Pour leurs premières sorties solos, les 9 membres officiels du Wu-Tang Clan ont tous brillé dans des univers finalement assez différents, avec comme point commun l’appui de leur chef d’orchestre RZA. A la production de la quasi-intégralité des morceaux des premiers LPs de Raekwon, Method Man, GZA, Ghostface Killah et Ol’ Dirty Bastard, l’architecte sonore du Wu est également en soutien sur les projets de Masta Killa, U-God et Inspectah Deck complétés par ses fidèles disciples (Mathematics, True Master et 4th Disciple).
Si sa présence et son aura ont porté ces albums rangés maintenant dans la catégorie des classics, les secondes sorties de ces différents membres n’ont pas tous connu le même engouement. Après la parution en 1997 du second projet Wu-Tang Forever du Clan, RZA est beaucoup moins disponible sur les secondes tentatives des 8 autres membres du crew, voire complétement absent sur la plupart. Des changements importants se sont donc fait sentir pour ces sophomore albums avec un niveau général très disparate cette fois-ci.
Sur une période s’étalant de 1998 à 2006, nous nous sommes donc lancés dans le classement des ces 9 seconds albums solos des membres du Wu, du moins emballant au meilleur. Une classification du point de vue d’un fan du Clan, qui reste bien évidemment subjective, mais qui est portée quand même par quelques arguments à découvrir ci-dessous.
Six années se sont écoulées entre cet album et le premier Golden Arms Redemption, autant dire une éternité dans un hip-hop en perpétuel évolution. Le rappeur à la voix imposante et au flow élastique n’est pas le membre du Wu le plus populaire mais ses différentes performances, notamment sur Wu-Tang Forever, ne sont pas pour autant à sous-estimer. Ce second album évolue dans une époque complétement différente de son prédécesseur avec 6 premiers morceaux produits par des producteurs Californiens, DJ Homicide et le duo The Produkt. Étonnant mais pas désagréable, le titre « Get Down » avec la légende MC Eiht, Squeak Ru et Boo Kapone en est la parfaite illustration, tout comme « Kick Azz ». Un univers qui se détache certainement beaucoup trop de son premier album sur la plupart des morceaux. De quoi perdre une majorité des fans du Wu-Tang qui ont eu toutes les peines du monde à se projeter pleinement dans ce projet de U-God. L’album suivant Dopium trouvera, lui, un juste milieu mieux maîtrisé.
Sans aucun doute la plus grosse déception de cette liste étant donné l’énorme impact qu’a eu le premier album Only Built 4 Cuban Linx… de Raekwon lors de sa sortie. Tout le monde espérait et attendait une suite qui, finalement, ne verra le jour qu’en 2009 avec l’excellent Only Built 4 Cuban Linx… Pt. II. Pour ce second projet solo, RZA est remplacé par des copycats rarement convaincants, qui sont bien loin de l’égaler, et l’absence de Ghostface est totalement inexplicable. Une direction artistique très différente donc, qui n’enlève rien au charisme du Chef au micro, mais qui embarrasse toutes ses performances souvent reléguées au second plan. Les productions ne sont clairement pas au niveau du MC et on se demande encore pourquoi il ne s’est pas entouré de noms plus connus (et surtout efficaces) qu’il n’aurait pas eu de mal à convaincre avec son statut. S’il était quasiment impossible de faire aussi bien que son premier album, il y avait certainement beaucoup mieux à faire avec cette seconde sortie à l’acronyme aussi lourdingue que le projet : I Move More Officially By Implementing Loyalty And Respect In The Youth.
