K.A.A.N., nouvel espoir du Maryland
Knowledge Above All Nonsense, voilà la signification de l’acronyme formé par les lettres K.A.A.N., blaze d’un rappeur du Maryland qui a attiré notre attention dernièrement. Il semblerait bien que le label Redefinition Records (Damu The Fudgemonk, K-Def, Dj Spinna) ait mis la main sur une perle rare…
Cela fait un peu plus de deux ans que Brandon Perry est apparu sur le radar des observateurs de la planète rap que nous sommes. Comme beaucoup de rappeurs de sa génération, c’est sur Soundcloud qu’il s’est lancé. Autant dire qu’il n’a pas volé sa reconnaissance naissante, étant donné le volume de travail qu’il a abattu ces dernières années comme en témoignent les 150 morceaux présents sur sa page Soundcloud et les dizaines de morceaux à son nom éparpillés sur Youtube.
Malgré son pseudonyme plein de confiance, le producteur K-Def décrit K.A.A.N.comme un homme très réservé. C’est lui, K-Def, qui a produit Uncommon Knowledge, le premier EP de K.A.A.N. Le rappeur s’y montre virtuose et généreux. Son flow n’est pas sans rappeler celui de Joey Bada$$ à l’époque de ses premières mixtapes. La voix de Perry est poussée à fond, il semble au bord de la rupture. Cela confère une certaine intensité, une part d’émotion à son flow.
Les instrus, signées K-Def, sont gorgées de samples soyeux et chaleureux. L’association du flow rapide et technique de K.A.A.N. et de la prod très jazzy fonctionne à merveille. Pour un coup d’essai, Uncommon Knowledge frappe très fort. Malgré tout, Perry garde la tête froide. Même si il rappe avec passion et engagement, il reste concentré et ambitieux. Le jeune emcee est un travailleur acharné, qui avant la musique est passé par la maçonnerie et d’autres petits boulots très « terre-à-terre ». La rumeur dit qu’il continue à aller travailler tous les jours, refusant de tout miser sur un éventuel succès commercial de sa musique…
En mars dernier, K.A.A.N. revient avec Abstractions, un EP enregistré en collaboration avec le beatmaker Klaus Layer. La recette ne change pas, même si l’esthétique de Layer est légèrement différente de celle de K-Def. Les instrus qu’il a concocté pour Perry ont un côté un peu lo-fi. Abstractions n’aura pas encore permis à K.A.A.N. de toucher un public très large, mais cela ne saurait tarder. « Toonami » et « My Nigga » figureront sans conteste parmi les meilleurs morceaux du rap underground en 2017.
Le flow énergique de Perry et les beats teintés de soul sur lesquels il rappe ne doivent pas masquer pour autant la part plus sombre du personnage. Ses textes ne sont pas particulièrement joyeux, c’est le moins qu’on puisse dire. Sa prose est grandement influencée par ses angoisses, notamment liées à l’usage de drogues. Il parvient tout de même à sublimer sa noirceur par un talent d’écriture incontestable. Ses textes sont truffés d’images pertinentes et de tournures ingénieuses.
Il y a un mois environ le rappeur originaire du Maryland était de retour avec un nouveau single « How High » dans un style très différents du boombap qu’on pouvait entendre sur ces deux EP précédents. Avec une telle capacité à évoluer d’un style à l’autre, il se pourrait bien que K.A.A.N. fasse partie des rappeurs sur qui il faudra compter à l’avenir. On lui souhaite en tout cas autant de succès qu’un autre rappeur du Maryland qui était dans cette même position d’outsider il y a quelques années avant de devenir une des valeurs sûres du rap game de 2017, comme il l’a rappelé avec son dernier album Everybody.