Ka, le poète désillusionné de Brownsville
Années 80, le trafic de drogue décime New York et ses ghettos. Crack, cocaïne et autres produits illicites pullulent dans les rues causant de nombreuses victimes. Ce New-York là, c’est celui dans lequel a grandi Kaseem Ryan, une époque durant laquelle il a vu bon nombre de ses amis mourir sous les coups de feu ou l’addiction.
Aujourd’hui c’est sous le nom de Ka que cet homme cherche à extérioriser ses peines passées dans un rap sombre et sincère.
Ka – « Conflicted »
Il sort en août 2016 son sixième projet depuis 2008 (et son cinquième en quatre ans) intitulé Honor Killed The Samurai. Comme dans ses précédents projets, pas question de parler du présent tant cela semble facile. C’est dans la plaie ouverte de sa jeunesse torturée qu’il puise son inspiration. On retrouve donc des formules qui indiquent son état d’esprit à l’époque, celui d’un jeune noir faisant face à un choix cornélien. Mais à travers ces textes très personnels, Ka se pose en porte-parole de toute une génération qui a connu ces années horribles à New York. Le thème évoqué par le titre survole l’album, puisque les questions de fierté et d’honneur si chères aux Samouraïs, semblent tout aussi importantes pour le rappeur de Brownsville.
« Your lies are crucial, they don’t ride salute you
But I spill my guts ’bout the suicide, seppuku »
Jeux de mots, métaphores en pagaille, Kaseem manie le lexique comme un vrai poète. En effet, il utilise souvent les mots ou les expressions dans leur double sens pour entretenir une dualité tout au long de l’album. Cette dualité est la même que sur ses autres albums : survivre dans l’illégalité, ou suivre le droit chemin au risque de ne pas s’en sortir. Il illustre ses textes par des références culturelles, religieuses. Il utilise notamment les échecs de façon régulière comme une métaphore pour indiquer qu’il faut tout calculer et que le moindre faux pas peut être synonyme de défaite.
« Can’t be pussy in a dog fight
The law don’t forgive what the Lord might »
Ka – « Just »
L’ensemble des instrumentaux de l’album sont composés par Ka, cela confère donc une grande cohérence à tout le projet. Ainsi, comme les textes, la production entretien une ambiance plutôt sombre, glaciale et grave. Dans son style habituel on y retrouve des morceaux aux boucles très répétitives et aux drums épurées. C’est sa façon de faire en sorte que l’auditeur se focalise sur les textes plutôt que sur les beats, puisque toute l’importance du rap de Ka réside dans sa plume.
Avec Honor Killed The Samurai, Ka affirme une fois de plus son don pour l’écriture. Si cet album plaira aux amateurs du MC de Brownsville, les auditeurs curieux ne doivent pas s’arrêter à la première impression, car le rap de Ka requiert bien souvent plusieurs écoutes afin d’en saisir la subtilité.
Découvrez Honor Killed The Samurai de Ka :