On est allé à un concert de Brav… en appartement

On est allé à un concert de Brav… en appartement

Loin des ambiances parfois surfaites ou impersonnelles de nos habituelles salles de concert parisiennes, je suis allé à la découverte d’une autre expérience musicale en assistant à un concert en appartement de Brav, un artiste écorché, entier et militant, profondément humain, incarnant à 200% les valeurs parfois oubliées du Hip-Hop. Retour sur une expérience unique en son genre et émotionnellement forte.

Après avoir assisté dimanche dernier au concert de Brav lors d’une Block Party dans le 10ème arrondissement de Paris, ma première impression fut naturellement excellente. Déjà parce que j’écoute depuis sa sortie son dernier album Error 404, présent dans notre top 10 des meilleurs albums de rap français 2016, et ensuite parce que je souhaitais avoir la confirmation que Brav donnait sur scène au moins autant de frissons que dans mes écouteurs. Force est de constater que mes attentes ont été dépassées tant cet artiste sait interpréter sur scène – que dis-je? –  incarner ses morceaux.

Mais ce concert m’a donné un goût de trop peu, l’affiche étant partagée avec d’autres artistes, je sentais bien alors que le spectacle proposé n’était qu’une version allégée d’un ensemble bien plus riche. Les choses étant bien faites, Brav se reproduisait trois jours après à Fontenay-sous-bois dans le 94, au Café Citoyen, pour un « concert en appartement ». Comprenez ici que l’artiste se produit dans une salle de taille modeste ou un appartement où les meubles du salon auront été poussés, le but étant ici de créer un maximum de proximité avec son public, pouvoir échanger avant et après le concert avec lui, partager un verre, un sourire, une photo souvenir.

L’expérience est à première vue déroutante, et les premières minutes peuvent sembler étranges. Plus de barrière entre le public et l’artiste, pas d’estrade qui établit un relation quasi hiérarchique entre les deux. Brav évolue ainsi d’égal à égal, regardant chaque personne dans les yeux en interprétant avec une vérité et une profondeur d’âme chacun de ses titres, en narrant « son quotidien, enfin, notre quotidien ». Au bout d’une chanson, le public ressert les rangs autour du conteur d’un soir, se met à oser soutenir son regard, commence à chanter en coeur d’une manière décomplexée. Puis viennent les premiers pas de danse, les corps se détendent et comme le dit Brav: « Le concert peut réellement commencer ».

C’est à ce moment là que le concert bascule dans sa finalité réelle: nous faire vivre un vrai moment d’humanité, tous ensemble, en musique et en paroles. Car si les textes écorchés de Brav sont des plus militants, ils n’en restent pas moins emplis d’une volonté réelle de changement et placent en l’être humain autant de pessimisme que d’espoir.

Le moment est savoureux pour beaucoup, bouleversant pour tout le monde. Car, en faisant partie intégrante de la scène, on se prend à regarder le public autant que l’artiste. Et ce public, dans toute sa diversité d’âges, de couleurs ou d’origines, partage des sourires, des émotions, des rires et même quelques larmes. Le partage est total quand une spectatrice devient elle-même actrice d’un duo improvisé et touchant avec l’artiste sur le titre « Revolving ». Peu d’artistes offrent de tel moment à leur public, mais ici cela semble presque normal, car nous sommes en famille.

Après l’interprétation quasi théâtrale de « Post-Scriptum » (qui dans un premier temps avait été offert par Brav à Kery James sur son album Dernier MC) qui laisse la salle sans voix, l’émotion est totale, l’ovation semble sans fin, si bien que Brav semble lui-même gêné. Impossible pour lui alors de terminer sur cette note, et souhaitant redonner sourire et bonne humeur à tout le monde, il interprète alors le titre plus dansant « A l’évidence ».

L’expérience ne s’arrête alors pas pour autant puisqu’une fois la musique coupée, tout ce petit monde prolonge le plaisir autour d’un verre, échange avec l’artiste, profite du stand dressé pour compléter sa discographie, ou acquérir le livre retraçant le parcours photographique au coeur de la Palestine intitulé poétiquement La Lune Sans Les Etoiles et réalisé là encore par Brav. Les portes finissent par se fermer, tout le monde se salue chaleureusement car après cette expérience, plus personne n’est étranger à l’autre, nous avons tous partagé ce moment. Ensemble.

 Crédit photo: Antonin