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Lost & Found : Dixon – Symptômes Vol. 1

Nous sommes en 2011. Le haut des charts du rap français est occupé par les habituels « Bakel City Gang » de Booba , « Suicide Social » d’Orelsan  ou encore « Paris Va Bien » de Sexion d’Assaut . Au milieu de ces rappeurs émerge Dixon avec un premier projet concept appelé La Main. Composé de 5 morceaux portant chacun le nom (vous l’aurez deviné) d’un des doigts de la main, le rappeur nous délivre un opus de présentation sur fond de samples connus et textes travaillés.

La Main

Reprenant Massive Attacks « TearDrop »,  Hans Zimmer « Dream Is Collapsing » pour le film Inception ou même Blue Foundation « Eyes On Fire », Dixon mélange ainsi références pop culture / rap et apporte avec La Main un concept novateur encore jamais tenté. Ses textes varient, allant des confessions du psychopathe dangereux dans « Le Pouce » à la relation entre lui et sa plume, un adultère mettant en cause la célébrité dans « L’Annulaire ».

  

Dixon – l’Index « Seuls ceux qui manquent de flair écoutent les autres, Le mot classique c’est bien comme le riz blanc, mec on me le sert à toutes les sauces »

 Dixon – Le Majeur « Normal que ces gars-là psychotent, j’ai l’esprit tordu et meurtrier comme un chargeur de kalachnikov »

 Dixon – L’Auriculaire « Massacre auditif si tu passes ça au DJ, ma vie rappe sur le mauvais sample, J’me fais du mauvais sang comme Prodigy. »

Symptômes Vol. 1

Aux antipodes d’un rap jeu qui s’apprête à découvrir les influences de la trap américaine, le rappeur du 93 continue alors de travailler sur son premier projet physique sous le label GEMG (Golden Eyes Music Group), label produisant à l’époque le rappeur Joke, et les beatmakers Blastar, Spike Miller, Cannibal Smith et Richie Beats, rien que ça.

Apparaissent donc plusieurs extraits dont la trilogie « Passé, Présent, Futur » tout 3 clippés pour l’occasion où l’on peut voir Dixon reprendre par exemple « Get It In Ohio » de Cam’ron pour le morceau « Futur ».

S’en suit également l’extrait « Merci Qui ? » produit par Dixon lui-même. Un des morceaux phares de l’album, une composition sur fond de violons rappelant un film d’horreur couplé d’un clip à base de masque de serial killer et tronçonneuse.

 

« Bicéphale comme Ranma, Ma mère me voit comme le treizième pilier du tunnel du pont de l’Alma. 

C’est vrai que je suis un tueur de blondes, Ripley me cherche dans le vaisseau mais pour elle c’est trop tard, pour moi c’est l’heure de pondre… »

La qualité d’écriture est indéniable chez Dixon et ce morceau dantesque est un parfait symbole de la schizophrénie et folie de ce personnage. Les prémices d’un projet qui s’avérait intriguant donc.

Symptômes Vol. 1, sorti le 6 Juin 2011 mêle compositions originales des beatmakers cités précédemment et reprise de gros morceaux, posant ainsi sa propre vision et son personnage sur des airs déjà connus. On peut donc voir Dixon s’essayer sur l’instrumental de « Renegade » de Jay-Z feat Eminem pour « Esclave », ou encore sur la prod « Whistle » d’AraabMuzik pour « Orange Mécanique ».

L’ouverture appelée « Métamorphose » nous plonge immédiatement dans le bain. Une voix d’enfant qui sous-entend être le jeune Dixon raconte d’abord son enfance, froide, morose, La voix de Dixon s’ajoute alors, puis celle d’un démon, syndrome d’un personnage connaissant une évolution malsaine et dangereuse.

L’outro, quant à elle, conclue sur un sample de la série TV Dexter, confirmation d’une réelle descente aux enfers ou le rappeur nous confie dans une dernière minute qu’après avoir dévoilé ses travers, nous en savons beaucoup trop et qu’il va donc devoir se débarrasser de nous.

Que ce soit les morceaux purement originaux avec par exemple, « Prozac » sur une composition de Blastar, Dixon se livre dans une ambiance sombre et inquiétante, raconte son enfance difficile, son itinéraire qui le fera sombrer dans la folie et les pulsions malsaines qui développeront son passager noir. Une déception de la vie en somme, où l’on se complaît dans une routine amère, où on ne peut se réfugier nul part, pas même dans la religion.

 

« Et j’ai le mal du pays, personne ne crie « aux armes » tout le monde est sous Prozac, ma hache dépasse du treillis »

« J’suis donc allé voir le prêtre, l’âme en peine sous la pluie il m’as demandé, à ton avis : Qu’est-ce que les anges écartent le plus : L’aile ou la cuisse ? »

A contrario on trouvera des morceaux plus décalés, parfois même avec des refrains chantés, comme « Homme Enfant » ou « Modèle » sur une reprise de « Drop the World » d’Eminem feat Lil Wayne.

Dixon pour son premier projet ose, montre l’étendu de son univers et de sa palette prouvant qu’il n’est pas figé dans un seul style et est capable d’apporter différents concepts. En terme de composition, Dixon a également tenu à donner une chance aux beatmakers Français en organisant un concours et appelant à la composition sur une de ses acapellas. Le vainqueur a donc vu son morceau accrédité sur l’album : « North Side Remix » , produit par DJ N9FF.

Les ingrédients étaient donc tous réunis pour un succès certains. Textes travaillés, compositions de qualités et prise de risque à contre-courant de ce qu’on diffuse sur les ondes radios, mais malheureusement la mayonnaise ne prend pas. Malgré la qualité certaine de son projet, les ventes ne sont pas à la hauteur des espérances et le rappeur ne décolle pas.

Aujourd’hui si vous tapez Dixon sur Google, vous tombez plus facilement sur un DJ Allemand que sur notre rappeur du 93. Dixon semble avoir déposé les armes et toutes les traces de son passage chez GEMG semble avoir été effacées des internets, retrouver certains de ses morceaux/clips est parfois même assez compliqué.

Les apparitions de Dixon restent aujourd’hui maigres, les plus récentes sont 2 collaborations avec le beatmaker Hits Alive (travaillant beaucoup avec Seth Gueko) pour les titres « JCVD » et « Gilles Seum » dans un style totalement différent de ce que ce premier projet avait pu nous apporter.

Et même si on pourrait croire que Dixon n’est plus, Symptômes Vol. 1 lui, est. Alors pour cette originalité, pour ce talent, cette qualité d’écriture et ses productions particulièrement soignées, il ne peut qu’être intéressant d’entamer un voyage dans l’univers de ce rappeur en espérant qu’un jour, il revienne, pour finir le sale travail.

Antoine Fournier

Gosse des 90's et enfant du boom-bap. Remercie Dieu chaque jour pour Alchemist.

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