« Combat Rap – 25 ans de Hip Hop » de Thomas Blondeau et Fred Hanak
Parce que sur The BackPackerz on essaye de vous parler de tout ce qui touche de près ou de loin à l’univers du Hip-Hop, aujourd’hui nous vous proposons un petit billet sur un bouquin que l’on a particulièrement apprécié : Combat Rap – 25 ans de Hip Hop de Thomas Blondeau et Fred Hanak.
Retour sur 25 ans de Hip-Hop
Musiciens et journalistes indépendants, Thomas Blondeau et Fred Hanak sont des spécialistes de la culture Hip-Hop. Ils ont publié de nombreux reportages et réalisé des dizaines d’interviews dans les magazines Radikal, les Inrocks, Chronic’Art, Recording, Groove, Muziq ou Mouvement. Combat rap est leur premier ouvrage.
Le livre se structure autour d’entretiens passés entre 2002 et 2006 avec de nombreux artisans du rap game. Ici, rappeurs et producteurs sont conviés sur le divan de Thomas Blondeau et Fred Hanak pour nous délivrer les contes et merveilles de 25 ans de culture Hip-Hop.
D’Est en Ouest en passant par le Sud les deux journalistes sont allés à la rencontre de diverses figures historiques du rap afin de décrire non pas l’histoire mais LES histoires du mouvement aux quatre coins des US.
Depuis le début des années 1980 où on le présentait souvent comme un véritable fléau musical, le hip-hop est devenu une culture universelle. Une force politique et économique incontournable, transformant ses petits labels en gigantesques multinationales investies dans le textile, le cinéma, l’édition, l’immobilier, le sport ou l’alcool. De New York à Tokyo, de Los Angeles à Saint-Denis, le monde vit désormais au rythme de la musique rap, née de la rage créatrice des ghettos américains. À travers une série de portraits bruts de décoffrage et d’interviews coups de poing, ce livre sans concession donne la parole à quelques-uns des plus grands artistes du genre (PUBLIC ENEMY, WU-TANG, JAY-Z, MADLIB, THE ROOTS, JAY DEE, SLIM THUG, ICE CUBE, THE COUP, DJ SHADOW, et la légende funk GEORGE CLINTON) et dessine les contours d’une bruyante planète où il est question de dollars, de sexe, de drogues et surtout de rimes et de musiques.
Révise ta Géographie
Le parti pris du bouquin est non pas de nous raconter l’histoire du Hip-Hop sous forme de timeline mais par sa géographie.
En guise d’ouverture, le livre nous peint rapidement les contours de l’histoire du mouvement. Comment le rap est devenu « le gamin le plus fortuné et désinvolte des États-Unis » ou comment les rappeurs sont devenus les pop-stars du 21ème siècle ?
Les auteurs retracent ainsi l’émergence du double H dans les années 80 sur la côte Est des US avec la Zulu Nation. Mouvement créé à New York par le légendaire Afrikaa Bambattaa. Le Hip Hop de ces années-là est fédérateur et porteur de message !
De l’autre côté du continent, les b-boys ne s’échangent pas uniquement des lyrics, mais également des balles. Les douilles recouvrent le bitume des ghettos de LA pendant que le Gansta rap est en pleine ascension et en appel à la violence avec des titres comme « Fuck the Police » de NWA.
S’ensuit la vague Sudiste qui aujourd’hui inspire bon nombre de jeunes MCs. Sous codéine et weed les gars du « sale sud » débarquent dans le game pour foutre le bordel !
Rien n’échappe au radar des deux auteurs, tous les grands épisodes sont retracés et les grands courants sont mis en exergue à travers les différentes personnalités interrogées.
L’idée de parler des différents courants du Hip-Hop, d’un point de vue spatial est assez cohérente et intéressante quand on sait à quel point chaque zone des États-Unis possède sa propre identité et ses propres valeurs. Seul bémol, cela reste un peu réducteur et caricatural de cloisonner les rappeurs à leur origine géographique. En effet, le portrait dressé des différents styles reste simpliste. La côte Est fait du son boombap avec des textes conscients, pendant qu’à l’ouest le rap se contente d’être « gansta » et que dans le sud des hurluberlus se droguent aux cracks et porte les dreadlocks. Un raccourci qui facilite certes la compréhension du mouvement mais n’en donne qu’une vision partielle.
La parole à la défense !
Après ce rapide constat sur la situation du rap et son évolution dans les 25 dernières années, la place est laissée à une série d’entretiens. Voilà la force du livre de Blondeau et Hanak.
Les deux auteurs ont ainsi pu tendre leur micro à pléthore de MCs et producteurs pour qu’ils nous racontent leur vision du Hip-Hop. La liste des interviewés est d’ailleurs assez hallucinante. Les deux journalistes ont eu la chance de rencontrer tout type d’artistes: des leaders du « rap mainstream » comme Jay Z ou Ice Cube aux artistes les plus subversifs et engagés comme Chuck D de Public Enemy ou encore le marxiste Raymond « Boots » Riley leader de The Coup qui fait rimer rap et communisme. Mélanchon n’a qu’a bien se tenir !
La part belle est aussi faite aux producteurs. C’est d’ailleurs important de le souligner, car bien souvent les beatmakers sont oubliés des ouvrages traitant de rap. Sur ce point, Combat Rap se démarque en donnant la parole à Jay Dee, DJ Shadow, RZA ou encore Madlib. On y trouve des anecdotes assez épiques comme celle d’RZA qui raconte comment il a refourgué un remix de Texas à Universal à 204 000$. On apprend également que Madlib ne déclare aucun sample et ne se soucie aucunement du copyright. D’ailleurs Madlib ne parle pas de sample, mais de « Respects musicaux ».
Combat Rap – panorama du Hip-Hop US
Ce livre est, je pense, un bon début pour tous ceux qui désirent se plonger dans l’histoire du rap US. En 192 pages, ce Combat Rap arrive à balayer de façon synthétique et très claire 25 ans de musique Hip-Hop. Il permet de prendre de la hauteur et d’avoir une photographie assez rapide et détaillée du mouvement. Les entretiens sont souvent passionnants et nous offrent de vrais moments épiques.
Et puis comme le rappel Olivier Cachin en préface du livre « Personne n’écrit sur le rap, ou trop peu » alors profitez-en !