Les 10 meilleurs albums rap US de 2021
Après notre sélection des meilleurs albums rap français, découvrez cette fois notre liste des meilleurs albums rap US de 2021. Une sélection (et non plus un classement comme les années précédentes) évidemment subjective, qui compile les albums de rap américain qui ont marqué la rédaction BACKPACKERZ tout au long de cette année 2021.
Si l’année 2020 nous avait probablement privé de quelques albums blockbuster reportés en raison de la situation sanitaire, 2021 aura vu parmi les plus grandes superstars du rap telles que Kanye West ou Drake sortir de leur mutisme. Si vous avez l’habitude de nous lire, vous serez sûrement surpris de ne pas trouver les projets de ces deux artistes dans cette sélection. Un choix qui, s’il n’est pas partagé par l’ensemble de la rédaction, nous a paru justifié par la faible qualité de ces deux propositions.
Une fois n’est pas coutume, on retrouve dans cette sélection trois artistes également récompensés l’année dernière. Benny The Butcher, tout d’abord, qui continue à dérouler son rap « neo-boombap » en compagnie des meilleurs producteurs du genre, comme avec Harry Fraud sur le projet The Plug I Met 2. Pour notre plus grand bonheur, Nas – qui semblait encore avoir un pied dans la tombe il y a quelques années – confirme son retour au plus haut niveau avec deux albums délicieux ; poursuivant ainsi sa bromance avec le californien Hit-Boy. Enfin, c’est Aminé qui, après avoir conquis nos oreilles l’année passée, a remis le couvert avec TWOPOINTFIVE, un projet pétillant et fantasque, parfaitement à l’image du trublion de l’Oregon.
Egalement indispensable à ce bilan 2021, les projets des habitués de nos colonnes que sont Tyler The Creator, qui clôture son hat trick après deux albums déjà honorés ici. GoldLink également, dont le HARAM! a été la bande son parfaite de notre été. Autre artiste que vous avez peut-être découvert ici : IDK, le rappeur du Maryland, nous a comblé avec une très belle suite à son album de 2019.
Enfin, ce sont avec les rookies devenus confirmés Brockampton ou encore Baby Keem que clôturent cette sélection de nos albums coups de coeur rap US de 2021.
On vous souhaite une bonne lecture et une excellente année 2022 !
Les 10 meilleurs albums rap US de 2021
Benny The Butcher – The Plugs I Met 2
Sortie : 19 mars 2021
Suite directe d’un premier EP sorti en 2018, The Plugs I Met 2 sonne comme un retour aux sources pour Benny the Butcher après la sortie d’un album plus ouvert musicalement l’an dernier. Le rappeur du collectif Griselda quitte les sonorités revival années 2000 confectionnées par Hit-Boy pour s’immiscer dans l’univers enfumé de Harry Fraud, beatmaker tayloriste quasi cantonné aux seuls projets collaboratifs. Capable du meilleur comme du plus anecdotique, le producteur new-yorkais offre ici un terrain de jeu idéal pour un rappeur toujours pris entre deux feux, rattrapé par la rue et ses démons pendant qu’il grimpe le classement des rappeurs les plus respectés. Toujours construite sur l’imagerie de Scarface, la pochette met subtilement en avant le glissement opéré entre les deux volumes de ce dyptique. De la même scène mythique (la première rencontre entre Tony et Sosa), Benny choisit la poignée de main qui symbolise le respect naissant entre les deux hommes. Fini d’être un observateur, d’être fasciné par le pouvoir des autres (pochette de The Plugs I Met), ‘The Butcher’ peut regarder l’industrie droit dans les yeux et raconter sa face obscure. Car en bon connaisseur du film, le rappeur de Buffalo joue sur son hors-champ imprimé dans toutes les mémoires. Son final, la chute (littérale) de Tony, commanditée par Sosa, qui ne peut plus supporter les agissements instinctifs et paranoïaques de celui qui l’a d’abord charmé et enrichi. Benny en a déjà tiré les leçons: dans le monde de la drogue comme dans celui du rap, des poignées de main peuvent sceller des destins. – Benjamin Boyer
Morceau à écouter d’urgence : « Survivor’s Remorse »
Brockhampton – Roadrunner: New Light, New Machine
