BACKPACKERZ

Pour ceux qui connaissent déjà Josman, on n’observera pas de rupture avec les précédents projets mais une juste continuité et une nette progression qui se traduit par la cohérence de l’ensemble des tracks, tout en relevant le défi d’être très éclectique musicalement. On notera également davantage de profondeur dans l’écriture… Je vous vois lever les yeux de perplexité sur ce dernier point mais j’y reviendrai.

J.O.$, stylisé à la manière d’un Joey Bada$$, annonce d’emblée la teinte ricaine qu’on retrouve aussi bien sur le fond que sur la forme. Pour le fond, il s’agit des thèmes abordés qui font penser à bon nombre de rappeurs d’outre-Atlantique dont les aspirations s’articulent souvent autour du célèbre tryptique : argent, sexe, drogue. Pour la forme, elle est indéniable sur le plan musical que ce soit dans le flow ou les prods.

A ce propos, on ne change pas une équipe qui gagne puisque la partie production est encore et toujours faite maison via Choke Industry. Eazy Dew réalise la quasi-totalité des morceaux à l’exception de « Fais avec » et « J’aime bien! », produits par Josman lui-même, et le titre d’intro « Fucked up 3 » réalisé par Stu. L’instrumental est excellent du début à la fin avec l’envie de bouger la tête à chaque track, on serait presque sur un album de bangers ma foi.

Cette fidélité de l’équipe, on la retrouve également sur la réalisation des clips de « L’occasion », « Sourcils froncés » et « LOTO » supervisés par Marius Gonzales qui est, d’ailleurs, également originaire de Vierzon. On y retrouve ainsi tout un univers visuel qui dépeint, de toute évidence, le quotidien de Josman entre vie au quartier et soirées enfumées où se faufile le spectre d’Eazy Dew au travers de furtives apparitions.

Seul le clip de « WOW », qui relate ses expériences de drague en boite de nuit, est produit par Hector Albouker. Ce dernier est particulièrement soigné sur le plan esthétique avec une ambiance rétro accentuée par un format de vidéo 4/3 et une qualité d’image volontairement dégradée.

Au niveau des thèmes, on est encore et toujours sur l’argent, la weed et les meufs… Cela tourne souvent à l’obsession au risque de parfois tourner en rond ! Néanmoins, à force d’écoutes, on décèle cette fois-ci une facette moins juvénile, beaucoup plus subtile du personnage et ce grâce à la meilleure finition du projet.

Même l’ordre des tracks est choisi avec soin puisqu’on ressent vraiment la progression entre les premiers morceaux très en ambiance et la fin beaucoup plus sombre et intime. En revanche, ce qui ne change pas, c’est la capacité de Josman à varier son flow avec une aisance déconcertante… Tantôt en kickage tantôt plus en mélodie, la voix apprivoise chaque track avec des lyrics percutants tout en allitération et assonance.

Si la maîtrise parfaite de titres plus electro comme « Sourcils Froncés » ou autotuné comme « DLvrai » sont à saluer, on appréciera également l’adresse de l’éloquence sur des prods beaucoup plus boom-bap comme « L’occasion ». Il en profite d’ailleurs pour glisser un hommage à Booba.

J’avais rien et j’voulais tout, j’rêvais d’avoir des couilles en or
Et j’m’endormais sur du Temps Mort

Il serait également dommage de passer à côté du percutant « V&V », du très sombre « Jeune N**** » et de « La plaie » qui vient conclure le tout sur une note d’espoir. On est en revanche moins fan des titres « J’aime Bien! » ou « XS », qui restent malgré tout efficaces et sauront probablement trouver leur public.

Quoiqu’il en soit, Josman a mûri et ça se voit à travers ce premier album qui mérite clairement sa place dans le classement des meilleurs albums français de l’année. Ce dernier a réussi le pari de livrer quelque chose de profondément underground, sans featuring, mais qui plaira à un public plus large. On vous invite d’ailleurs à vite prendre vos places de concert pour sa tournée car c’est un album énergique qui prendra tout son sens en live !