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Domo Genesis – Genesis

Ironie de l’histoire, il aura fallu la dissolution d’Odd Future pour que l’un de ses esthètes sorte son premier album solo. Avec Genesis, Dominique Marquis Cole aka Domo Genesis nous dévoile son premier album studio. Cet opus a des choses à revendiquer. Exégèse pour les curieux.

C’est donc sur les cendres du collectif qui a vu émerger tant de talents que Domo Genesis, membre indiscutable de l’aventure depuis 2010, a ressenti le besoin de prendre son envol, avant que l’incendie du nid ne le consume lui aussi. L’homme est loin d’être un inconnu et il y’a fort à parier que les backpackerz © attentifs aient déjà eu l’occasion d’apprécier son talent à plusieurs reprises. Qu’il ait officié en solo ou au sein du groupe MellowHigh, lui-même brandé Odd Future, Domo Genesis a fréquenté les plus grands talents du hip-hop actuel. Pour preuve, sa discographie est émaillée de featurings de grande qualité, et son dernier opus ne dément pas ce propos. On y retrouve notamment la présence de Tyler, The Creator, Mac Miller ou le fulgurant Anderson .Paak (entre autres Wiz Khalifa ou Juicy J). Bref, il n’y avait aucune raison que l’homme de l’ombre, lorsqu’il a décidé de passer de l’autre côté du rideau, ne soit pas soutenu par ses compères de longue date. L’opus s’en ressent et l’équipe de production est aussi de haute volée. Parmi les signataires, on peut citer Cam’Obi (pensionnaire de la J.U.S.T.I.C.E League), SAP, le duo Christian Rich ou Sha Money XL.

En quelques mots, voilà ce que la pochette de l’album révèle de cet opus. À l’écoute, le projet tient la route. Musicalement, il n’y a pas d’erreur. On navigue entre des morceaux aux résonances clairement jazzy (« One Below »), des morceaux au boombap effcaces et sans fioriture et même des tracks aux envolées plus soul et funky comme « Faded inThe Moment » ou encore « Dapper ».

Domo Genesis – « Faded in the Moment » feat. Cam’Obi

Les textes sont bien écrits et le flow est travaillé quoiqu’un peu pâle lorsqu’il côtoie des bêtes de scène comme Paak ou qu’il a du mal à tuer le père avec Tyler, The Creator sur « Go (Gas) ». Mais c’est surtout au niveau des lyrics que l’album est surprenant. Il y a de l’Oedipe dans cette affaire et sans s’embourber dans des analyses freudiennes mal maîtrisées, disons que la mort symbolique du père a dû précipiter l’émancipation du fils. Ajoutons que la mère a encouragé son poulain dans cette entreprise (dont témoigne « One Below ») et que malgré sa connaissance de l’industrie musicale, l’artiste est encore tiraillé par un doute personnel rarement aussi clairement exposé voire assumé. On comprend alors que le titre de l’album est un effet miroir:  il fait référence aux débuts de l’homme et il affirme que ce projet marque le point de départ de son émancipation artistique. Sur des morceaux introspectifs comme « Questions »,  « My Own » ou « Awkward Groove », le doute qui s’insinue en l’homme trouve sa place dans les lyrics de l’artiste. Les productions ont d’ailleurs des accents plus jazzy comme pour marquer la mélancolie et la volatilité des idées qui le tiraillent.

Si un morceau devait symboliser la démarche artistique de cet opus, notre choix irait à « Wanderer » sur lequel la production audacieuse tire sur un tempo lent et une boucle de piano aux notes légères qui assure la mélodie du morceau. Les lyrics sont à l’image de cette attitude introspective très présente sur l’album. Domo Genesis y décrit les nuits où, à peine endormi, il se réveille pris de doutes et d’interrogations. Notons par ailleurs que les fans de Homeboy Sandman que la boucle de piano a déjà accompagné ses « Problems » sur le LP Hallways.

Domo Genesis – « Wanderer » 

Au final, Domo Genesis propose un premier opus de belle qualité: des productions bien senties et des textes soignés, franchement bien écrits. Le bémol porte plus sur le message général adressé à l’auditeur tant les doutes de l’artiste sur sa propre capacité à émerger orientent son discours. En soit, la démarche n’est pas gênante, surtout qu’on pourrait y voir une marque d’humilité rare dans le rap game. Ce qui gêne, c’est l’impression de première chance que dégagent les lyrics. Tout ne sonne pas juste et c’est dommage. Disons que cet opus avait tout pour emballer l’auditeur : des producteurs aguerris et dévoués, des MC dont la renommée n’est plus à faire et un talent à la plume dont peu peuvent se targuer. S’il serait cruel de parler de déception, on était en droit d’attendre autre chose d’un rappeur dont les qualités ne sont plus à démontrer et qui inondent les ondes depuis quelques années. L’album est pourtant globalement bon. Écoutez et vous verrez.

Clément Nadjo

Le hip-hop comme oxygène. La patience du digger, le pardon de l'amoureux. Amateur de bons mots, de belles rimes et de beats calibrés. Humour à qualité variable.

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