Sortie : 9 avril 2021
A l’origine, suite au succès du tube “SUGAR”, le sixième opus du supergroupe Brockhampton était censé aller dans une direction totalement pop. Finalement, Kevin Abstract et son crew ont changé leur fusil d’épaule pour revenir vers du rap pur, ce qui ne fut pas pour nous déplaire, évidemment. Sans réinventer la roue par rapport à leurs précédents projets, Brockhampton continue sa progression linéaire avec un album encore une fois solide, dense, marqué par cette énergie et cette “agressivité positive” qui les caractérisent toujours autant. Comme en témoigne l’énorme single “BUZZCUT” auquel Danny Brown participe, le meilleur boy band du rap a voulu pour ce projet élargir son cercle en invitant des outsiders de haute qualité, dont A$AP Ferg, A$AP Rocky, Charlie Wilson ou JPEGMAFIA qui contribuent grandement à la réussite de Roadrunner, qui ressemble en fin de compte à une magnifique ode au rap. — Hugo Ferrandis
Morceau à écouter d’urgence : “BUZZCUT”, “BANKROLL”, “CHAIN ON”
J. Cole – The Off-Season
Sortie : 14 mai 2021
Annoncé depuis longtemps comme l’antépénultième opus de sa carrière, The Off-Season marque le grand retour sur le devant de la scène de J. Cole. Mais trois années après la sortie du très dense KOD, le boss de Dreamville avait visiblement envie de s’amuser entre amis. Il s’offre donc pour l’occasion un gigantesque playground rapologique sur lequel s’éclater comme jamais. Épaulé par son fidèle gars sûr Bas, monsieur Cole demande même un gros timeout à sa lubie autarcique entamée depuis 2014 Forest Hills Drive pour inviter 21 Savage, Morray, Lil Baby et 6LACK à jouer avec lui. Enfin jouer est peut-être un bien grand mot pour le rappeur de Caroline du Nord qui n’en oublie pas pour autant ses fondamentaux : sa plume affûtée et son imparable science du replay value sont comme d’habitude bien au rendez-vous. Il faut dire que Jermaine n’est pas vraiment homme à s’offrir un petit hiatus de légèreté pour rien. Il explique en effet, au moment de raconter la genèse du titre de ce sixième projet personnel, avoir choisi cette analogie avec le basket comme pour mieux symboliser tout le travail nécessaire fourni hors saison afin de pouvoir atteindre les sommets le moment venu. Une façon bien à lui de nous rappeler que derrière la facilité apparente de l’exercice proposé ici, le joueur clutch qu’il est ne fait que répéter, répéter et répéter encore ses gammes pour être paré à enflammer le money-time à venir de sa carrière discographique solo. — Christophe Freitas
Morceau à écouter d’urgence : « a p p l y i n g . p r e s s u r e »
GoldLink – HARAM!
Sortie : 18 juin 2021
Bien plus expérimental que ses précédents opus, HARAM! est une prise de risque pour GoldLink. Une prise de risque louable pour un artiste qui a déjà connu un succès grand public. Les choix sont radicaux, qu’il s’agisse des invités, des productions ou de la réalisation. La voix est le premier élément qui marque l’esprit. Son placement haut et nasillard s’accompagne d’un traitement distordu où les basses fréquences n’ont pas droit de cité. Les instrumentales explorent une grande variété de styles, d’une trap nerveuse où les 808 mènent le bal, à un R&B porté par des voix langoureuses, jusqu’à une deep house dansante où les basses s’en donnent à cœur joie. Quant aux invités, ils sont essentiels sur cet album où deux-tiers des morceaux sont des featurings. Du Royaume-Uni à sa Virginie natale, GoldLink casse les frontières pour réunir des artistes talentueux loin des têtes d’affiches, à l’exception de gros noms comme Santigold. Poser des textes de rap sur de la musique électronique est ce qui a suscité notre intérêt pour l’artiste à ses débuts. Le voir revenir à un mélange des genres sous une forme si expérimentale est donc un plaisir. — Florian Perraudin-Houssard
Morceau à écouter d’urgence : “Evian (feat. PinkPantheress, Rizloski & Rax) » et « Culture Clash (feat. Fire!) »
Tyler, the Creator – Call me if you get lost
Sortie : 25 Juin 2021
