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Les 10 meilleures (récentes) collaborations Rap & Reggae

La légende veut que Kool Herc, un des pères fondateurs du Hip Hop, soit débarqué de sa Jamaïque natale dans le Bronx à la fin des années 60. Il s’inspira grandement des sound systems de Kingston pour animer les premières block parties new-yorkaises. Si la parenté entre Rap et Reggae paraît évidente historiquement, les collaborations entre artistes des deux genres sont plus rarissimes dans les années 80. Pourtant, les influences jamaïcaines sont perceptibles dans l’œuvre de rappeurs comme Daddy Freddy ou KRS One. L’émergence du Raggamuffin dans les années 90 amène les deux genres à se rapprocher avec des combinaisons épiques tels Capleton/Method Man, Ice Cube/Don Jagwarr ou encore Mad Lion/Fat Joe, Doug E Fresh… Éteintes au début des années 2000, ces collaborations ont repris avec l’arrivée d’une nouvelle génération d’artistes Nu Roots en 2010. Pour passer un été Bad and Roots, The BackPackerz a sélectionné les dix meilleures collaborations entre artistes Reggae et Rap ces dix dernières années.

Mos Def – « Hey Baby » (ft. Stephen Marley)


« Hey Baby » avait tout pour devenir un classique. Une boucle mêlant beatmaking et dub, assortie par les présences de deux fortes personnalités, Stephen Marley et Mos Def. Extrait de l’album Mind Control du fils Marley, « Hey Baby » est paradoxalement passé un peu inaperçu en 2007 auprès du public rap. La combinaison fonctionne parfaitement grâce au compromis musical effectué par les deux artistes. Ni trop Reggae, ni trop Rap, les deux styles fusionnent sans trop choquer les fans de l’un comme de l’autre. Le monde du Reggae n’est certes pas totalement étranger à Mos Def, puisque le producteur Max Tannonne a mixé plusieurs de ses a capellas sur des instrus Reggae pour le projet Mos Dub, en 2010. D’autre part, le rappeur a été un temps également pressenti pour incarner le grand Bob Marley dans un biopic avorté de Dreamworks. De son côté, Stephen Marley a multiplié les featurings avec des rappeurs américains, notamment en 2016 sur son album Revelation Part II, où apparaissent entre autres Busta Rhymes, Black Thought, Rakim ou encore Rick Ross.

Nas & Damian Marley – « Leaders »


Coutumier du fait, Damian Marley a invité Nas en 2005 sur son titre « Road To Zion ». Depuis les deux hommes ont gardé des affinités pas évidentes au départ. Cette relation accouchera cinq ans plus tard d’un album en commun Distant Relatives . Cet album collaboratif reste à ce jour le summum dans le mélange des deux styles musicaux. En partie produit par son frère Stephen, ce disque contient des perles mêlant des influences américaines, jamaïcaines, mais aussi africaines. Les deux protagonistes avaient confié à sa sortie vouloir réaliser un album susceptible d’être écouté dans un auto radio.
Le choix du titre « Leaders » est tout sauf anodin. Il met en valeur l’aspect militant des deux musiques. Dans ce titre, Nas et Gong Jr, accompagné de son frère Stephen au refrain, vantent les qualités d’un leader noir. Si le couplet de Nas peut porter parfois à confusion pour son discours pro Nation Of Islam. La symbiose entre les deux voix semble d’une logique évidente. Ce morceau prouve l’existence réelle des similitudes entre les deux genres. Un morceau, que ne renierait  pas le père Marley, sûrement très fier de sa progéniture.

Sly & Robbie – « Bounce »


La présence de Wyclef dans ce top 10 semble d’une évidence limpide. D’origine haïtienne, l’artiste soliste a toujours ajouté des éléments caraïbéens à sa musique. Effectivement, ces influences se ressentent autant dans The Score, l’album culte des Fugees que dans son premier projet en solo, The  Carnival. Néanmoins, cette tendance est plus affirmée en 2003 dans son quatrième album, The Preacher’s Song. Un album, qui se veut être une sorte de Reggae Fusion Hip Hop. Depuis, Wyclef a collaboré à de multiples reprises avec des artistes jamaïcains, dont Sizzla, Buju Banton, Elephant Man ou encore Wayne Wonder.
Extrait de l’album Rythm Doubles du duo jamaïcain culte Sly & Robbie, « Bounce » est le seul titre du disque contenant l’apparition d’un rappeur. Et Wyclef en joue bien sûr, appuyant sa performance rapologique. L’artiste n’a aucun mal à s’adapter à la production très rap des célèbres musiciens de Kingston. Bounty Killer ajoute un crédit Dancehall non négligeable, avec sa voix grave si caractéristique. La rencontre Wyclef/Sly and Robbie ne date pas d’hier. Puisque les producteurs avait effectué un remix Reggae du fameux « Fu-Gee-La » des Fugees en 1994.

