HDBeenDope : dope since 1994
À tout juste la vingtaine, HDBeenDope jouit déjà d’une belle réputation sur la scène Hip-Hop new-yorkaise. C’est son projet Stepping Into Tomorrow qui le place l’an dernier dans la lumière des projecteurs. Faisant écho aux petites bombes lyricales « Rhymin’ », « Boomerang » et « Aladeen », la mixtape préfigure déjà l’énorme potentiel de l’artiste.
Depuis, le gamin a vu du pays et l’onde de choc a dépassé New York pour frapper l’autre côté de l’atlantique. Après un passage remarqué au Dooinit Festival, c’est juste avant son concert à l’International que le kid de Brooklyn nous a donné rendez-vous. Fidèle à la grosse pomme, HD rend hommage au son boom-bab des nineties, tout en y infusant des sonorités plus modernes, en phase en avec l’air du temps. Rencontre avec un minot à la tête bien faite, qui ose prendre le temps de réfléchir.
The BackPackerz : HD, peux-tu te présenter aux backpackerz qui ne te connaissent pas encore ?
HDBeenDope : Mon nom est HDBeenDope. Je rappe depuis que j’ai neuf ans, j’ai commencé à prendre le rap au sérieux vers quatorze ans, et à seize ans, j’ai commencé à poster ma musique sur internet. Depuis, ça n’a cessé de prendre de l’ampleur.
D’où vient ton nom de scène ?
J’ai commencé à produire vers treize ans, sous le pseudonyme de Hitmaker D. Mais quand tu rappes sur un titre, Hitmaker D, ça le fait pas. Alors je l’ai abrégé, ça a donné HD. Puis, lorsque j’ai commencé à prendre la musique plus au sérieux, je me suis dit « Je n’ai pas envie qu’on me connaisse parce que je fais des hits, mais parce que je fais de la bonne musique. » Maintenant, HD veut juste dire « qualité ». J’essaie de te donner le meilleur. Et BeenDope signifie pour moi être le premier à reconnaitre son potentiel.
Tes deux devises sont « L.A.B.B. R.A.T. » et « A.W.Y.A. ». Peux-tu nous dire ce qu’elles signifient ?
L.A.B.B. R.A.T. veut dire « Learn And Become Better. Receive And Think. »
« Learn And Become Better. » : On apprend tous les jours. En ce moment même, on apprend quelque chose : vous apprenez à faire une interview et j’apprends à me présenter en public. On apprend grâce aux autres. Mais ça ne suffit pas. Si l’on ne se sert pas de ce qu’on a appris, ce savoir est gaspillé.
« Receive And Think » : Il y a beaucoup de « J’ai vu ça, donc c’est en train de se passer, il faut que je le dise à tout le monde. », en particulier sur les réseaux sociaux. Personne n’y pense vraiment. Parfois ça n’a aucun sens. Il faut digérer l’information et y réfléchir avant de la partager.
Enfin, « A.W.Y.A. » signifie « Accept Who You Are » : quand tu commences à rapper, tu rappes forcément comme les autres; à cause de tes influences, des artistes que tu admires. Quand tu as finalement quelque chose de personnel à raconter, il faut que tu acceptes qui tu es.
Est-ce que tu approuves le message du morceau « i » de Kendrick Lamar ?
Bien sûr ! C’est simple, il faut apprendre à s’aimer. La base, c’est toi.
Ta musique sonne à la fois très « boom-bap » et très moderne. Mis à part Jay-Z, NaS et Biggie, qui sont tes plus grosses influences ?
J’écoute beaucoup de musique : Action Bronson, J.Cole, Logic, Kendrick Lamar évidemment, Joey Bada$$… Soulection est un de mes Bandcamp préférés. J’écoute beaucoup de leurs sorties, et parfois l’envie me prend de rapper sur certaines.
Pense à la vie en général, imagine si tu ne pouvais être qu’heureux ou triste en permanence. La joie, la colère, ces émotions font de toi un être humain ! La musique, c’est la même chose. Un jour tu te dis « J’ai envie de donner aux gens quelque chose de brut. », un autre tu te sens plus du genre « J’ai envie d’un 808, je veux que ça sonne quand je l’écoute dans ma caisse. » C’est une question de dynamique.