En 2019, Tyler démontrait une fois de plus avec son album IGOR, qu’il était un virtuose de la musique, producteur de génie et artiste complet à la vision unique. Un album concept qui portait son art dans une nouvelle dimension, une odyssée musicale parfaitement maîtrisée. Deux ans plus tard, le rappeur de Los Angeles marque son retour avec une mixtape aux antipodes de sa précédente œuvre. Loin de l’orchestration quasi scientifique de IGOR, Call me if you get Lost émerveille par son chaos et incarne avec brio ce qui fait le charme d’une mixtape. À travers les 16 titres qui composent le projet, Tyler nous invite dans son débarras et nous convie à nous lover au milieu d’un désordre irrésistiblement romantique. Avec ce projet, Tyler se défait de l’aspect grandiose de IGOR et revient à un rap plus essentialiste et brut. Si les artistes invités sur son précédent opus s’étaient mis au service de sa direction artistique, Tyler lâche ici le gouvernail et laisse chacun marquer la mixtape de son empreinte musicale. En résulte une œuvre plus explosive, à la personnalité plurielle et à la palette chromatique plus étendue. L’intense passion qui porte CMIFGL se matérialise par la courte durée des morceaux. Pas fait pour la demie-mesure, Tyler compose sa mixtape en opposant une majorité de titres ne dépassant pas les 3 minutes, à « WILSHIRE » et « Sweet / I THOUGHT YOU WANTED TO DANCE », tous deux surpassant les 8 minutes. Ce dernier morceau cristallise l’essence même de ce projet et incarne sa sensationnelle personnalité. Mêlant rap, pop et reggae, il s’affirme comme la preuve du talent tout terrain de Tyler et sa capacité à créer en s’affranchissant de toute barrière. — Théo Lovestein
Morceau à écouter d’urgence : « Sweet / I THOUGHT YOU WANTED TO DANCE »
IDK – USEE4YOURSELF
Sortie : 9 juillet 2021
Celui qui nous avait déjà largement séduit avec l’excellent Is He Real? en 2019 était de retour cette année avec un album toujours articulé autour de réflexions métaphysiques. Alors qu’il s’interrogeait précédemment sur la question de Dieu et de la religion, c’est à l’Amour et son rapport aux autres que le rappeur du Maryland nous invite à réfléchir à travers les 17 morceaux de USEE4YOURSELF. Si l’écriture est riche de sens, l’aspect musical n’est pas en reste car IDK est désormais entouré des meilleurs pour mettre en musique ses idées : DJ Dahi, T-Minus ou encore les Neptunes à la prod ; le tout parfaitement orchestré par les mains expertes de Mike Dean ! Toujours aussi fort pour créer des habillages sonores autour de ses morceaux, on est directement séduit par la séquence de démarrage “3018091821” – “Santa Monica Blvd” – “Dogs Don’t Lie” ; qui nous rappelle un Kanye West époque MFDTF. On retiendra aussi les excellents bangers “Pradadabang” et “Shoot My Shot” qui invitent respectivement Young Thug et Offset. La liste des featurings s’allonge ensuite avec Doom, Westside Gunn, Jay Electronica mais aussi Lucky Daye, Rico Nasty ou encore Slick Rick. Finalement, on en viendrait presque à regretter qu’IDK ne se soit pas laissé plus de place sur cet album… — Antoine Bosque
Morceau à écouter d’urgence : “PradadaBang (Ft. Young Thug)”
Isaiah Rashad – The House is Burning
Sortie : 230 Juillet 2021
Après une longue descente aux enfers due à son addiction aux drogues, Isaiah Rashad est enfin revenu après cinq ans d’absence. The House Is Burning n’est pas l’album du changement pour le rappeur mais bien la confirmation d’un style qu’il a dessiné depuis son arrivée chez TDE en 2013. On ressent cependant les cicatrices laissées par ses addictions des dernières années tout au long de l’album. Sa voix, notamment, est abîmée et les thèmes du projet sont toujours aussi sombres que sur Cilvia Demo et The Sun’s Tirade. A l’image de la cover, l’album est tiraillé entre l’anarchie et l’innocence. On découvre une facette sudiste de Isaiah sur les titres “Lay Wit Ya” et “Rip Young” mais aussi une version améliorée de son style vaporeux. Sur “Headshots” ou “Don’t Shoot”, le rappeur revient dans un registre qu’il maîtrise à perfection tout en revenant sur les problèmes psychologiques, un thème déjà présent dans The Sun’s Tirade et Cilvia Demo. The House is Burning est dans sa construction un très bon album qui continue de témoigner du talent d’Isaiah Rashad et de continuer à anoblir la discographie de TDE. — Malo Herve
