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Edo.G – After All These Years

After All These Years, c’est le dernier album studio d’Edo.G. Après toutes ces années, le emcee de Boston est toujours dans la place. C’est avec un peu de méfiance que nous appréhendons les nouveaux albums des cadors du rap des années 90. Cette méfiance n’est qu’à demi justifiée à l’écoute de ce dernier. After All These Years est classique dans la forme et ne déstabilisera pas ses fans. Edo.G a fait ce que l’on attendait de lui. Ni plus, ni moins.

Fort de sa réputation de vétéran, Edo.G a su bien s’entourer pour la réalisation de ce qui est déjà son douzième album. On remarque la présence dans le line-up de quelques autres grands noms du Hip-Hop à l’ancienne: Chuck D (Public Enemy), Camp Lo ou encore Pete Rock. Le « Creator » a produit 3 morceaux de After All These Years, dont le fameux « 2 Turntables & A Mic » que nous vous avions présenté l’année dernière. Cela dit Edo.G n’a pas limité le casting à la vieille garde du rap. Il a notamment invité 9th Wonder à la prod, qui n’est que de 5 ans son cadet mais qui a su s’imposer comme l’un des meilleurs producteurs du Hip-Hop post-2000. Au mic, on retrouve également Guilty Simpson, l’habitué de chez Stones Throw et King Magnetic de Army Of The Pharaohs. L’enjeu quand on mélange plusieurs générations de rappeurs sur un même disque est de produire un ensemble cohérent. Et à ce niveau là, l’album est plutôt une réussite.

Malheureusement dans le rap comme dans le basket, sélectionner une équipe « all-star » n’est pas la clé du succès. On ne compte plus le nombre de disques qui, bien que rassemblant la fine fleur des emcees ou des producteurs, laissent un amer goût de déception. Un peu comme s’ils avaient peur de tout donner. Le seul à atteindre le niveau que l’on était en droit d’attendre sur cet album est Pete Rock. Les trois morceaux qu’il a produit sont des temps forts de After All These Years. « 2 Turntables & A Mic » est le titre qui ouvre l’album. Il y a quelque chose de « Preemo » dans l’instru de PR. La thématique est classique, Edo.G clame son authenticité et sa légitimité dans le game. Ma préférence va à la chanson « Make Music ». Le beat rappelle les meilleures heures de Center Of Attention. Là aussi, on a affaire à une déclaration d’amour au Hip-Hop. Le chant dans les refrains c’est toujours un peu risqué, mais sur cette chanson cela apporte une touche positive. La troisième et dernière contribution du « Creator » peut s’entendre sur « Let The Horns Blow ». Dans un style soul très classique, il fait cadeau à Edo.G d’une instru efficace et de bon goût. La présence d’un solo de saxophone vient briser le caractère trop répétitif que l’on peut parfois reprocher au rap.

Dans l’ensemble, les beats qui apparaissent sur After All These Years sont plutôt bien foutus. Même si certains pèchent par manque d’originalité (« Listen » est construit sur le même sample que l’inoubliable « 95 ‘Til Infinity » de Joey Bada$$), on se surprend à bouger compulsivement la tête tout au long du disque. La fragilité de l’album est à chercher plutôt du côté des emcees. Il faut bien le reconnaitre, l’ensemble est un peu fade. Le premier visé est Edo.G lui-même. Je dois avouer ne jamais avoir été transporté par son flow. Même à la grande époque j’ai toujours apprécié ses disques pour les instrus. Une des rares chansons où il m’avait convaincu était « I Got To Have It » avec Da Bulldogs en 1991. C’est bien dommage car Edward Anderson a un talent indéniable pour l’écriture. Il ne fait pas dans le rap conscient mais plutôt dans l’égotrip léger et la nostalgie du « boom-bap ». À travers les 12 titres de After All These Years, le plus digne représentant du rap de Boston nous livre sa vision relativement désenchantée du Hip-Hop en 2014. Edo.G relève néanmoins la tête sur « The Beef Goes On », un des meilleurs morceaux de cet opus. Ses potes Slaine et Jaysaun de Special Teamz l’accompagnent à la prod et au micro pour un « banger » très dynamique et actuel. Comme quoi, l’ancien Bulldog n’a peut-être pas dit son dernier mot.

« I spit quality / It’s a commodity / Chronologically, with no apology / My philosophy, possibly / Bitch niggaz gossip me / Can’t stand the speed or voracity. » (« Make Music »)

Vous l’aurez compris, After All These Years n’est certainement pas l’album de l’année, mais il nous rappelle que les vétérans du rap sont toujours là pour influencer la jeune génération. Issu d’une espèce en voie d’extinction, Edo.G livre un disque bourré de qualités. La production est particulièrement bien travaillée mais on aurait aimé voir les emcees affirmer un peu plus leur présence. Difficile de ne pas regretter le manque de conviction et d’implication de cette équipe 5 étoiles.

Ed Pays

Envoyé spécial à Bordeaux. Spécialiste du rap de vieux, qui passe son temps à débattre de l'autotune. La dernière fois qu'il a écouté PNL, on l'a retrouvé en PLS.

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