Smif N Wessun – « Born and Raised » (ft. Jr Kelly )


Sept ans après avoir perdu leur procès pour « naming » illégal, le duo de Brooklyn revient en 2013 sous son appellation d’origine. Pour célébrer cette renaissance, Tek et Steele, réunis sous le pseudo Smif N Wessun, ont décidé de prendre une direction musicale surprenante. Celle du Reggae Dancehall, auquel ils rendaient jusqu’alors hommage à travers la fumée vaporeuse d’énormes blunts.
Pour ce projet, les rappeurs sont demeurés étonnamment fidèles aux racines du Reggae. Les producteurs de ce 10 titres, Beatnick & K-Salaam, ont tenu à garder des rythmes et des ambiances, très proches des Dubs originels. Sans trop sonner eighties, ni dancehall, le disque réussit à composer entre les deux styles. Tek et Steele ont bien entendu adapté leur flow, en adoptant un débit proche du toast et des références liées à la culture rastafari. La meilleure illustration de cette démonstration reste ce morceau éponyme, dont le clip a été tourné dans les rues de New York. Junior Kelly, artiste très proche du Reggae Roots, leur donne la réplique dans un refrain, qui donne une dimension très jamaïcaine. « Born and Raised » contient également les présences d’artistes Reggae comme Junior Reid ou Jahdan.

Popcaan – « Born Bad » (ft. & Freddie Gibbs)


Cette combinaison entre Popcaan, chanteur Dancehall jamaïcain, et Freddie Gibbs, habitué à des ambiances plus pesantes, paraît surprenante. Surtout qu’elle provient d’un disque composé  de morceaux essentiellement orientés rap West Coast. Ce projet, Welcome To Los Santos, est né d’un projet commun entre les deux producteurs californiens, Oh No et The Alchemist, qui forment à eux deux le groupe, Gangrene. Ce titre, « Born Bad », tend plus vers des sonorités Dancehall. Popcaan procède à une démonstration vocale, où il alterne les variations plus ou moins rapides de débit. Sûrement entraîné par le toast hypnotique du jamaïcain, Freddie Gibbs tente d’adopter une tonalité de voix similaire. Quelque peu dépassé, le rappeur s’en tire tout de même avec les honneurs. Il est vrai que Popcaan est un habitué des « duels » avec des rappeurs comme Pusha T, Young Thug ou encore Busta Rhymes, qui possède aussi des origines caraïbeennes.

Snoop Lion – « Lighters Up » (ft. Mavado, Popcaan)


Tout le monde connaît la passion dévorante de Snoop pour les pouvoirs hallucinogènes de la Weed. Cette addiction toxique est sûrement sa principale motivation à la réalisation d’un album « Reggae ». En 2013, Snoop s’accorde donc une pause « rastafari » dans sa discographie Gangsta Funk déjà bien fournie. Malgré les critiques cyniques d’artistes Reggae chevronnés comme Bunny Wailer, sa reconversion en Snoop Lion ferait presque illusion. Tant cet album pompeusement intitulé Reincarnated se montre dans son ensemble réussi dans sa direction musicale très Roots, signée Diplo. Si il faut effectuer l’impasse sur certains morceaux ou invités comme Miley Cyrus. L’auditeur amusé tombe sur des morceaux, qui tiennent bien la route. C’est le cas de ce « Lighters Up », où participent deux artistes jamaïcains issus de la nouvelle génération, Mavado et Popcaan. Cet album reste surtout un prétexte pour Snoop de démontrer l’étendue de ses talents vocaux. A noter la présence éparse d’artistes de la scène Reggae sur ce disque, mis à part celle de Collie Budz ou Jahdan.

