Avec cette année 1999 on ne pouvait bien évidemment pas passer à côté des premiers albums solo de Mos Def et Pharoahe Monch sur le mythique label Rawkus, une structure musicale véritable marqueur de cette époque et d’une qualité qui n’a jamais été remise en cause. Celui qu’on avait découvert avec le groupe KMD sous le pseudo Zev Love X fera lui aussi ses grands débuts en solo en tant que MF Doom avec la naissance d’un mythe masqué.
C’est cette année également qu’un certain Eminem explosera à la face du monde en tant que Slim Shady donnant par la même occasion la possibilité à Dr. Dre d’effectuer un retour fracassant au top du rap game avec cette fameuse suite 2001 à son premier classic The Chronic. Avec Rakim il est aussi question d’un second album venant inscrire, s’il le fallait encore, un peu plus sa légende dans les livres d’histoire. Jamais un micro n’aura trouvé meilleur représentant que le God MC.
Dans les vétérans du mouvement Hip Hop, il y a aussi Prince Paul qui occupera toujours une place particulière, et à qui l’ont doit quelques classics comme les premiers projets de De La Soul. Sa seconde sortie solo A Prince Among Thieves restera comme l’un des moments forts de 1999. Une année qui sera aussi la confirmation que le groupe The Roots est certainement ce qui est arrivé de mieux au rap pour étendre ses frontières. Qui n’a pas été chamboulé par ce projet Things Fall Apart faisant office de 4ème opus pour le crew de Philadelphie ?
Jay-Z bouclera avec Vol. 3… Life and Times of S. Carter sa première trilogie devenant au passage le King of New York incontesté avec un label (Roc-A-Fella) et une ligne de vêtement (Rocawear) qui en fera aussi l’un des artistes les plus fortunés de l’industrie musicale. Et pour finir cette revue d’effectif de nos 10 albums marquants de 1999, on ne pouvait pas oublier ce fameux duo Method Man & Redman qui signera avec Blackout! l’un des grands moment de leurs carrières avec des performances sur scène qui marqueront toute une génération.
Sortie : 12 octobre 1999
En cette fin d’année 1999, l’attente autour d’un premier album solo de Mos Def est palpable, d’autant plus après la sortie un an plus tôt de son excellent projet en commun avec Talib Kweli (Black Star). Il suffira d’un seul maxi 2 titres au rappeur de Brooklyn pour propulser son album Black On Both Sides au panthéon des sorties Hip Hop de ces années 90. Les 2 morceaux en question, « Ms. Fat Booty » et « Mathematics » produit respectivement par Ayatollah et DJ Premier, sont un condensé parfait de la culture Rap de l’époque et de l’univers revendiqué par le label Rawkus. Celui qu’on a découvert en 1996 sur les projets de De La Soul (Stakes Is High) et Da Bush Babees (Gravity) installe sur ce LP un discours politique où les réflexions autour de la préservation de l’environnement et d’une économie globale plus juste se distinguent de ses congénères. La situation de la communauté Afro-Américaine est aussi largement abordée avec des titres puissants comme « Do It Now », « Rock N Roll » et « Mr. Nigga ». L’activiste fût aussi l’un des premiers rappeurs à se lancer dans l’exercice périlleux du chant, tout en faisant l’unanimité en tant que MC. Tous ses aspects font de Black On Both Sides un album qui restera à part, tout comme son auteur.
Sortie : 23 février 1999
Things Fall Apart, quatrième album du groupe de Philadelphie The Roots est sorti le même jour que deux autres mastodontes de cette même année: Prince Among Thieves de Prince Paul et The Slim Shady LP d’Eminem. L’ironie du sort voudra que ce dernier remporte le Grammy de meilleur album rap au détriment de Things Fall Apart, lui aussi nominé. Une nomination aux Grammys ? Et pour cause, l’album est un véritable bijou. Black Thought excelle au micro, comme à son habitude, aux côtés de Common, Beanie Sigel et Mos Def. Les productions sont léchées, le groupe étant épaulé par Dilla ou Scott Storch sur certains titres comme « Dynamite », « Adrenaline » ou encore « You Got Me ». Ce dernier morceau remportera d’ailleurs le Grammy de meilleure performance par un duo ou un groupe. Things Fall Apart demeure à ce jour un album phare dans la discographie conséquente de The Roots.
