2012, ma première année au lycée, l’époque où je téléchargeais une tonne d’album sur mon vieux Sony Xperia. Dont un qui m’a beaucoup marqué : Finally Famous de Big Sean. Je m’en souviens comme si c’était hier… Je me revois marcher jusqu’à la gare, en cassant la démarche pour me donner un style « Cain-ri » (je le fais toujours). Tout cela en écoutant des morceaux comme « My Last », « High » ou encore « Wait for Me ». Autant vous dire que cette chronique me tient beaucoup à cœur !
Au fil des projets, Big Sean n’a cessé de prouver qu’il était un artiste sur lequel il fallait compter. De Finally Famous, à Hall of Fame, en passant par Dark Sky Paradise et I Decided. Tous deux récompensés respectivement d’un double disque et d’un disque de platine. Mais aussi un EP en collaboration avec Jhené Aiko en 2016, et le projet commun avec Metro Boomin Double Or Nothing fin 2017. Sean Don en presque 10 ans, a exploré de nombreux styles et s’est affirmé comme un artiste accompli. Sa carrière est riche en réussite, bien que tachée par des zones d’ombres entre rumeurs de clash, une vie sentimentale tourmentée et médiatisée, et de problèmes de santé mentale.
Detroit 2 semblent être pour Big Sean l’occasion de revenir à ses racines. Des racines qui ont fait de lui l’homme qu’il est, mais aussi l’homme qu’il aspire à devenir.
Detroit to me is home, But I feel like, It’s more than just a City, It’s a real mentality.
Detroit 2 est donc un hommage direct à cette ville qui a vu grandir Sean Anderson. Cette relation si étroite entre l’artiste et sa ville dégage beaucoup de poésie. Sean cherche à mettre en lumière l’âme de Détroit qui dégage une énergie si particulière. Elle se manifeste notamment sur l’artwork de l’album. On y voit Sean dans Detroit, avec au dessus de lui quatre percussionnistes de rue, qu’il a qualifié lui-même comme étant ces « anges-gardiens ». Detroit semble être pour Sean un lieu où il se sent protégé, loin des fastes de célébrités.
Detroit n’est manifestement pas une ville comme les autres ! En témoigne les interludes du comédien Dave Chapelle, de la chanteuse Erykah Badu et de la légende Stevie Wonder. Il est magnifique d’entendre les différents points de vues, les différentes histoires de ces personnalités à Detroit, surtout celle de Stevie Wonder que j’ai trouvé très émouvante. Ces petits moments de flottements dans l’album permettent de faire transparaître cette âme, si singulière dont est pourvu Détroit, mais aussi de donner de la cohérence à l’album.
Souvent mise dans l’ombre, Detroit est une véritable terre de rap. Et c’est ce que Big Sean s’acharne à nous rappeler tout au long du projet. Le morceau « Friday Night Cypher » en est la parfaite illustration. Il réunit pas moins de 11 artistes, avec des New Comers et des artistes déjà installés. 9 minutes de rap, sur 6 instrumentales, avec des artistes tous différents. Mais tous sont animés par la même fougue et le talent brut qui les caractérisent. J’ai beaucoup apprécié ces exercices de style,
les enchaînements des instrumentales et des artistes, que j’ai trouvé très fluides.
L’énergie de Tee Grizley et de Kash Doll, le flow de Payroll Giovanni et de Boldy James, la technique de Big Sean et de Royce, les 11 artistes excellent dans leurs couplets, amenant beaucoup de variétés au cypher.
Jhené Aiko, Young Thug, Ty Dolla Sign pour ne citer qu’eux, Sean Don s’est appuyé sur des valeurs sûres. Dont Post Malone, pour un de mes morceaux préférés du projet, « Wolves ». Big Sean utilise la métaphore de la meute de loup pour parler famille et loyauté. Tout cela accompagné par les mélodies de Post Malone. A écouter le soir en voiture.
L’album compte beaucoup de collaborations, mais on distingue toujours l’identité Big Sean et celle de Hit-Boy, producteur exécutif de l’album.
Après 10 ans de carrière, Big Sean veut montrer qu’il a toujours faim de rap. L’album Detroit 2 s’ouvre avec « Why would I Stop » : rap offensif, punchlines aiguisées, Sean Don n’a rien perdu de sa superbe. Tel un lion régnant sur son territoire, Sean a gardé le même instinct animal et la même motivation dans son travail, et ce malgré les critiques. En témoigne également l’excellent morceau « Don Life », qui sample « Human Nature » de Michael Jackson, en featuring avec Lil Wayne et la voix de Meek Mill. Weezy qui d’ailleurs à sûrement mis le feu à la cabine d’enregistrement après son couplet digne de l’époque CARTER IV. Une décennie dans le jeu et des succès à foison, dont 3 disques de platines, et Don n’a pas peur de les revendiquer. C’est le thème du morceau « Respect It » avec Young Thug, sur des sonorités trap, et une très bonne connivence entre Big Sean et un Thugga’ des grands jours.
Big Sean est aussi capable de nous offrir de véritables moments de poésie. En témoigne l’émouvant « Everything that’s Missing », agrémenté des harmonies de Dwele où il nous parle de ses années dans le rap jeu avec beaucoup d’humilité et un certain sens de la formule.
Au delà de l’hommage rendu à la ville, Detroit 2 semble être un sanctuaire où Sean n’hésite pas à se livrer sur ses expériences de vie et de carrière. Un exutoire pour un homme qui a surmonté énormément d’épreuve. Comme le fait d’avoir été diagnostiqué d’une maladie au cœur à l’âge de 19 ans.
Tout au long de cet album, Big Sean multiplie les morceaux introspectifs. « Deep Reverence » en est une bonne illustration, avec l’appui du regretté Nipsey Hussle.
Dans ce track, Big Sean revient sur ses rumeurs de beef avec Kendrick Lamar, et comment le décès prématuré de Nipsey Hussle l’a poussé à appeler K.Dot pour dissiper le malentendu. Big Sean revient aussi sur sa santé mentale, et sur la manière dont la méditation l’a aidé à faire face à l’anxiété et la dépression, tout cela grâce à la méditation.
Au travers de cette psychanalyse que Sean s’applique a lui-même, il aborde donc cet aspect essentiel à sa vie. C’est le thème du single « ZTFO », que j’ai d’ailleurs beaucoup apprécié pour le contre-coup de faire un son trap , avec les Ad-libs de Travis Scott, sur le sujet de la méditation. Big Sean, après plusieurs années de carrière, cherche ainsi à inspirer sa communauté et à apporter de la positivité. A l’image du grand frère qui veut conseiller son petit frère, c’est dans cette optique
que Don clôture son album de la meilleure des façon avec « Still I Rise », en featuring avec Dom Kennedy.
Entre confession et remise en question, Sean cherche à exorciser son passé et faire un bilan pour ne plus avoir à regarder derrière lui. Sean apparaît comme désormais un homme en paix avec lui-même après un long combat contre ces chimères. Cet aspect de la personnalité de l’artiste apporte beaucoup d’authenticité au projet, et permet de s’identifier à l’artiste, mais aussi à l’être humain.
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