Terrace Martin, ombre jazz de To Pimp A Butterfly
Finalement, comment pouvait-il en être autrement? Après des collaborations et des conseils disruptifs et décisifs à la production des morceaux qui ont le plus enthousiasmés nos oreilles ces derniers mois, Terrace Martin a déposé dans les bacs une dernière pépite en avril dernier, mais en son nom propre avec The Velvet Portrait.
Cette fois, le hip-hop est plus lointain, même si le fin limier ou le connaisseur inspiré sait combien les B-Boys doivent aux styles représentés dans cet opus. Terrace Martin, avec Velvet Portraits, signe une délicatesse qui s’écoute tranquillement, seul ou à plusieurs, comme pour saluer l’arrivée du mois de mai, ultime tremplin avant l’été. Les terrasses seront bondées dans les semaines à venir et nos oreilles certainement rudoyées par les « tubes » de l’été. T Mac est là avec cet opus tout en douceur qu’on vous propose de découvrir avant cette grande plongée.
Oui, amis connaisseurs, Terrace Martin, ou T Mac, sont des noms qui sonnent juste à vos oreilles et qui sont même associés à de bons souvenirs. La mémoire ne vous a pas fait défaut puisqu’il s’agit bien de l’un des grands orchestrateurs du chef d’œuvre de Kendrick Lamar, To Pimp A Buttefly. Les clins d’œil à cet opus sont d’ailleurs nombreux dans l’album de Martin puisque plusieurs skits sont directement repris de TPAB (sur « Curly Martin » par exemple). D’ailleurs, c’est presque à se demander si cet album n’a pas été enregistré durant les sessions off de To Pimp a Butterfly puisqu’on retrouve sur Velvet Portraits d’autres jolis noms qui ont signé l’instrumentation de King Kendrick. Citons pour commencer Kamasi Washington dont la notoriété ne fait que croître depuis une année et sa contribution remarquée à TPAB, mentionnons également Thundercat, son compère de Brainfeeder Records (le label de Flying Lotus), et puis un certain Robert Glasper dont la seule présence suffit à valider la qualité du projet. A ces noms aguicheurs se sont ajoutés ceux d’artistes en devenir dont le talent ne demande que le terreau propice à leur éclosion. On pense notamment à Tone Trezure et sa voix suave un brin éraillée, Tiffany Gouche, Rose Gold ou Marlon Williams.
Terrace Martin – « For Ever With You »
Bien qu’il ne s’agisse pas d’un album instrumental, ce qui est notable dans ce projet c’est que les featurings soulignent la présence des musiciens et des instrumentistes qui ont contribué à un morceau. Comme pour mettre en avant le talent de ces grands de l’ombre qui subliment la musique.
Même si le hip-hop n’est pas très présent dans la composition de cet opus et qu’aucun morceau n’y est rappé, le brio dans la composition et la limpidité des arrangements rappellent qu’avant de s’exprimer en hip-hop, Monsieur Martin a connu ses premières amours et ses années de formation en Jazz. Bien que son parcours en porte l’empreinte, il ne faut pas se méprendre : Velvet Portrait est un opus qui clame un retour aux origines et se différencie en cela de ses précédentes sorties. Le travail colossal réalisé sur TPAB n’est finalement que la partie émergée de l’iceberg qui masque des réalisations précédentes de jolie facture. D’ailleurs, comment Terrace Martin aurait-il pu mettre les pieds sur la scène de L.A. sans une remarquée collaboration avec Snoop Dogg sur deux albums duquel il est crédité : R&G (Rhythm & Gangsta): The Masterpiece et Ego Trippin ? C’est d’ailleurs en 2010 qu’il a sorti son premier album hip-hop sobrement intitulé The Demo et qu’il a enchaîné en proposant avec Velvet Portraits son sixième album studio. Est-il besoin de préciser que l’oisiveté ne faisant pas partie de son répertoire, il a également sorti plusieurs mixtapes, EP et collaboré à de nombreux projets.
Terrace Martin – « Think Of You » feat. Kamasi Washington & Rose Gold
[soundcloud url= »https://api.soundcloud.com/tracks/252208248″ params= »color=ff5500&auto_play=false&hide_related=false&show_comments=true&show_user=true&show_reposts=false » width= »100% » height= »166″ iframe= »true » /]
Au final, dans la tendance qu’a amorcée Kendrick Lamar en réinventant son rap et en y invitant plus de jazz à la table de composition, il a aussi braqué la lumière sur les architectes de son brillant projet et offert au plus grand nombre davantage de musique et de talent avec des artistes comme Terrace Martin ou Kamasi Washigton (dont le dernier opus The Epic est acclamée par la critique jazz). Si la renommée de Terrace Martin dans l’industrie musicale n’est plus à faire, nous ne pouvions pas ne pas mentionner cet album aux relents de R&B, Soul, aux quelques touches de funk. De jazz aussi mais dans sa version la plus moderne : quand l’impro s’acoquine de claviers ou de sonorités 8 bits. Holla à Terrace Martin donc dont nous vous invitons à découvrir les projets au cours des belles soirées qui se présentent et qu’il saura tranquillement accompagner. Sauf si vous voulez dansez à tout oublier. Quoique…