Apollo Brown – Grandeur

Septembre 2015

Apollo Brown

Grandeur

Note :

Depuis 2007, Detroit peut compter sur un nouvel allié de taille pour repositionner Motor City sur la carte des places fortes du Hip Hop. Avec Apollo Brown, la ville voit là l’émancipation d’un jeune talent qui très vite devient incontournable sur l’échiquier du rap. Avec des productions puissantes et des choix d’artistes souvent malins, Erik Stephens vient tout bouleverser à grand coup de samples soulful.

Avec déjà quatre albums solos plus une pléiade de collaborations, le beatmaker du Michigan débarque avec un nouveau projet modestement intitulé Grandeur. Tantôt uniquement instrumentaux, tantôt rappés, les projets d’Apollo Brown constituent toujours un véritable événement dans le microcosme rap underground. Sur Grandeur, le producteur se la joue collectif en invitant une multitude d’artistes pour poser sur ses productions.

Littéralement Hip Hop Head

Ici pas de surprise, dès l’intro, Apollo Brown nous accueille chez lui. On se sent un peu comme à la maison et de suite on enfile nos charentaises et on visse notre casque sur les oreilles. Ce son si familier et rassurant résonne comme une bonne histoire qui nous est contée près du feu. Pas de doute, on est en 2015 et Apollo Brown fait du Apollo Brown. Mais ne nous gâchons pas ce plaisir (pour le moment en tout cas). Chaque année, comme une madeleine de Proust, on aime retrouver ce bon Apollo et ses samples cramés qui font vibrer notre petit cœur d’amoureux de Hip Hop. Ce Grandeur est très solide, évidemment très bien produit, mélodieux et boombap à souhait. On y retrouve tous les petits trucs d’Apollo Brown entre craquements de vinyl, samples soul, pianos, violons…La magie d’Apollo réside en cette faculté à enrober une mélodie somptueuse dans une discorde de drums ultra puissantes à t’en faire péter les tympans. L’efficacité des productions d’Apollo Brown est évidente. Dans la catégorie boombap, le producteur de Detroit arrive à décrocher le hochement de tête de n’importe qui. L’ensemble reste très (trop ?) homogène. À force d’utiliser les mêmes tours, même les plus grands magiciens arrivent à nous lasser et c’est peut être ce qui est en train d’arriver à Apollo Brown. Toujours parfait, impeccable, la justesse des productions du beatmaker en fait aussi sa faiblesse. Quand le très bon devient banal, on se met à douter. Parce que oui, pris un à un les titres de ce Grandeur sont souvent excellents, parfois grandioses et rarement mauvais. Mais voilà, tout ceci devient lassant et les ficelles sont trop visibles. Du coup, le projet traîne en longueur et on a l’impression de se refaire le même opus année après année depuis Trophies.

Une véritable Dream Team

Grandeur compte à lui seul pas moins de 18 titres en featuring. La réputation du beatmaker qui traîne sa MPC depuis maintenant 8 ans dans le game lui permet de réunir tous les grands noms de l’underground. Ici, vous retrouverez pêle-mêle The Barrell Brothers, Oddisee, M.O.P., Chino XL, Finale, Evidence, Rasheed Chappell, Saga, Ty Farris, Rapper Big Pooh, Dynasty, Ras Kass, Vinnie Paz, Blacastan, Your Old Droog, Masta Ace, Wordsworth, Maffew Ragazino, Freddie Gibbs, OC, Westside Gunn, Planet Asia, Eternia, Sean Price, Reks et Ugly Heroes.

En réalité, la véritable force de cet album réside dans ce casting XXL. Une liste de MC’s qui n’est pas le fruit du hasard et qui permet à Apollo Brown de s’appuyer sur de grands noms de l’underground pour se maintenir en vie.

My new album « Grandeur » is 19 tracks deep. I normally do one emcee collabs, but this is a producers collection featuring…

Posted by Apollo Brown on Sunday, September 27, 2015

Les ronflements des drums d’Apollo Brown ne pouvant plus nous surprendre on se réjouit lorsqu’un Evidence sort du bois pour venir danser et zigzaguer entre les drums ou bien de réécouter ce bon vieux Sean Price (RIP). Dans l’ensemble, on apprécie vraiment entendre tous ces MC’s se donner sur les beats du producteur de Detroit. En revanche, gros carton rouge sur le beat de « Who’s That » beaucoup trop propre à mon sens pour Freddie Gibbs !

Faire de la MPC les yeux fermés

Une fois de plus, Apollo Brown nous a lâché un gros album. Certainement pas l’album de l’année, mais un opus qui ravira les fans de la première heure. Clairement pour les fanboys et pour les personnes qui ne connaissent pas encore Apollo Brown, ruez-vous sur cet opus qui vous fera hocher la tête pendant de longues heures. Pour les autres, la pilule est plus dure à avaler. Comme on l’avait déjà expliqué dans notre lettre ouverte à Apollo Brown, la recette ne prend (presque) plus. Et même s’il y a assez peu de déchets dans cet opus, on s’ENNUIE ! Plus le temps avance et malheureusement plus le capital accumulé au fur et à mesure de ses projets s’estompe. Alors oui, il nous reste encore des pièces à remettre dans la machine, mais j’ai bien peur qu’à force de détrousser ses auditeurs, il arrivera un jour où le producteur se retrouvera seul, lui, son boombap et ses drums. Alors wake up Apollo. Aujourd’hui le label Mello Music Group est devenu une vraie référence et je pense que le beatmaker de Detroit a toutes les armes pour réagir donc laissons-lui encore un peu de crédit.