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Kendrick Lamar & TDE – Black Panther: The Album

Alors que le film estampillé Marvel fait un carton dans les salles obscures, Black Panther: The Album, sa bande originale cornaquée par Kendrick Lamar et tout le label TDE prend aussi les charts d’assaut. Attention succès !

Les bandes originales de films basées sur du rap ne sont pas toujours de bonnes idées. Heureusement, il y a eu des exceptions, et des belles, comme Taxi, Ma 6-T va Cracker ou encore La Haine en France ou 8 Miles et Compton de Dr. Dre aux Etats-Unis. A noter qu’à chaque fois il s’agissait de films qui se situaient dans la mouvance hip-hop et qu’on n’était pas dans la BO pure mais dans un mélange de bande originale et de musiques inspirées par le film.

Mais c’est sans doute la première fois que la BO d’un blockbuster, qui plus est d’une production Marvel, était confiée à des rappeurs. Si la société de production cinématographique a pris un risque en le faisant disons qu’il a été plus que calculé puisqu’elle a été confiée au label Top Dawg Entertainment qui compte dans ses rangs la superstar urbaine du moment, celui qui transforme en or tout ce qu’il touche, Kendrick Lamar. D’ailleurs, pour être certain qu’on a bien compris le concept, le Californien pose son flow ou fait une apparition sous une forme ou sous une autre sur 11 des 14 titres du disque.

Une certaine cohérence

Black Panther: The Album est autant une BO qu’un opus qui regroupe des musiques inspirées du film, et on trouve une cohérence entre l’œuvre fixée sur pellicule et celle sur CD. Le long-métrage raconte l’histoire d’un super-héros noir pour la première fois dans l’histoire du cinéma et la majorité des acteurs du film sont noirs. Sans tomber dans la blaxploitation, on est quand même dans quelque chose de quasi révolutionnaire pour un projet aussi important qu’un blockbuster Marvel. Il paraissait alors logique de pousser le concept jusqu’au bout en confiant la bande-son à des artistes noirs, surtout s’ils sont en pleine bourre comme peut l’être Kendrick Lamar en ce moment.

Aujourd’hui, on chronique Black Panther : The Album alors qu’aucun d’entre nous n’est capable de citer ne serait-ce qu’un chanteur qui serait intervenu sur la BO d’un précédent film Marvel. Si la BO ne fait pas le succès d’un film, nul doute qu’elle y contribue sans doute un peu. Alors les producteurs de Black Panther ont pris un risque calculé et ont placé le projet entre les mains de TDE et de son patron Anthony Tiffith lequel a mis tous ses artistes à contribution : Kendrick Lamar évidemment, mais aussi SZA, ScHoolboy Q, Jay Rock ou encore Ab-Soul

Tous ont joué le jeu, mais n’ont pas dénaturé leur rap pour rentrer dans un quelconque moule qui aurait pu leur être imposé par le film. Surtout, ils ne se sont pas contentés de rester entre eux et ont invité d’autres complices musicaux, certains habituels et d’autres plus surprenants comme The Weeknd, Vince Staples2 Chainz, Future, James Blake, Swae Lee, Travi$ Scott, Jorja Smith, Zacari, Khalid, Yugen Blakrok ou Anderson .Paak… pour des collaborations aussi enrichissantes qu’étonnantes. Chacun des artistes cités, à sa façon et avec sa propre personnalité, apporte une touche d’originalité folle et une diversité impressionnante qui, loin de nuire à l’ensemble, offre au disque une vitalité incroyable.

Des liens entre images et sons

On l’a dit, si Black Panther: The Album n’est pas une BO stricto sensu, les références au film ne manquent pas. On y trouve des artistes africains, des instruments venus du même continent ou des chants zoulous qui rappellent la terre d’origine du héros du film. Il y a aussi des titres comme Black Panther où Kendrick Lamar se met à la place du héros. Là aussi, il y a une certaine logique si on y réfléchit bien : les thèmes de l’identité, de la spiritualité, de la dynamique du pouvoir, du doute, du fardeau de la célébrité, l’afro-centrisme, la conscience sociale et politique sont des sujets communs tant au film qu’au disque. Mais ce n’est pas tout.

La diversité des invités et leur originalité évitent l’uniformité qu’un tel format aurait pu laisser craindre. Donc, comme dans tout bon film, le soundtrack mélange les sentiments : romance, militantisme, biographie, saleté, hypnotisme, chaleur, espoir… Même Kendrick qu’on a l’impression de retrouver un peu partout sait s’adapter à chaque morceau sur lequel il intervient. Il est celui qui met du lien et du liant afin que le projet garde une cohérence évidente et ne parte pas dans tous les sens. Sa simple présence en fait aussi beaucoup plus qu’une simple BO, un événement rapologique tant ce qu’il touche en ce moment se transforme en or.

D’ailleurs Black Panther: The Album n’a pas échappé à la règle puisqu’il a pris la tête du classement Billboard la semaine de sa sortie. Diversifié et audacieux, alternant les très beaux titres et les hits, les morceaux pop friendly et les ballades, le disque laisse à penser que Kung Fu Kenny en personne a été chargé de ramener le rap dans le royaume de Wakanda. Pour cela, il a pris ce qu’il existe de meilleur pour en faire un mix puissant et intéressant comme une sorte d’introduction fantastique à une musique qu’il voudrait faire découvrir à des néophytes. Néophytes ou pas, on est conquis !

Kendrick Lamar & TDE – Black Panther: The Album

Grégory Curot

Passionné de rap français depuis 1990, il a été journaliste à RER, RAP MAG et Daymolition. Il a vu l’envers du décor et vécu des choses folles avec ses idoles.

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