Morceau à écouter d’urgence : « Headshots »
Nas – King’s Diseases II
Sortie : 6 août 2021
Un an après un très bon premier volume, Nas remet le couvert avec King’s Diseases II. Si le précédent était assez consistant dans la production, les featurings n’avaient pour le coup pas vraiment été à la hauteur (mis à part The Firm). Pour ce second épisode, Nas a trouvé la recette en y ajoutant une teinte soul très appréciable. Les collaborations avec Charlie Wilson et Blxst sont de parfaits crossovers entre les années 90 et le rap actuel et “EPMD 2” est un super hommage aux années 80. Le morceau à l’image de l’album se nomme cependant “Nobody” avec Lauryn Hill. Un titre smooth où Nas prouve une fois de plus qu’il a sa place au panthéon du rap. King’s Diseases II se place comme un album sans prise de risque mais de très bonne facture pour toute amateur de Hip Hop qui se respecte. Nas inscrit davantage son nom dans la légende en proposant des albums de qualité presque 30 ans après ses débuts. Après King’s Diseases II, le rappeur a même sorti un projet surprise pour Noël intitulé Magic qui a confirmé sa pleine forme depuis 2020. — Malo Herve
Morceau à écouter d’urgence : « EPMD 2 » (Ft. Eminem)
Baby Keem – The Melodic Blue
Sortie : 10 septembre 2021
Une carte de visite. Voilà comment a été pensé le premier album de Baby Keem, qui prouve d’un seul coup son aptitude à tenir le micro sans blêmir aux côtés de monuments tels que Kendrick Lamar et Travis Scott et à composer des ballades pop aux accents tantôt drakiens, tantôt kanyesques. D’un phrasé de pyromane à une voix de velours, il n’y a qu’un pas pour le natif de Compton, dont le premier contact avec Top Dawg Entertainment remonte bien longtemps avant son adoubement par le maire officieux de la ville. Sa réussite est proportionnelle à l’attente qu’a suscité le jeune artiste depuis sa signature sur pgLang, le label fondé en 2020 par Kendrick Lamar et Dave Free. L’ensemble trouve sa cohérence dans une diversité qui flatte l’oreille. Les featurings, bien pensés dans leur complémentarité, ajoutent à la crédibilité de titres déjà solides et positionnent Baby Keem sur la grande carte du rap américain. Impossible de passer outre les flows de Kung Fu Kenny sur “family ties” et ses punchlines assassines sur “range brothers”, cerises sur un gâteau déjà savoureux. — Florian Perraudin-Houssard
Morceau à écouter d’urgence : « family ties (with Kendrick Lamar) »
Aminé – TWOPOINTFIVE
Sortie : 4 novembre 2021
Nombreux sont ces artistes qui explosent aux yeux du grand public avec un hit qui finit à terme par les ronger et être le poison de leur carrière. Si avec son single “Caroline”, Aminé était pour beaucoup destiné à rentrer dans cette catégorie d’artistes, la gestion de sa carrière et sa musique en constante évolution l’ont éloigné du funeste destin musical qui lui était prédit. Quatrième projet qu’il nous offre, TWOPOINTFIVE fait écho à ONEPOINTFIVE sorti il y a trois ans. Ce nouvel opus repose sur les fondations solides d’une proposition artistique exigeante qu’il bâtit avec minutie, et amène d’autres couleurs dans l’univers qu’avait dessiné son aîné. TWOPOINTFIVE est un camaïeu orangé, plein d’insouciance qui met un point d’honneur à s’éloigner de toute négativité, au profit d’une allégresse agréablement candide. Toujours intime et touchant, Aminé fait partie de cette caste d’artistes pour qui on s’éprend facilement et dont le charme laisse rarement insensible. Avec ce quatrième projet, Aminé s’affirme non plus comme une sensation mais comme un réel protagoniste du rap game sur qui il faudra encore compter pendant de nombreuses années. — Théo Lovestein
Morceau à écouter d’urgence : « Van Gogh »
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