vient, je plonge. C’est juste de la passion, je ne travaille pas du tout la chose. Dès que j’ai commencé à chanter, on aimait la Dancehall parce qu’on trempait dedans en Martinique, mais j’aimais le rap donc je faisais déjà les deux. Je ne voulais pas entrer dans une case. Ça vient naturellement en vrai !
On sent également une dualité dans tes textes, dans ce que tu dis et même dans ce que tu représentes ! Comment tu arrives à garder une ligne artistique ? Parce que peu importe les musiques on sait que c’est toi et c’est totalement différent : il y a des trucs romantiques et d’autres trucs plus violents ! Comment y tu arrives ?
Tu me poses une colle ! Ça fait du bien d’entendre ça dans le sens où ça fait plaisir car ça décrit un peu ma carrière. Mais je n’ai pas vraiment de réponse. J’essaye de rester Margi qui aime ceci et cela, qui peut faire ceci et cela tout en parlant de tous les thèmes. Après on est humain dans le sens où on n’est pas obligé d’être dans une case, sans critiquer ceux qui le sont. Mais voilà, je ne sais pas vraiment l’expliquer, ça vient comme ça.
Juste tu restes toi-même !
Exactement ! Ça vient comme ça, on est au studio et on se dit « vient aujourd’hui on fait de la Dancehall », « vient aujourd’hui on essaye de faire un truc plus commercial », « vient aujourd’hui on fait du rap un peu plus street », « vient aujourd’hui je parle aux meufs » ! Sérieux ça vient naturellement et c’est magnifique !
Dans tes textes, on ressent l’importance que tu apportes à rester vrai. Le fait de rester authentique est important pour toi ?
Sur l’île martiniquaise c’est une base. On le met en avant dans notre créole, ceux qui chantent en créole, appuient beaucoup là-dessus. Parce qu’il faut rester vrai dans le sens où tu viens d’un lieu où tu peux être sur une place et si on capte dans ton attitude ou ta manière de penser que tu n’es pas vrai, tu ne vas plus être sur cette place. C’est une base, c’est un truc implanté : il faut rester vrai et le montrer aux gens. C’est la base, on agrandit là- dedans.
En écoutant ton dernier album, le truc qui m’a paru le plus important c’est l’ambition. Tu dis « même si on échoue, on essayera », tu parles de se lever tôt, de s’émanciper, de monter… Justement quelles sont tes ambitions musicales ?
Je veux aller au max. Par exemple, si Dieu a décidé que ma carrière doit finir dans 5 ans, je veux avoir profité pleinement pendant ces 5 années-là, avoir essayé au max d’aller au sommet que ça pète ou pas. Je veux juste pouvoir raconter à mon gosse, que j’avais ce rêve- là et que même si ça n’a pas marché au moins j’aurais essayé jusqu’au bout. Je veux juste rester déterminer et ne pas baisser les bras. Des fois, j’ai des coups de mou où je me demande pourquoi ça marche pour d’autres et pas pour moi ; dans le sens où je sais ce que je vaux et j’ai confiance en la musique. Mais j’arrive à me conditionner et à me dire « gros t’inquiète, ça va venir, laisse tarder ! ». Et même si ça arrive à 39 ans, ça va arriver parce que je vais charbonner. Tout travail mérite salaire et Dieu récompense toujours ses plus grands soldats. Donc je reste au combat, combat, combat.. Mon rêve, c’est de remplir des salles de concerts, des énormes salles ! Je ne suis pas dans le flouze de la vie artistique, ce que ça ramène de bon dont l’argent forcément, je suis dans la reconnaissance. Quand je prends sommeil en me demandant mon plus gros rêve, je vois les gros festivals comme en Belgique, je me vois remplir ça. Je me dis que ces gens-là se déplacent pour écouter ma musique et la chanter avec moi. C’est ça mon rêve : remplir des concerts, et pour cela il faut devenir un grand artiste et donc travailler.
Ton premier album Free Nemesis, après Free Nemesis 2.0 dans lequel il y a Toy Boy, tu viens de sortir Toy Boy II, est-ce que tu as envie de garder une ligne sur ta carrière ?
Pas du tout ! En fait, j’ai voulu. Sincèrement, c’était l’inspi ! Mais en parlant avec l’équipe, en parlant avec Dez, en parlant au DA, on a changé. De base, on avait même un Toy Boy III, mais on l’a appelé autrement car on s’est dit que ça aller faire beaucoup de TB ! Donc ça va rester ma mentalité, ma façon de penser, mon état d’esprit mais je ne vais pas continuer la série de Toy Boy, ni de Free Nemesis que je souhaitais aussi continuer. Mais c’est vrai, qu’en parlant avec l’équipe ça ne claque pas.
Si je ne me trompe pas, tu es sur le projet Grosse Dose, c’est un EP c’est ça ?
C’est un EP de 10 ou 12 sons.
Pourquoi le choix d’un EP après deux albums ?
On devait sortir un album… On a tellement de discussions sur ce qu’on fait et ce qu’on ne fait pas ! Tu vois, c’est du sérieux et on ne prend pas les choses à la légère ! Donc on s’était dit qu’on sortirait un album avec des bon feat, mais on est revenu sur l’idée d’un EP avec zéro feat. On pense que c’est mieux de sortir un petit EP qui créé encore de l’engouement avant un vrai album. Il fallait continuer à charbonner avant de proposer un album, j’étais d’accord avec l’idée de créer de l’engouement, du buzz et de la notoriété autour de moi et on verra après cela. Je me dis que faire un album, c’est quelque chose ! Je me dis « fais une mixtape, fais un EP et le jour où tu te sentiras prêt et que tu auras une bonne fanbase il y aura du monde et tu pourras sortir un album ». Là ce n’est pas le moment.
Pour conclure cette interview, qu’est-ce qu’on doit attendre de cet EP ? C’est quoi la suite ?
Je suis grave fier de l’EP dans le sens où j’estime avoir travaillé tous les sons qui arrivent. Je pense avoir une plus grande maturité musicale, donc je pense avoir mieux travaillé les sons et mieux compris l’industrie. S’il faut je dis ça et le projet va flopper direct ! Mais je suis grave fier de lui, chaque son que je réécoute, j’ai envie de les sortir demain ! J’ai envie de proposer ça aux gens pour avoir les retours car je l’ai mieux travaillé avec plus de maturité, plus de facilité. Le Label est toujours derrière moi, il me donne les facilités du studio, je viens et je suis dans ma bulle. J’ai une attachée de presse qui me donne des bonnes interviews (clin d’œil à Maeva qui était avec nous). Donc je suis dans de bonnes conditions. J’ai envie de le sortir car je sais qu’il va faire plus mal que ceux d’avant.
Merci à Maeva pour l’organisation de cette interview et l’invitation dans la bibliothèque studio.
Cette interview a été réalisée par Manon Virsolvy
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