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J.I.D – DiCaprio 2

Le parcours de J.I.D est franchement impressionnant. Adoubé très tôt par un J. Cole régnant et magnanime, il intègre l’écurie Dreamville à la fin de l’année 2016 pour préparer l’un des projets les plus chauds de l’année 2017. The Never Story avait en effet révélé la palette de celui que Cole considère comme ayant le potentiel d’un GOAT en puissance. Par le travail, seulement par le travail. En attendant, revoilà le rappeur originaire d’Atlanta qui étoffe sa palette d’un second projet attendu et pressenti comme la potentielle claque de cette fin d’année. Sans tuer un suspense que les Internets ont déjà étouffé, il faudra être encore un peu patient pour s’en assurer.  Pourtant le projet de J.I.D est très bon avec des featurings de haute volée, des productions variées et kickées avec aisance et un album franchement bien mené.

Dreamville à la baguette

Dreamville, c’est la force tranquille. C’est l’équipe de talents indéniables et chinés dans la rue ou au gré de concerts qu’a constitué J. Cole autour de lui. En presque dix années maintenant (le label est né en 2009), J. Cole et « Ib » Hamad ont su forger une valeur sûre du paysage hip-hop. A force de flair et de bons coups dont l’émergence du talent de J.I.D est aussi l’illustration. Si la rampe de lancement ne tient pourtant pas au seul nom du label, il y aussi une vraie intelligence dans l’art d’amener le projet. L’exemple qui nous a paru le plus frappant : voir J.I.D apparaître sur la chaîne COLORS y dévoiler « Workin Out », l’un des morceaux les plus réussis de ce projet.

Pourquoi COLORS est un choix particulier ? Parce que cette chaîne YouTube berlinoise se veut l’écho d’une musique underground où la passion et la qualité sont les maîtres-mots de sa curation. Et où la nationalité n’a que peu voix au chapitre. Du hip-hop, de l’électro, de la soul, du rock. Bref, tout ce que le monde a de talents musicaux émergents se presse aux portes des studios colorés. Du coup, passer chez COLORS, c’est s’inscrire dans la lignée d’étoiles montantes comme Jorja Smith ou H.E.R, s’asseoir aux côtés d’un Jay Rock en pleine renaissance et c’est surtout s’offrir une jolie visibilité auprès d’un public habitué à écouter de jolis projets. En un mot : le bon coup, surtout que le morceau est un vrai bon moment de musique. Notons aussi dans un autre épisode la présence d’EARTHGANG, d’autres membres du label dont le morceau est sûrement l’un de leurs titres les plus aboutis…

La table ronde

Si Dreamville n’offre pas nécessairement un passeport pour le succès, le label de J. Cole et le talent de J.I.D déploient suffisamment de crédibilité pour permettre de convoquer des légendes du genre pour des featurings étoilés. Certes, la présence de J. Cole est presque une signature des œuvres produites par son label tant on sait qu’il apprécie témoigner sa confiance à ses artistes. Cela dit, les apparitions de Method Man et Joey Bada$$, A$AP Ferg voire dans une certaine mesure de BJ The Chicago Kid ou 6LACK démontrent au moins deux choses : J.I.D est reconnu et sa musique sait transcender les genres et les propos. Sans dire que l’Oscar qui fait la cover soit pour l’instant mérité, il faut admettre que J.I.D est plutôt bien entouré.

Ce qui est intéressant dans ces invitations, c’est que chacune d’elles apporte une tonalité supplémentaire à l’opus, vient enrichir la palette des saveurs auditives proposées par le MC d’Atlanta et servir un projet dont la direction artistique est quasi irréprochable. Pour s’en assurer, il suffit de prêter l’oreille aux violons tiraillés de « Skrawberries » que le R&B de BJ vient accompagner, à l’énergie qui transpire de « Hot Box » dont le beat est celui qui convient le mieux au flow de Method Man ou encore aux lourdes basses qui font le background mélodique du « Off Deez » déposé par J. Cole.

Enfin, les thèmes qu’il aborde dans DiCaprio 2 – dont le titre est déjà à double fond –  marque sa propension à user d’un double langage pour enrichir son propos. Et ce, même s’il aborde des sujets somme toute assez classiques pour le commun des rappeurs (ego trip, cash, ladies et laid back). Ce qui n’enlève d’ailleurs rien à sa qualité d’écriture.

Atlanta, saison 2

Non. Le titre est volontairement accrocheur pour tout fan de la série de Donald Glover (aka Childish Gambino) mais la référence à la ville d’Atlanta est uniquement liée à l’origine du MC. En sortant un second projet en deux ans, en collaborant avec EarthGang et en portant haut (et loin) les lumières de sa ville, J.I.D contribue à apporter un nouveau souffle à cette place forte du hip-hop US. A l’image du hip-hop et du rap en particulier, la musique de la ville a vraiment évolué. A commencer par sa diversité, probablement l’une des plus riches de la scène US par ailleurs. Du Dirty South, en passant par le Crunk ou encore la Trap dont on mesure encore le succès, il est difficile de dire qu’Atlanta s’est reposée sur les lauriers que ses rappeurs ont contribué à lui tresser. En élève modèle et en enfant prodigue malgré tout reconnaissant, J.I.D contribue à donner à Atlanta une représentativité des plus nobles.

D’ailleurs, à l’analyse de ce projet, on remarque qu’il ne s’embarrasse d’aucun courant musical tant que celui-ci est kickable. De la trap qui lance le projet avec « Slick Talk » ou des relents de crunk (adouci) qui font « 151 Rum » en passant par l’instrumentation plus boom-bap de « Hot Box » que nous évoquions, la visite de la ville et de son histoire d’amour avec le hip-hop fait aussi la qualité de cet LP. Finie la réticence à l’égard de la musique de cette ville qui a pourtant donné à la musique américaine parmi ses meilleurs représentants. La dernière génération surfe sur le travail et les succès des anciens pour continuer à proposer toujours plus de nouveautés, si possible de qualité.

Au final, cet opus de J.I.D est une vraie réussite. Son casting, ses productions, son plan marketing, tout est bien pensé et plutôt bien conçu. Trop peut être. Et c’est là que le bât blesse. La critique qui pourrait rester est que malgré ses indéniables qualités et les morceaux entêtants proposés, les tracks découverts avec sa release ne paraissaient pas au niveau des previews proposés. Attention : ils restent dans nos playlists et de très bonne qualité. Mais peut-être s’est on laissé emporter par la hype ou les promesses qu’ils amenaient. Pour autant, malgré cette relative déception, le projet restera comme l’un des plus solides proposé par l’écurie Dreamville en 2018 et constitue, avec l’enthousiasme généré par The Never Story, une vraie promesse pour la suite. On l’attend donc, sûrs de notre fait et sans être trop inquiets pour J.I.D 2019, vite.

Clément Nadjo

Le hip-hop comme oxygène. La patience du digger, le pardon de l'amoureux. Amateur de bons mots, de belles rimes et de beats calibrés. Humour à qualité variable.

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