Tu es très présent sur internet et très actif sur les réseaux sociaux. Jouent-ils un rôle important pour toi ?
C’est grâce à Internet que je suis ici. J’ai mis ma musique sur internet et les gens ont gravité autour. J’essaie d’être actif sur les réseaux sociaux. Je réfléchis beaucoup mais je n’ai pas forcément envie d’en parler. Je préfère écrire, le mettre en chanson. Mais quand on me parle, j’essaie de répondre à tous. Je fais toujours cet effort.
La première phrase sur The Greay(t) Area est « J’ai une question pour toutes les réponses que tu pourras me donner. » Penses-tu que c’est ton rôle, en tant qu’artiste, de remettre en cause la manière dont on vit et pense ?
Je crois que c’est notre rôle en tant qu’humains ! Il se passe beaucoup de choses chaque jour. Il faut prendre le temps d’y réfléchir, c’est important : « Pourquoi c’est arrivé ? Pourquoi j’ai réagi comme ça ? » Surtout lorsqu’il t’arrive quelque chose d’important.
Réfléchir, ce n’est pas que pour les vieux !
Tes textes abordent en général des sujets assez profonds. Prodigy disait « Je n’ai que dix-neuf ans mais je fais plus vieux que mon âge. » As-tu cette sensation ?
Je ne penses pas faire plus vieux que mon âge. Pourquoi un jeune ne pourrait-il pas réfléchir ? Réfléchir, ce n’est pas que pour les vieux !
En plus de rapper, tu continues tes études. Comment arrives-tu à gérer à la fois l’école et le rap ?
Oui, je suis en psychologie. Je veux aller à l’école. Mon seul souci, c’est que je ne fais pas mes devoirs, parce que je passe mes journées à enregistrer. Mais j’aime être à l’école et apprendre, j’aime débattre. Il faut que je m’y mette plus sérieusement. J’espère que j’aurai un peu plus de temps bientôt…
Quel lien entretiens-tu avec la scène new-yorkaise, avec des mouvements comme Beast Coast ou Pro Era ?
À New-York, tout le monde te connait, surtout si tu commences à faire le buzz. Mais personne ne veut vraiment te donner de crédit. Ils se disent « Si je lui donne du crédit, les gens vont se focaliser sur lui, et il faut qu’il restent centrés sur moi. » On doit se serrer les coudes. Je ne veux pas dire par là faire un gros son tous ensemble pour montrer qu’on est soudés. Juste respecter ce que font les autres. Des gars comme Dillon Cooper ou Oddisee (lire notre chronique de son dernier album The Good Fight) ont salué mon travail, même s’il pèsent plus que moi. C’est quelque chose que je respecte. Il s’agit de dire que l’on aime, il n’y a aucun mal à ça.
Sur Stepping Into Tomorrow, tu te dis un peu gêné de chanter à la fin de la dernière chanson. Est-ce que tu prends confiance en toi, d’un point de vue artistique ?
Quand j’ai la tête dans le guidon, je ne me rends pas compte des progrès que je fais. Mais quand je réécoute les morceaux, c’est clair qu’il y a une vraie progression ! J’ai fait des sons pour The Greay(t) Area que je n’aurais jamais pu faire pour Stepping Into Tomorrow. Simplement parce que je n’en étais pas encore arrivé là.
Quelle est ta chanson préférée parmi tous tes projets ?
Ça change tous les jours. En ce moment : « All Good ». Tu as beau t’être brouillé avec untel ou untel, ta vie a beau être un peu bousculée par-ci par-là, au final tu t’en sors quand même. Tout va bien !
En bonus, découvrez le mini-reportage d’HDBEENDOPE réalisé par nos amis du webzine Jaming Mag lors du dernier passage d’HD à Paris en Avril dernier.
Et comme à notre habitude, la traditionnelle sélection des meilleurs morceaux d’HDBeenDope by The BackPackerz. Enjoy !