The Alchemist : « j’achète des disques partout où je vais »
C’est lors de leur passage à Toulouse que nous avions eu la chance de rencontrer le groupe américain Gangrene… enfin plus exactement The Alchemist en solo, puisqu’Oh No n’avait finalement pas pu être présent lors de l’interview. Pas grave puisqu’Alchemist est en soi l’un des plus grands producteurs de l’histoire du hip-hop, collaborant avec les meilleurs, de Nas à Action Bronson en passant par Eminem et Mobb Deep. Le beatmaker californien revient ainsi sur la genèse du projet Gangrene, sa vision du rap d’aujourd’hui ou encore sa participation à la bande originale du dernier jeu vidéo GTA.
The BackPackerz : Comment es-tu arrivé dans le monde du hip-hop au tout début ?
The Alchemist : Avec le breakdance, dans les années 1980, je suis un un vieux maintenant ! J’ai grandi à Los Angeles, et je crois que c’était dans un événement hip-hop, un battle ou quoi, mais j’ai du mal à m’en souvenir, je suis un vieux je te dit. J’ai fait du break, j’étais pas aussi bon que les mecs du crew, mais j’étais toujours en train de faire des footworks, toprocks, etc.
En 2010, vous lancez le groupe Gangrene, avec l’EP Sawblade suivi de Gutter Water. Comment est ce que tu as rencontré Oh No ?
On s’est connus via Evidence (MC de Dilated Peoples), on a fait un show tous ensemble à L.A., avec Evidence, Oh No, Roc Marciano et moi-même. Je connaissais déjà Madlib, et j’avais écouté ce que faisait Oh No mais je ne l’avais toujours pas rencontré. On a de suite accroché, et en rentrant on s’est envoyé des infos et on a échangé beaucoup de musique. On a construit notre relation à partir de ça.
Pourquoi le nom Gangrene ?
Pourquoi… pourquoi pas ? Non j’ai aucune réponse sérieusement, on a juste pensé que ça collait bien à la musique.
On a pu remarquer avec Dr. No’s Oxperiment (Oh No) ou Israeli Salad (The Alchemist) que les cultures étrangères sont importantes dans votre musique. Pourquoi est-ce que cela vous inspire tant que ça ?
N’importe quelle bonne musique m’inspire, et il y a de la bonne musique dans différentes parties du monde, du coup on peut pas forcément se limiter à une seule région, une seule époque. Tu n’es pas obligé de faire ça, mais ça t’apportera un enrichissement culturel vraiment important. Tu te rends compte qu’il y a des perles partout, surtout avec Internet maintenant, tu découvres des sonorités différentes qui viennent de cultures différentes, de pays différents. Aussi je voyage beaucoup, et j’achète des disques partout où je vais. Russian Roulette, c’était après un voyage en Russie, j’ai acheté des disques là-bas et j’ai voulu en faire un projet. Israeli Salad, c’était aussi après un voyage à Israël.
Vous avez sorti récemment la bande originale de la version PC de GTA V. Ça vous fait plaisir de vous projeter dans d’autres types de médias comme ici le jeu vidéo ?
Carrément ! Il faut toujours rester ouvert d’esprit et libre en tant que musicien. Tu as toujours envie de garder certaines sonorités mais ça fait du bien d’aller plus loin. Toutes ces opportunités (comme GTA) sont géniales parce qu’elles t’offrent une visibilité pour un autre public, et pas forcément l’underground comme on a l’habitude. Je suis toujours intéressé pour emmener ma musique ailleurs, pour la proposer à des gens différents.
Comment vous avez rencontrés les mecs de chez Rockstar Games (producteur de GTA V) ?
C’était il y a quelques années, via un ami à nous, photographe et artiste à L.A.. On a commencé une relation amicale, on s’est toujours échangé beaucoup de projets, puis quand on a eu l’opportunité, on en a profité. Welcome To Los Santos est vraiment un gros projet.
Beaucoup de rappeurs choisissent maintenant de faire des concerts en étant accompagnés d’un live band, comme DJ Premier, Ghostface Killah, Pharoahe Monch. Ça te tente de faire ça un jour ?
Franchement… je n’aime pas trop ça, ça ne m’intéresse pas trop. C’est compliqué de capturer l’émotion et le ressenti que peuvent provoquer des samples avec un live band. Certains groupes font ça très bien, j’ai vu DJ Premier récemment et c’était incroyable. Je respecte les gens qui font ça mais cela ne m’intéresse pas.
Qu’est-ce que tu penses, aujourd’hui, de l’évolution de la musique rap ?
J’adore ça ! Ça tue, vraiment. Bon, certains projets plus que d’autres bien sûr… mais la musique se doit d’évoluer, de progresser, tu ne peux pas lutter contre ça.
Vous êtes tous les deux des beatmakers mais vous rappez sur certains morceaux. Toi par exemple tu choisirais quoi entre les deux (production et rap) ?
C’est une question facile ! La production évidemment, c’est mon point fort, l’épée est déjà forgée. Je prends le mic’ pour déconner, je ne prends pas du tout ça au sérieux, mais par contre au niveau production je suis plus compétitif et plus acharné.
Tous vos clips sont réalisés par Jason Goldwatch, ils sont totalement fous, un peu à l’image de votre musique. Vous lui balancez des idées ou vous lui laissez carte blanche ? Comment vous avez collaboré la première fois avec lui ?
On lui laisse totalement le champ libre, il fait ce qu’il veut. Parfois on a des idées et on lui en fait part, mais il est super bon, on lui fait confiance.
Vous avez prévus quoi après votre tournée ?
Je vais sortir une série de singles. Juste des petits disques, j’essaie de faire mon petit label indépendant, et là je bosse avec Mc Eight, Blu, Planet Asia, Mac Miller, Schoolboy Q, Roc Marciano. J’ai aussi un album avec Havoc sur les clous (The Silent Partner, qui vient de sortir, ndlr).
C’est quoi le dernier projet que tu as le plus écouté ?
Reject 2, de Conway, et Westside Gunn aussi. En ce moment ce sont mes deux artistes préférés.
You Disgust Me, le dernier album du groupe Gangrene, est toujours disponibles en physique et en streaming.