Flatbush Zombies – Vacation In Hell

Avril 2018

Flatbush Zombies

Vacation In Hell

Note :

Après 3001 : A Laced Odyssey, premier album pivot marquant la scission avec l’esprit Horrorcore de leurs précédents projets, les zombies sortent de leurs tombes et remettent le couvert avec Vacation In Hell, leur deuxième album studio, et cinquième projet commun. Un 19 titres substantiel dont la production est, sans surprise, supervisée par Erick the Architect qui n’a pas hésité à se faire épauler par des talents comme The Alchemist ou Kirk Knight.

Bien que le trio Jamaïcain ait déjà prouvé être suffisamment complémentaire pour briller en autosuffisance, on remarque la participation d’un casting plutôt florissant de rappeurs New-Yorkais tels Joey Bada$$, A$ap Twelvyy, Jadakiss, et Nyck Caution. Quelques surprises sont de rigueur avec Dave B, jeune artiste de Seattle, la chanteuse sud-coréenne Dia, ainsi que Portugal. The Man, le groupe de rock originaire d’Alaska. Un choix quelque peu cocasse de prime abord, mais qui se révèle particulièrement efficace sur le titre « Crown ». Sans oublier la présence très appréciée des sudistes Bun B et Denzel Curry.

On commence avec « Hell-O » en guise d’intro, un croisement hybride sauce Flatbush entre trap et boom-bap qui vous plonge directement dans le bain bouillant et ce sans simagrées.
Thématiquement, on peut qualifier ce projet de riche et varié. « Facts » renvoie légèrement à This is it dans l’esprit, qui dénonçait le clonage artistique dans l’industrie. Il s’agît ici d’une version plus pêchue, une bonne grosse diatribe critiquant l’ostentation vaniteuse et illusoire dans la société rap illustrée par un Meechy Darko assassin :

« Bitches tryna get real love with fake asses.»

Jadakiss parfait la prestation d’une excellente entracte, avec une maîtrise éloquente de la théorie du Sucker MC. On vous laisse écouter les punchlines, il y en a un bon paquet.
« Headstone », déjà connu avant la sortie du projet, est un cocktail bien corsé de références musicales, une prouesse culturelle qui fera sans nul doute l’unanimité des connaisseurs ; et mentir tout bas ceux qui pensent que Flatbush n’est pas technique.
On découvre des titres plus intimes tels que « The Glory » dont le couplet de Zombie Juice rend hommage à toute sa famille, un morceau que l’on pourrait aisément passer le dimanche matin à l’église entre deux cantiques. Ou encore « Trapped », à l’allure de ballade au texte épuré façon The Roots qui peut prendre l’auditeur à contre-pied par la noirceur du couplet final d’un Darko écorché vif, en proie au désespoir, débordant de questions existentielles sans réponses.

L’engagement est palpable tout au long de l’écoute et ce tout particulièrement sur « Best American », qui comme son titre le suppose, est LE morceau engagé du projet :

« Another day, another cop killed an honest man »

dixit Zombie Juice, qui déclarait déjà sur « Chunky » :

« Racism’s still alive, they just be concealing it.»

Sans grosse surprise, la drogue est toujours un thème récurrent mais avec une appréhension peut-être un peu plus mature et plus éloignée d’une apologie décomplexée. Oui, les zombies aussi prennent de l’âge. Sur « The Glory », ultime morceau de l’abum, ils avancent :

« Killin’ coral reefs, smoking weed too fast »

Ou encore sur « Big Shrimp » :

« Used to sip, sip ’til my homie died of that shit » 

On pourrait chroniquer chaque titre du projet tant la consistance se pose là. Tout y est ou presque. Egotrip, introspection, engagement, légèreté… Une légèreté quasi estivale, comme le témoigne le chant des goélands sur « The Goddess », un featuring manifestement omis par la rédaction.
Déployant un éventail d’émotions aussi vives que disparates, cet album est un ascenseur émotionnel, un peu à l’image de son aîné sur lequel figurait anecdotiquement le titre « Ascension », mais plus complet. Les productions ne sont certes pas époustouflantes, mais décemment bonnes pour que le talent s’exprime et la magie opère. La première écoute est rarement salutaire ce qui devient monnaie courante chez FBZ, cela dit la saveur monte progressivement au fil des écoutes au même rythme que nous en saisissons la profondeur, une profondeur zombiesque.

Flatbush Zombies – Vacation In Hell



Cette chronique est une contribution libre d’Anthony Penteado que nous avons choisi de publier sur The BackPackerz. Si vous aussi voulez tenter d’être publié sur The BackPackerz, n’hésitez pas à nous envoyer vos articles via notre page de contact.