Sortie : 23 février 1999
Certains se demandent aujourd’hui pourquoi Eminem est considéré comme le meilleur rappeur de sa génération. Pour s’en convaincre, il suffit d’écouter The Slim Shady. Slim Shady, son Mister Hyde, réussit le pari fou d’emmener Dr. Dre dans son univers déjanté, à la limite de la schizophrénie. Habitué à un environnement rap plus conventionnel, Dre apparaît aux côtés de son protégé dans le titre « Guilty Conscience », qui narre les déboires du producteur avec un obscur artiste de Los Angeles. La meilleure illustration des propos transgressifs du rappeur de Détroit réside dans le morceau « ’97 Bonnie & Clyde », où il met en scène le meurtre de la mère de sa fille en présence de cette dernière. Eminem confiera plus tard avoir conçu cet album comme un film d’horreur, passant d’une ambiance glauque à une autre plus festive. Outre son caractère polémique, The Slim Shady contient quelques pépites un peu oubliées, comme « Rock Bottom » et « Bad Meets Evil », où il forme un duo spectaculaire avec Royce da 5’9″. Cet album a aussi permis à Eminem de faire oublier la blancheur de sa peau au profit d’un potentiel technique et artistique jusqu’alors unique. Dans ce domaine, ce disque n’a pris aucune ride.
Sortie : 16 novembre 1999
Au moment où certains se demandaient si on allait revoir un jour en haut de l’affiche un projet de Dr. Dre, la rencontre de ce dernier avec un rappeur blanc de Detroit bouleversera complètement la donne. Neuf mois après la sortie du premier album sur major de son nouveau protégé, le doc de Compton se décida enfin à lâcher la suite de The Chronic sous forme de Chronic 2001. « The Next Episode » et « Still D.R.E. » replaceront Dr. Dre au top du game et lanceront cette énorme période de domination où chacune de ses prods sera synonyme de succès. Un projet qui sera l’occasion de retrouver d’anciennes connaissances comme Snoop Dogg, Nate Dogg, Kurupt, MC Ren et Tray Dee, mais aussi de nouvelles voix comme Hittman, Six-Two, Knoc-Turn’Al et Ms. Roq.
Sortie : 19 octobre 1999
Après avoir fait ses preuves au sein d’Organized Konfusion, c’est en 1999 que le rappeur du Queens Pharoahe Monch sort son premier album, Internal Affairs. Un album sombre, à l’image de sa cover, sur lequel Pharoahe Monch prouve un peu plus qu’il fait partie des top MC’s de l’époque. Le rappeur a également produit et co-produit quelques morceaux, aux côtés de Lee Stone, DJ Scratch, Diamond D et un jeune Alchemist. Morceau incontournable de l’album, Simon Says deviendra un véritable banger qui fait encore bondir les foules pendant les concerts 20 ans après. « No Mercy » ou encore « Behind Close Doors » sont deux morceaux tout aussi percutants, qui viennent s’opposer aux titres plus smooth tels que « The Light » et « The Truth ». Pharoahe Monch a lancé sa carrière solo de la meilleure des façons avec ce Internal Affairs, qui n’a pas pris une ride en 20 ans.
Sortie : 28 septembre 1999
Il ne faisait pas grand doute que ce projet en commun de Method Man et Redman serait à la hauteur des attentes. A la fin de ces années 90, les 2 MC’s restent des références absolues dans le milieu et cette association est aussi celle de leurs producteurs fétiches, RZA et Erick Sermon. Sans se prendre au sérieux mais avec une application de tous les instants, Meth & Red rendent une copie quasi parfaite dont le titre « Da Rockwilder » restera le morceau iconique. On ne peut pas non plus passer sous silence cette énorme collaboration « 4 Seasons » concoctée par Erick Sermon avec LL Cool J et Ja Rule en featuring. Ni ces tueries que sont les morceaux « Cereal Killer » (RZA) et « 1, 2, 1, 2 » (DJ Scratch). Et si je n’ai strictement aucun souvenirs de la suite Blackout! 2 qui verra le jour 10 ans plus tard, le premier projet du nom restera pour toujours l’énorme collaboration de cette année 1999.
