Blu – Good To Be Home

Mai 2014

Blu

Good To Be Home

Note :

Blu (a.k.a. Johnson Barnes), rappeur californien âgé de 31 ans a su se construire au fil des dix dernières années une solide réputation dans le milieu du rap underground. Cette réputation n’est certainement pas usurpée, il suffit de jeter un rapide coup d’oeil à sa discographie déjà longue: à peine moins de dix albums en dix ans de carrière. Blu a su mettre au point et peaufiner sa recette, du Hip-Hop à la cool, à base de samples de jazz et de flow sans agressivité. Rien d’original me direz-vous, mais le californien y a mis tout son talent et a enfanté – seul ou accompagné d’artistes comme Exile ou Sene – d’une poignée d’excellents albums et mixtapes: Below The Heavens, A Day Late & A Dollar Short, Give Me My Flowers While I Can Still Smell Them… Mais Blu a donné le meilleur de lui-même en 2013 sur No York!, son plus franc succès auprès de la critique ET du public.  No York! était aussi son dernier album studio en date. Il s’était entouré pour la prod des meilleurs beatmakers de la sphère Abstract Hip-Hop (Flying Lotus, Daedelus, Samyam, Knx…) ce qui avait contribué à grandement moderniser sa musique. Les featurings étaient nombreux et pertinents. Bref, une réussite. Chez The BackPackerz on attendait donc beaucoup de Good To Be Home, le nouvel opus de Blu.

Bombay, sur les pas de Madlib

BluDepuis sa sortie de 19 mai, j’ai eu le temps de bien écouter l’album, et ce n’est pas une mince affaire. Pas moins de 21 titres, dont un seul est un interlude. Par sa durée, Good To Be Home est donc difficile à écouter en une seul fois. À la première écoute, on reconnait la patte « old school » de la musique de Blu. L’ensemble de la prod a été assurée par Bombay, et on constate un retour à l’esthétique enfumée des débuts de sa carrière. Les amateurs d’instrus lo-fi riches en samples pompés sur des vieilles pépites jazz et soul seront donc ravis. On pense très rapidement à Madlib, et les mauvaises langues crieront au plagiat. Malheureusement, à quelques rares exceptions (« The West », « Dre Day », « Child Support »), Bombay ne parvient pas à se hisser au niveau du Beat Konducta.  Il est difficile de trancher sur le bien-fondé d’un tel retour en arrière dans la production instrumentale, tout est question de goût. Pour ma part je regrette l’aspect « computer funk » de No York!.

The Sunshine State

Le propos de Blu est très bien résumé dans le titre de l’album : Good To Be Home. « Home », c’est Los Angeles et la Californie. La fierté de son origine « west coast » est le thème récurrent dans la plupart des chansons. Malgré sa renommée, il n’oublie pas d’où il vient, ni ceux qui l’ont soutenu.

« Live from the 53-0, from out the weed smoke and henny we pour / I emerge for all my people who ain’t never seen the world like me / Still ain’t forgot where I’m from, but now we back like the Prodigal son, I’m home. »

Ses goûts musicaux en revanche ne sont pas bornés au rap « west coast ». Blu cite par exemple LL Cool J, Skee-Lo, et même DJ Jazzy Jeff & The Fresh Prince. La chanson « Summertime » est une reprise moins sage de la très célèbre chanson du même nom sortie en 1991.

« They turn around and see what we peepin at / That all natural type of aphrodisiac / We leavin at noon, the drinks was consumed, we all buzzed / But back then we ain’t really know what it was. »

Son hommage le plus appuyé est celui rendu à Dr. Dre dans « Dre Day », un des meilleurs titres de l’album. Ce n’est pas seulement un clin d’oeil au mythique producteur. Blu y dénigre de manière assez classique les opportunistes du « rap game » qui font de la musique seulement pour la gloire et l’argent, au détriment d’un rap plus conscient. Good To Be Home regorge de featurings bienvenus dans un album aussi long. Je ne les citerai pas tous, mais on trouve notamment Prodigy, Casey Veggies, Oh No, Evidence… Pour moi la bonne surprise dans cette longue liste d’invités est 2Mex, qui envoie un excellent couplet sur le titre caché « Angel Dust ».

« Angel dust ain’t strange to us / Things that are dangerous are within range for us / Hollywood Park, watching the dealers bust / Hollywood Boulevard where tweakers cuss with crust in their eyes. »

Les textes de Blu, tout en n’offrant rien de révolutionnaire, restent bien écrits et c’est un très bon point. Ça aurait pu être parfait avec des instrus un peu plus abouties, moins saturées en samples. Ce nouvel album de Blu est bon, ne boudons pas notre plaisir. Mais on aurait aimé quelque chose d’un peu plus personnel, et on sait aussi que Blu est capable de prendre des risques artistiques. Alors que No York! était en avance sur son temps, Good To Be Home donne un peu le sentiment d’arriver après la bataille.

Good To Be Home est disponible en : Digital | CD | Cassette