Même avec un album complètement détruit dans l’inondation du studio de RZA, ceci n’a pas empêché Inspectah Deck de sortir lui aussi un premier projet référence quelques années plus tard avec Uncontrolled Substance. Une attente qui fût donc juste un peu plus longue avec un LP différent de l’original mais qui a quand même permis à Rebel INS d’obtenir une reconnaissance en solo plus que mérité. Pour son album suivant, Inspectah décide volontairement de se démarquer complètement du Wu avec un casting totalement renouvelé, où lui-même n’est pas présent à la prod. La très grande majorité des beats sont donc signés par Phantom of the Beats (Haas G) et Ayatollah pour un résultat qui peine à décoller et a surtout du mal à tenir la comparaison avec le premier opus. Un manque cruel de charme par moment, comme cette pochette aux dimensions bizarrement étriquées, peut-être à l’image de cet album… Quelques titres sortent cependant du lot comme « Vendetta », « That Nigga » ou le funky « The Stereotype », ainsi que cette collaboration « Framed » avec Kool G Rap.
C’est encore avec son alter-ego Bobby Digital que RZA sort ce qui se présente comme une suite à son fameux Bobby Digital In Stereo. Pour l’occasion, le maestro du Wu-Tang continue de faire évoluer son style dans le monde qu’il a créé pour ce caractère fictif qu’il aime décrire comme « mad ignorant, but on some next level shit ». Sur ce projet qu’il produit quasi-intégralement à l’exception de 3 titres, la palette sonore est très large permettant une nouvelle fois au producteur d’étaler toute sa sensibilité musicale. Les meilleures incarnations de ce travail sont certainement des morceaux comme « Brooklyn Babies » (dont le tempo ne cesse de varier au fil des mesures), « Do U », « Shady », « Bong Bong » ou encore « Sickness », tous très différents au final. Même sentiment pour les « Must Be Bobby » et le dansant « La Rhumba » produits respectivement par Mathematics et True Master, et à classer également dans les très bons moments de ce LP. Une suite logique, imparfaite mais pertinente, qui au fil des années vieillit finalement très bien !
Pour GZA aussi la tâche était quasiment impossible après son mythique Liquid Swords. Et pourtant, même avec un RZA très discret à la production (seulement un titre), le lyriciste frappe une nouvelle fois avec son flow particulier où chaque rime est un coup d’épée à notre intellect. Chirurgical et cérébral, l’un des rappeurs les plus habiles du Clan nous offre des sorties marquantes dont l’enchaînement des titres « Crash Your Crew », « Breaker, Breaker », « High Price, Small Reward » et « Hip Hop Fury » est le sommet de cet album. Produit en grande partie par Mathematics et Arabian Knight qui se partagent 10 morceaux, Beneath The Surface est l’évolution normale d’un Genius qui n’a pas perdu son niveau, loin de là, capable de s’égarer un peu sur « Victim » pour se rattraper immédiatement avec le très bon « Publicity » (suite indirecte de son morceau « Labels »).
C’est dans une atmosphère pré-apocalyptique hâtée par le passage à l’an 2000 et sur fond d’attente interminable, que Method Man sort enfin cet album tant désiré par la nation Wu. Le MC le plus emblématique du Clan se sait attendu au tournant et c’est donc aux côtés de RZA qu’il décide d’offrir une suite sérieuse pour consolider sa réputation. Ce LP affiche une imposante tracklist de 28 pistes parmi lesquelles une dizaine d’interludes qui, il faut bien le dire, ont tendance à alourdir un peu le tout, avec des guests très différents allant de Chris Rock à Janet Jackson ou encore Donald Trump… Entouré par un casting solide de producteurs répondant au cahier des charges dicté par RZA, on retrouve des beats ciselés de True Master, 4h Disciple, Mathematics, Inspectah Deck, Erick Sermon et Havoc. Si tout n’est pas parfait, les quelques longueurs et tentatives peu convaincantes ne permettent pas toutefois à cet album de tomber dans la médiocrité, car Method Man est toujours beaucoup trop bon dans ce qu’il fait. Sa présence, sa voix et son approche stylistique suffisent à porter la plupart des morceaux dont les grands moments se nomment « Perfect World », « Torture », « Step By Step » et le grand final « Judgement Day ».