Raekwon & Kabaka Pyramid  – « BE Inspired »


« Be Inspired » ravira plus les adeptes de rap que de Reggae. Construit autour d’une base musicale rap, ce morceau est un des titres phare de la bande originale du documentaire Be Inspired. Un film, qui montre les exploits de skieurs acrobatiques en plein freestyle. La B.O. se veut un mélange d’artistes rap et reggae sur des productions pour la plupart signées Diplo ou Black Shiney. Très à l’aise sur ce morceau enlevé, Raekwon se ballade littéralement. Mais l’intérêt pour les fans du Chief se situe dans la découverte du producteur/chanteur, Kabaka Pyramid. Représentant emblématique de la scène Nu Roots, Kabaka fait partie de ces artistes, ayant de fortes affinités avec le rap, notamment celui du Wu Tang Clan. Mis à part une apparition de Junior Reid, les ponts entre le Wu et le Reggae sont très rares. Inédit donc, le duo Raekwon/Kabaka Pyramid fonctionne plutôt à la perfection.

Kendrick Lamar – « The Blacker The Berry » (ft. Assassin)


« The Blacker The Berry » possède un statut un peu à part dans la tracklist de To Pimp A Butterfly. Sur un instrumental  particulièrement pesant, Kendrick Lamar partage le micro avec la star du Dancehall, de surcroît neveu de Spragga Benz, Assassin. Le Jamaïcain soutient sans problème la comparaison avec le prodige de Compton. Bien porté par sa voix grave, Assassin donne un peu plus de relief à un titre structuré d’une manière beaucoup plus complexe, qu’il n’y parait. Composé d’une partie principale assez répétitive, « The Blacker… » se termine en apothéose par une sorte d’outro jazz. Si Assassin arrive à tenir la dragée haute à un Lamar affûté, il le doit sûrement à ses précédentes apparitions aux côtés de gros calibres comme Kayne West, mais également à son excellente réputation dans le milieu, qui salue ses qualités de lyriciste.

Joey Bada$$ – « Babylon » (ft. Chronixx)


Chronixx et Joey Bada$$ incarnent les dignes représentants de la nouvelle génération, qui ont apporté du sang frais à leur catégorie respective. Les deux artistes avaient déjà collaboré ensemble sur le premier album de Bada$$ sur le titre « Belly of The Beast » en 2015. Les affinités du rappeur new-yorkais avec le Reggae ne datent pas d’hier donc. Puisque des sonorités du genre étaient déjà très présentes sur le titre « Yout », extrait de son EP Summer Knights en 2013. Le membre le plus célèbre du Pro Era Crew a réitéré l’expérience en 2017 pour les besoins de l’album All Amerikkkan Bada$$.Particulièrement séduisant par ses nappes mélodiques, « Babylon » démontre surtout la complémentarité vocale des deux protagonistes. Si Joey se taille la part du lion, en occupant l’ensemble des couplets du morceau, Chronixx réussit à taper dans le mille dans sa courte partie avec des paroles tranchantes. Par ailleurs, nous vous invitons à découvrir plus amplement ce chanteur à travers ses deux albums Dead & Terrible et Chronology.

Damian Marley – « Medication » (ft. Stephen Marley, Wiz Khalifa & Ty Dolla Sign)


Pour boucler ce top 10, l’association des deux frères Marley s’imposait. Car cette paire de la fratrie Marley reste indéniablement les artistes jamaïcains qui ont effectué le plus de collaborations avec des rappeurs, ou tout du moins les plus marquantes de ses dix dernières années. A leur palmarès, on compte des artistes du calibre de Jay Z,  Black Thought, ou encore Cypress Hill. Les deux frères travaillent fréquemment en binôme. Si Damian reste la plupart du temps proche d’un Reggae Roots, de son côté, Stephen aime s’aventurer le plus souvent dans des expériences Ragga/Hip Hop. Pour le remix de son titre « Medication », paru à l’origine sur l’album Stony Hill en 2017, Damian Marley a invité deux membres du Taylor Gang, Wiz Khalifa et Ty Dolla $ign. Ce combo est sûrement rassemblé autour de leur amour immodéré pour la plante «médicinale» locale. Puisque l’herbe reste le thème central de cette chanson, où les artistes vantent ses mérites thérapeutiques. La fusion opère tellement bien qu’il est difficile de repérer les transitions entre les différents protagonistes. Un très bon exemple, qui prouve que Rap et Reggae font souvent bon ménage.

Rémi Chervier

Ayant vécu « l’âge d’or » du Jazz Rap et de la West Coast, il est dans son élément avec Kendrick Lamar, Joey Bada$$ et consorts. Amateur de Jazz, Soul et autres RnBeats.

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