Un peu plus d’un an après la sortie de son troisième album You Only Live 2wice dont le titre semblait annoncer un nouveau tournant dans la carrière du rappeur de l’Indiana, Freddie Gibbs est de retour avec une nouvelle mixtape éponyme et inattendue, Freddie.
Le teasing et surtout la cover de ce nouveau projet semblaient annoncer un énorme virage musical : tout laissait présager que Gangsta Gibbs allait sortir un album de Soul/R&B… La publication d’une vidéo le montrant habillé comme un crooner en train de reprendre notamment The Isley Brothers assez pitoyablement annonçait la sortie de cette mixtape, puis le lendemain elle fut dévoilée avec cette pochette assez surprenante : il s’agit d’une copie quasi conforme du classique d’une des plus grandes voix de la Soul, Teddy Pendergrass et son album Teddy de 1979.
Freddie Gibbs a-t-il donc totalement laissé tomber son côté OG ? Le mystère plane jusqu’à ce qu’on se lance dans l’écoute de ce projet… Et on vous rassure, absolument pas ! A coups de grosses prods signées, entre autres, Kenny Beats et RichGains, le rappeur effectue un retour surprise plutôt convaincant. En effet, non seulement il marque des points avec cette promo assez hors du commun, mais il satisfait aussi musicalement.
La première track annonce la couleur de manière tonitruante : « Weight » est un banger plus qu’efficace qui nous fait immédiatement oublier toutes nos présomptions avec ses basses bien lourdes et son refrain qui ravira tous les sportifs en quête de motivation
Pushin’ weight, bitch, I’m pushing weight.
Ainsi, cette mixtape ne semble à priori ne rien emprunter au R&B des seventies si ce n’est la cover. Freddie montre qu’il est bien un des rappeurs les plus OG en posant sa voix grave et rauque sur des morceaux dont les lyrics reflètent bien cet esprit (« Benz fully automatic / Chopper fully automatic/ She gon’ suck me off, it’s automatic »). Il rend même hommage à l’un des maîtres du Gangsta Rap en samplant le mythique « Boyz-n-the-hood » d’Eazy-E pour un résultat convaincant mais pas non plus transcendant malgré la présence du Californien 03 Greedo (remarqué avec « The Wolf of Grape Street ») dont la voix et le flow contrastent avec ceux de Freddie.
Pourtant, il parvient à allier son style avec le genre dont il semble s’inspirer sur « 2 Legit », et il brille à cet exercice. Le morceau reprend un sample d’une reine du R&B, le « My Life » de Mary J. Blige, reprenant elle-même le mythique « Everybody Loves The Sunshine » du grand Roy Ayers. Cette combinaison est véritablement le highlight de cette mixtape : sur une prod sensationnelle, Freddie revendique le fait qu’il soit authentique, « legitimate » en livrant des punchlines toujours aussi efficaces, notamment celle-ci :
Trade these ho’s like Kyrie, I’m LeBron,
en référence au départ de la superstar des Cavaliers vers Boston qui aurait été orchestré par King James (Bien que LeBron ait démenti cela).
Puis vient l’interlude « FLFM » (Feelin’ like Fuckin’ me) où Freddie change brutalement de registre pour un « véritable » morceau de R&B (plutôt une parodie) rappelant bien le style de Teddy Pendergrass sur un standard comme « Close the Door », malgré une performance vocale désastreuse.
La deuxième partie de la mixtape est constituée de trois autres morceaux similaires aux précédents, toutefois moins entraînants, nous laissant un peu sur notre faim. Puis vient la dernière track de cette mixtape, « Diamonds 2 », qui paraît en opposition avec tous les autres morceaux. Celui-ci incarne probablement la deuxième vie qu’évoquait Gibbs par son précédant album : il est depuis plusieurs années le père d’une fille, qui est d’ailleurs créditée sur ce morceau pour ses gémissements à la fin, responsabilité qui semble-t-il lui tient de plus en plus à cœur (il s’était notamment fait tatouer son portrait l’année dernière). Ainsi, sur ce morceau, il délaisse ses lyrics plutôt hardcore et évoque par exemple son amour pour sa mère (I can’t lie I still love my baby mama).
Freddie est donc une mixtape qui dans l’ensemble ne déçoit pas, ses dix courts morceaux font qu’elle est facile et plaisante à écouter. Ce qu’on peut lui reprocher, c’est le manque de variété dans les productions et le phrasé du rappeur, mis à part sur « Diamonds 2 », mais s’agissant d’une mixtape, cela n’est pas condamnable, loin de là, d’autant plus que l’on sait que Gibbs en est capable puisqu’il l’a déjà démontré précédemment. On attend donc avec hâte la sortie d’un projet encore plus abouti, bien que celui-ci le soit déjà très bien : Gangsta Gibbs est tout à fait capable de se surpasser !
Freddie Gibbs- Freddie
Cette chronique est une contribution libre d’Arthur Quentin que nous avons choisi de publier sur The BackPackerz. Si vous aussi voulez tenter d’être publié sur The BackPackerz, n’hésitez pas à nous envoyer vos articles via notre page de contact.