S’il y a bien un membre du Wu-Tang qui peut tout se permettre, c’est bien ODB. Dès le début de sa carrière, le rappeur a cultivé un éclectisme assumé qui en a fait un personnage aussi fantasque qu’attachant. Pas étonnant donc de voir que la première partie de ce projet bousculent toutes les habitudes avec des productions des Neptunes et d’Irv Gotti. Que ce soit sur « I Can’t Wait » ou le single « Got Your Money », l’artiste atypique ne perd pas de temps pour se lancer dans des performances vocales dont lui seul a le secret. Tantôt Rick James sur « Cold Blooded », tantôt Billie Holiday sur « Good Morning Heartache », Ol’ Dirty Bastard semble s’amuser à nous surprendre avec des provocations sans véritables limites. Électron libre dans un monde qu’il aime décrypter à sa propre façon, sa vision particulière survole des titres singuliers comme « Rollin’ Wit You » et l’exubérant « I Want Pussy ». La seconde partie de ce projet produite par RZA, Buddha Monk et True Master, et incarnée par le sublime « All In Together Now », est plus fidèle à sa première sortie et au final équilibre le tout. Divertissant, scandaleux, honnête et parano, cet album est un vrai plaisir coupable à prendre comme il est.
Il a fallu patienter jusqu’en 2004 pour que Masta Killa livre enfin son premier album avec No Said Date. Une attente interminable récompensée par un projet qui frôle le sans-faute et dont la sortie suivante va épouser les fondamentaux. Avec Made In Brooklyn, l’un des rappeurs les plus sous-estimé du Wu va reprendre exactement là où son classic s’était arrêté. La sélection de beats est phénoménale, à en oublier presque que RZA n’est pas du tout impliqué dans ce projet, et tous les morceaux s’enchainent donc parfaitement dans une ambiance qui transpire les rues de Brooklyn. L’ensemble du Wu-Tang répond présent en featuring et dans le premier titre « Then & Now » on retrouve même au micro les fistons de GZA (Kareem Justice), RZA (Young Prince) et Masta (Shamel Irief) pour un clin d’œil intergénérationnel symbolique. MK brille en solo dans un style posé mais précis mis en lumière par des prods de MF Doom, Jig Sor, Pete Rock et Bronze Nazareth sur les excellents « E.N.Y. House », « Pass The Bone (Remix) », « Older Gods Part 2 » et « Ringing Bells ». Tout est bon à prendre dans les 50 minutes qui composent cet album de la part d’un Masta Killa qui incarne vraiment la force sereine du Clan.
Et si Ghostface Killah et RZA (tous les deux producteurs exécutifs de ce projet) avaient trouvé la recette parfaite pour un second album d’un membre du Wu ? Vraiment différent du précédent, les deux artistes ont pourtant gardé les points essentiels d’Ironman pour y apporter une nouvelle touche déjà très ancrée dans les années 2000. L’approche sonore et thématique renouvelée, c’est quasiment un tout nouveau GFK qu’on découvre sur des titres distincts comme par exemple « Nutmeg », « Child’s Play » et le single envoûtant « Cherchez La Ghost ». Une bonne partie du Clan est également réquisitionné sur des morceaux comme « Buck 50 », « Apollo Kids », « The Grain » ou « Wu Banga 101 » pour apporter cette symbolique du groupe si importante aux fans du Wu. Au final, en plus d’être l’album le plus complet de cette liste, Supreme Clientele est tout simplement l’un des meilleurs opus qu’ait sorti un membre du Wu-Tang.
Au final, et pour résumer ce classement, on identifie trois grandes catégories allant de l’excellent (GFK, MK) à la déception (INS, Rae, U-God), avec au milieu de bons albums d’ODB, Meth, GZA et RZA qui n’arrivent cependant pas au niveau de leurs prédécesseurs. Une classification qui, en définitive et d’une certaine façon, mesure donc l’écart entre ces premiers et seconds albums solos des différents membres du Wu.
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