Sortie : 20 avril 1999
En 1999, un ovni débarque sur la planète rap. Un ovni maqué. Son nom ? MF DOOM. Mais le MC anonyme n’en est pas à son coup d’essai. Anciennement connu sous le patronyme Zev Luv X au sein du groupe KMD, ce jeune rappeur de Long Island a disparu des radars pendant plusieurs années suite au décès brutal de son frère en 1995. Il réapparaît masqué, volonté de garder son anonymat et aussi se démarquer de ses pairs par cet accessoire. Son premier opus, intitulé Operation: Doomsday est une introduction dans l’univers de MF DOOM : un condensé de technique, d’humour, d’ego trip et de tranches de vie. Cet album porte aussi la patte sonore de Daniel Dumile, un mix singulier aux sonorités « crades ». Produit par MF DOOM et MF Grimm, l’album deviendra rapidement une référence du rap underground et lancera la carrière du mythique personnage de DOOM.
Sortie : 28 décembre 1999
Au rythme d’un album par an, Jay Z est devenu en 1999 le poids lourd des ventes du Rap Game. The Life and Times of S.Carter n’échappe pas à la règle, avec ses trois millions d’exemplaires écoulés rien qu’aux Etats Unis. Mais au delà de son succès commercial, cet album marque le retour de Jay Z vers des sons plus épurés. Les amateurs le considèrent comme un retour vers un état d’esprit plus proche de la « Street Credbility » de Brooklyn. Cette tendance se confirme nettement dans les titres « So Ghetto » et « Jigga My Nigga », où l’on retrouve les fidèles Preemo et Timbo aux commandes. Shawn Carter ne s’empêche pas tout de même quelques fantaisies, comme ce rapprochement avec le Dirty South « Big Pimpin' » avec comme invités les sudistes d’UGK. Un titre précurseur du déferlement des sons Trap dans les années 2000. Sans être marquant, ce volume 3 clôt la suprématie du son new-yorkais et annonce l’avènement d’une autre ère.
Sortie : 30 novembre 1999
En seulement 5 ans et 4 albums, le duo Eric B. & Rakim changea la face du Hip Hop pour toujours. Le MC de Long Island démocratisera une nouvelle manière de rapper avec une approche beaucoup plus stylisée et intellectuelle de son art. Il a fait passé ce style musical de simple mode à un genre qui deviendra dominant quelques années plus tard. Après la sortie de son premier album solo The 18th Letter en 1997, le God MC remet cela 2 ans plus tard avec The Master qui possède les même caractéristiques que son prédécesseur. Une signature vocale imposante et un flow qui est encore ce qui se fait de mieux dans le game, incarné par des morceaux comme « Flow Forever » et « When I Be On The Mic » qui débutent cette œuvre.
Sortie : 23 février 1999
Réaliser un film musical c’est l’exploit qu’aura réussi à accomplir Prince Paul avec son album concept Prince Among Thieves sorti en 1999. Déjà très adepte des interludes narratives et humoristiques comme il l’a montré sur les albums de De La Soul, le producteur a décidé de développer l’idée sur un album entier. Prince Among Thieves raconte l’histoire de Tariq, jeune rappeur qui cherche à se faire un nom dans l’industrie en donnant sa démo à RZA. Mais le chemin de la notoriété est semé d’embûches . Pour ce long métrage, Prince Paul s’entoure d’un casting cinq étoiles : Big Daddy Kane, RZA, Biz Markie, Xzibit, De La Soul, Kool Keith, Buckshot… Chaque morceau est un chapitre de ce film et chaque interlude vient introduire un nouveau personnage, une nouvelle scène. S’il reste un peu méconnu, Prince Among Thieves a décroché la palme d’album d’or concept de l’année 1999.
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